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Semi était allongé dans son lit, les yeux collés au plafond. Il venait d'avoir une discussion avec ses parents - et sa sœur même si elle n'avait pas participé - et il en était ressorti ce qu'il craignait. Il avait dû leur expliquer que sa relation avec Kenjiro Shirabu n'était pas au beau fixe et que ce qu'il venait de se passer - leur "bagarre" - ne pouvait en être qu'une conséquence directe. Sa mère avait passé sa main dans ses cheveux et avait poussé un long soupir. Son père n'avait rien dit et s'était juste gratté la nuque. Il était alors parti dans sa chambre. 

Un souvenir lui traversa l'esprit et il attrapa un carnet dans le dernier tiroir de son bureau. Ce carnet lui servait à écrire ce qu'il ressentait auparavant et cela avait plutôt bien marché pendant sa deuxième année. Tout ce qu'il éprouvait pour Shirabu était méticuleusement consigné à l'intérieur. Il relut tout. 

"Je l'aime et je le hais en même temps." Cette phrase le marqua quand il pose ses yeux dessus. Était-elle toujours d'actualité ? Servait-il à quelque chose d'éprouver un sentiment quelconque envers une personne qui ne pourrait ressentir la même chose à moins d'être la cible d'un lavage de cerveau ? Pourquoi le haïr si on l'aime en même temps ? 

Semi ne trouvait pas de réponse à ses questions et décida de jeter l'éponge. Rien ne servait de réfléchir à cela pour le moment. Sa joue le piquait encore un peu alors il posa sa main dessus. Aujourd'hui il avait été physiquement plus proche que jamais de Shirabu.

❧☙

Semi entra dans le gymnase de Shiratorizawa comme à son habitude le lundi après les cours pour l'entrainement. Le week-end fini, il était retourné au lycée pour les cours mais avait promis à ses parents de rentrer le week-end suivant. Dès que son pied toucha le parquet, il ressentit la tension qui planait dans l'air. Regardant autour de lui, il ne vit que Goshiki qui s'affairait à installer les filets, les autres premières années qui sortaient les ballons et les plots, et Yamagata qui essayait de s'approcher de Goshiki.

Le passeur de troisième année se glissa dans les vestiaires sans faire attention et posa son sac sur un banc. Ce n'est qu'en s'asseyant et en relevant la tête qu'il aperçut Shirabu, qui, la lèvre en sang, se précipitait hors du vestiaire. Il se changea rapidement et toucha sa joue. Tout le monde allait voir le bleu et poserait des questions. Heureusement, il s'était mis d'accord avec sa sœur pour prétexter une bagarre avec elle. 

Une fois changé, il sortit des vestiaires avec son sac et alla le poser vers le banc des remplaçants. Tout le monde se rassembla et l'entraineur lança les échauffements. Un passeur de chaque côté, les autres joueurs frapperaient le ballon chacun leur tour et rejoindraient la file d'en face pour réitérer l'exercice un certain nombre de fois. 

L'échauffement terminé, ils passèrent à une série de matchs en dix points par set. Bien qu'ils soient chacun d'un côté du filet, Shirabu et Semi ne se lancèrent des piques à aucun moment, ce qui étonna grandement toute l'équipe. Le plus jeune semblait fuir le regard du plus vieux. Le deuxième année rata plusieurs de ses passes, ce qui fit perdre plusieurs sets à son équipe, malgré la réactivité de Goshiki pour tenter de les rattraper. 

Le coach finit par couper court à l'entraînement au vu du moral et de l'état de fatigue de l'équipe. Le matériel fut rangé en un claquement de doigts et la majorité de l'équipe s'en alla. Il ne resta plus que Semi qui attendait Yamagata, Shirabu qui attendait Goshiki, et les deux attendus qui semblaient tendus. 

Le libéro s'approcha du petit as, nerveux. Il se racla la gorge et posa sa main sur l'épaule de Goshiki qui lui tournait le dos. 

- Je.. excuse-moi de te déranger. 

Le plus jeune lâcha le filet qu'il repliait et se tourna vers Yamagata, les poings serrés. 

- Je.. je me demandais si ça te dirait de venir avec moi au bal. 

À la surprise générale de ceux qui restaient, Goshiki le gifla et s'enfuit en courant après avoir récupéré son sac, suivi de près par Shirabu. 

Semi voulut plaisanter en s'approchant de son colocataire mais il abandonna en voyant son visage marqué par la peine et rougi par la douleur. 

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? 

- J'aimerais bien savoir mais j'en ai aucune idée, avoua Yamagata, la main sur la joue. 

- J'espère pour toi que c'est pas un truc grave parce que sinon c'est mort pour l'accompagner au bal la semaine prochaine. 

- Ouais. On verra bien. On ferait mieux de rentrer au dortoir et de prendre une douche avant le dîner. 

Semi acquiesça et partit avec son colocataire. 

❧☙

De leur côté, Goshiki et Shirabu s'étaient assis sur un banc, un peu plus loin du gymnase, à l'opposé des dortoirs. Le plus jeune triturait les mains et le plus vieux regardait le sol. 

- Je.. je ne sais pas pourquoi je l'ai frappé. 

- Tu ne sais vraiment pas ? 

- Si je sais mais c'était débile. Je n'avais pas à le faire. 

- Des fois on fait des choses débiles qu'on avait pas à faire. 

- Oui mais ce n'est pas juste, il ne méritait pas ça. 

- Tu veux me dire ce qu'il s'est passé exactement ? 

Goshiki sortit son téléphone de sa poche et alluma Instagram. Il rechercha quelques instants et montra une photo à Shirabu. On y voyait Yamagata qui souriait aux côtés d'un garçon roux. 

- Tu as vu comme ils sont proches ? 

- Tu sais quand même que Yamagata devait voir un ami ce week-end. 

- Il a dit ça parce qu'il ne voulait pas qu'on sache qu'il sort avec lui. 

Shirabu se passa la main sur le visage. 

- Et tu l'as giflé parce qu'il t'a proposé d'aller au bal avec toi ? 

- Oui. Je respecte son copain mais pas lui. 

- Mais qu'est-ce qui te fait croire qu'ils sont ensemble ? 

- Yamagata l'a appelé par son prénom dans les commentaire sous la photo. Il a dit "Merci pour cette super après-midi Shoyo !". Et moi il m'appelle juste par mon nom de famille. 

- Tu devrais mettre les choses au clair avec lui. Au lieu de lui faire la tête comme ça. 

Goshiki fit la moue et gratta le dos de sa main. 

- Et puis c'est pas très grave, tu lui as juste mis une petite gifle, il aura pas une grosse marque.. lui.

- Comment ça lui ? 

Shirabu se mordit la lèvre. 

- C'est moi qui ait frappé Semi. 

Le bal de ShiratorizawaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant