moonlight lovers

15

Ce soir-là, Sirius est de très mauvaise humeur. Il est complètement enfoncé dans son fauteuil, bras croisés, et fixe un point devant lui en fronçant les sourcils. Un peu plus loin, Remus est occupé à faire semblant de ne pas être la cause de cette attitude déplaisante en affichant un petit sourire innocent. Peter et James sont un peu perdus au milieu de tout ça.

— Padf.. commence prudemment Peter.
— Quoi ? Aboie Sirius.
— Tu veux un bonbon ?

Sirius n'a pas envie d'être en colère contre ses amis mais il ne peut pas s'en empêcher. Il attrape le bonbon que Peter lui tend avec espoir et le remercie d'un grognement. Remus roule des yeux.

— Ok, c'est quoi l'histoire ? Finit par demander James a tapant du poing sur l'accoudoir du sofa.
— Y a pas d'histoire, répond Sirius en tournant la tête pour éviter son regard inquisiteur. 
— Pourquoi vous vous faites encore la gueule ? Vous êtes trop bizarres en ce moment !
— On ne se fait pas la gueule, réplique Remus, lui-même peu convaincu.

James lève les bras au ciel, exaspéré. Peter fourre trois bonbons dans sa bouche, c'est sa façon de compatir. Sirius décide que c'est le bon moment pour faire une sortie dramatique. Il se lève et monte au dortoir dans un « bonne soirée » qui suggère fortement qu'il leur souhaite le contraire.

Il se jette à plat ventre sur son lit et se fait un peu l'effet d'un gamin capricieux – mais de toute façon, il est trop occupé à s'apitoyer sur son sort pour s'en soucier.
La porte du dortoir ne tarde pas à s'ouvrir dans un grincement. Sirius est prêt à envoyer bouler James, pourtant..

— J'ai parlé à Marlène.

Sirius sort la tête de son oreiller et regarde par dessus son épaule. Remus a fourré ses mains dans ses poches et fixe ses pieds.

— Elle m'a dit pour.. toi.

Sirius s'assoit et passe ses jambes hors du lit. Il attend que Remus continue en silence.

— Elle m'a dit pour Dorcas, aussi. En fait elle m'a tout raconté.
— Tout tout ?
— Pourquoi tu faisais l'idiot, entre autres. Et.. que t'étais vraiment sincère, que tu me prenais pas pour une espèce de jeu.
— Oh, parce que t'en doutais ?

Sirius se lève complètement et marche jusqu'à Remus, gardant tout de même une distance respectable. Ils se fixent en chien de faïence un instant. Le gris et le doré de leurs prunelles se mêlent dans un danse entêtante.

— Si tu sais tout, alors moi aussi j'ai le droit à des réponses, finit par exiger Sirius.

Remus pousse un soupir et hausse les épaules.

— Je suppose que oui.
— Est-ce que tu aimes Hestia ?
— Quoi ? Je.. enfin, c'est..
— Dis moi que tu l'aimes et je te laisserai.
— C'est.. compliqué.

Remus contourne Sirius pour s'assoir sur son lit et plonge sa tête entre ses mains.

— Y a rien de compliqué, Remus. Tu l'aimes ou non ?
— Je sais pas ! J'ai.. j'ai cru mais maintenant je suis plus sûr de rien. C'était plus facile quand tu m'ignorais.
— Quand je t'ignorais ?
— Quand t'as arrêté avec tes gestes et tes phrases ambiguës, et que t'as clairement fait comprendre à tout le monde à quel point tu.. aimais les femmes. Je me suis juste dit que j'avais tout mal interprété, et que je devais passer à autre chose.
— Et.. t'es passé à autre chose ?

Sirius se tient toujours debout, immobile face au lit. Remus lui lance un regard plein d'amertume.

— J'étais, oui. Mais là..
— Qu'est-ce qu'on fait alors ?
— T'es sérieux là ?

Sirius a un mouvement de recul. Les yeux de Remus lancent des éclairs.

— J'arrive finalement à t'oublier, à retomber amoureux, puis tu viens foutre la merde dans ma tête, et tout ce que t'as à dire c'est « qu'est-ce qu'on fait » ? Bah j'en sais rien, moi, Sirius ! Et si tu commençais par aller te faire foutre ?
— Ok, désolé.

Remus pousse un soupir excédé. Sirius fixe ses pieds en tripotant le bas de son t-shirt, comme un enfant qui vient de faire une grosse bêtise. La lune plonge la chambre dans une lumière bleutée, et Sirius songe que ça les représente bien. À s'aimer et se désirer dans l'ombre de la nuit mais jamais dans la lumière du jour. Ouais, c'est bien eux. Les amoureux du clair de lune.

— Je suis fou amoureux de toi, Remus, murmure-t-il après quelques instants Malgré tous mes efforts pour t'oublier. Et toi ?

Remus rougit et pousse un petit rire. Sirius lui jette un regard peiné.

— Ok, oublie ça.
— Sirius.
— Retourne avec Hestia. Je t'embêterais plus.
— Sirius !
— Quoi ?
— C'est bon.

Remus se lève et fait les cents pas dans le dortoir, bras croisés.

— Tu sais, avec Hestia c'est.. c'est tellement simple. On a les mêmes goûts, on est d'accord sur tout, elle est douce et attentionnée. Ça pourrait être parfait.
— Content de le savoir..
— Et ça ne l'est pas.
— Ah ?
— Et parce que c'est pas toi, idiot ! J'ai beau l'aimer de tout mon cœur, une partie de moi, une stupide partie de moi, me rappelle à quel point tout serait..
—  Tout serait ?
— À quel point tout serait parfait avec toi ! Enfin, parfait à notre manière, bien sûr, alors ce serait certainement pas la perfection pour beaucoup de gens mais..

Personne n'a jamais déclaré sa flamme à Sirius avec tant de colère. Il en rougit franchement.

— Moi aussi, idiot, conclut Remus. Moi aussi, je t'aime.

Sirius sourit comme un bienheureux – même si il aimerait que Remus cesse de le traiter d'idiot. Il le rejoint au milieu de la pièce, pose ses mains sur ses joues. Remus ferme les yeux et laisse son front aller contre le sien.

— Je peux t'embrasser maintenant ? Chuchote Sirius.
— Non.
— Quoi ? Pourquoi ?
— J'ai toujours pas rompu avec Hestia. C'est pas correct.
— Et alors ? Ça te dérangerait pas les fois d'avant.
— Je veux faire les choses bien.

Remus se recule et recommence à faire les cent pas.

— Qu'est-ce que tu vas lui dire ? Demande Sirius.
— La vérité.
— Non ! Pourquoi ?
— Je tiens à elle. Je ne dirai peut-être pas tout, mais je veux être honnête.

Sirius croise ses bras sur sa poitrine.

— Et si elle raconte tout aux autres ?
— Elle ne racontera pas tout, je lui fais confiance. Mais.. j'ai juste besoin que tu me fasses confiance aussi.

Sirius veut vraiment dire non. Il le veut vraiment mais il vient de retrouver Remus, rien ne sert de le perdre à nouveau stupidement.