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   Pendant plusieurs secondes, Francesca reste à me fixer, la bouche ouverte et les yeux exorbités. Je me dandine, mal à l'aise en baissant les yeux. Je n'avais pas prévu de lâcher le morceau, encore moins à Francesca.
   Je finis par regarder autour de moi et comme la sonnerie a retentit il y a déjà plusieurs minutes, plus personne n'est présent à l'exception des quelques retardataires qui courent dans tous les sens.

" Je t'en supplie, dis quelque chose ! Je craque en reposant mes yeux sur elle.
- Je... Whaou je ne m'y attendais pas Ava. Diego est au courant? Elle demande en attrapant ma main.
- Je... oui mais nan. Je veux dire ce n'est pas son bébé, je suis enceinte de cinq mois, c'est le bébé de Damiano. Je lui explique et elle me fait un léger sourire.
- Allons boire un café, on ne devrait pas en parler ici."

   Elle se lève d'un bond et m'entraîne dans son sillage. On rejoint un café tranquille à quelques minutes de route et après avoir passé commande, on s'installe à une table assez éloignée des autres clients.

" Alors, pourquoi Diego est au courant et moi et ton père ne savons rien de ta grossesse? Elle questionne doucement.
- J'ai eu une grossesse compliquée et la fameuse grippe en début d'année scolaire c'était en fait un problème avec le bébé. C'est comme ça que Diego l'a appris. Je répond et elle soupire.
- Je suppose qu'il s'est occupé de toi par la suite. Dit-elle en souriant doucement.
- Je ne m'y attendais pas et en plus je l'ai repoussé au début mais il ne m'a pas lâché. En fait, je ne pense pas que j'aurais réussi à mener cette grossesse sans lui. J'avoue finalement et les larmes me montent aux yeux.
- Tu sais... Diego est quelqu'un de bien qui a énormément souffert. Après ce qui est arrivé à sa copine, je ne pensais pas le voir heureux à nouveau puis tu es arrivée. Dit-elle en souriant mais son sourire s'éteint. Puis tu es partie...
- Je ne voulais pas le faire souffrir et je ne sais rien de ce qui lui est arrivé. Il n'est pas très loquace comme garçon. Je lui fais remarquer.
- Il avait 18 ans, il sortait avec une fille un peu plus âgée et elle est tombée enceinte. Elle commence son histoire, le regard dans le vide. Ils étaient très heureux mais à six mois de grossesse, elle a déclenché l'accouchement prématurément, il y a eu des complications et elle est morte sur la table. Mes larmes coulent en imaginant le jeune Diego, seul et avec un bébé. Sa fille est morte une semaine plus tard. Elle termine et j'ai un hoquet de surprise.
- Je n'en savais rien. Je comprends mieux son implication. Dis-je alors qu'elle attrape ma main.
- Tu devrais parler de ta grossesse à ton père. Jamais de la vie nous te mettrions dehors parce que tu as un bébé. Au contraire, je serai ravie d'être grand-mère! Dit-elle sur un ton plus joyeux.
- Avec toutes les tensions à la maison, je serai mieux à Buenos Aires. Je rétorque mais elle secoue la tête.
- Tu ne seras jamais mieux qu'auprès de ta famille et j'ai conscience qu'avec le mariage j'ai été très prise et je n'ai pas assez fait attention aux agissements de Marina et Alexia mais Alejandro m'a tout raconté et je te promets que ça ne se reproduira plus. Dit-elle en me souriant.
- Ce n'est pas une bonne idée et de toute façon Diego ne doit pas avoir envie de me voir, plus jamais. Je réponds en secouant la tête.
- Ou alors tu te trompes lourdement. Déclare une voix rauque dans mon dos."

   Je me fige, je ne suis pas prête à le voir, pas prête à lui parler et j'ai le souffle court. Francesca se lève, pose une main sur mon épaule et me souffle un désolé avant de partir comme une traîtresse.  C'est après quelques secondes que Diego apparaît dans mon champ de vision et je ne peux empêcher mon cœur de vriller et d'accélérer dans ma poitrine. C'est fou ce qu'il m'a manqué.
   Après une plus profonde inspection, je constate qu'il a des cernes, son teint est terne et ses joues sont creusées par la fatigue. La culpabilité me ronge en me rendant compte que que son état résulte en grande partie de mon départ et mon refus de lui adresser la parole.

" Diego je suis désolée. J'entame la discussion et il me fixe durement. J'ai pris peur et je n'aurais pas dû disparaître comme ça. J'ai conscience de t'avoir fait du mal mais j'avais besoin de m'éloigner de tout ce bordel surtout après la catastrophe du mariage. Je me confonds en excuse, n'arrivant même pas à le regarder en face.
- Je te pardonne Avalone mais ça m'a fait énormément de mal, ton départ a été dure à gérer. Dit-il finalement et je souris.
- Je suis vraiment désolée, je ne voulais pas te faire souffrir. Dis-je et il attrape ma main.
- Je te veux dans ma vie, toi et ce bébé. Je ne veux pas être ton ami et putain malgré les mois à avoir envie de te haïr, je t'aime toujours. Dit-il et je souris de plus belle.
- Je t'aime aussi Diego, un peu plus chaque jour à un point que je ne savais pas qu'il était possible d'aimer quelqu'un à ce point un jour. Je lui déclare et enfin il me sourit. Mais après ce que j'ai fait, j'aimerai qu'on reprenne en douceur, histoire que tu sois vraiment certain que c'est ce que tu veux.
- Je ne changerai pas d'avis mais je suis d'accord avec la démarche. D'autant plus qu'il n'y a pas qu'à moi que tu dois des excuses ou des explications. Il ajoute et je grogne. Et sinon, comment va bébé? "

   Il change de sujet et après plusieurs heures à parler de tout et rien, comme ci on ne s'était jamais quitté, il m'invite à déjeuner. Je ne pense pas mettre les pieds au lycée aujourd'hui, cette journée va être assez chargée en émotions.

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