Chapitre 6

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« - Encore une fois, vous ne manquez pas d'air à Nantos, répéta Philippe. »

Il venait d'écouter Eschyle lui expliquer en long et en large sa stratégie "infaillible" pour renverser le pouvoir de son père.

« - Tu veux que je te procure trente mille soldats ? demanda le prince de Zimri.

- Si jamais le peuple se soulève, dit Eschyle, il nous faudra assez d'hommes pour les contrôler et en même temps tenir tête aux soldats qui resteront loyaux à mon père. Je dois avoir l'avantage du nombre.

- Ce que tu demandes n'est pas donné, fit remarquer Philippe. Mes frères vont me bombarder de questions si je rassemble de nulle part une armée pareille.

- Je n'ai jamais dit que ce serait facile. Tu veux ta place au sommet ? Voici ce que ça te coûtera pour l'avoir. »

Philippe ne se laissait pas facilement intimider et ce n'était pas ce soir-là que ça allait commencer.

« - Tu l'auras ton armée, dit-il avec assurance. »

Fier de l'accord qu'il venait d'obtenir, Eschyle acquiesça de la tête et se tourna pour retourner au gala. C'était sans compter sur Philippe qui le retint en enroulant ses doigts autour de son avant-bras.

« - Pas si vite, j'ai quoi comme assurance que tu tiendras ta part du marché ?

- Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda Eschyle.

- Je te donne mes hommes pour ta révolution, tu prends le trône de ton père, qu'est-ce qui t'empêche d'aller plutôt épouser un premier-né de je ne sais quel autre royaume plus prestigieux ?

- J'ai promis de t'épouser toi et c'est ce que je ferai. »

La sincérité transparaissait dans les mots du jeune prince, Philippe le croyait. Il ne s'expliquait même pas pourquoi mais son instinct le poussait à risquer sa propre vie pour aider l'autre jeune homme. C'est donc plus pour plaisanter qu'autre chose qu'il dit :

« - Je préfèrerais avoir une garantie plus tangible. »

Philippe n'était pas sûr si Eschyle se prêtait tout simplement au jeu ou s'il était sérieux mais le roux colla son corps au sien et leva la tête pour le regarder dans les yeux.

« - Quel genre de garantie ? murmura-t-il. »

Le regard de Philippe tomba sur les lèvres roses du prince de Nantos.

« - Ce genre de garantie, répondit Philippe. »

Et il l'embrassa fougueusement. Ses mains autour du cou d'Eschyle donnaient l'illusion qu'il voulait l'étrangler mais il se contentait de diriger délicatement le visage du prince où il le voulait. Et Eschyle le laissait faire, comme une poupée de chiffon à la merci du grand ténébreux. Leurs langues ne tardèrent pas à se rencontrer dans une danse qu'elles semblaient connaitre par cœur. Leurs corps toujours collés, se frottaient l'un contre l'autre créant une délicieuse friction qui fit monter le désir déjà brûlant de leur baiser.

Réalisant qu'ils n'iraient pas bien loin coincés dans l'ombre du jardin, Eschyle entraîna Philippe dans les couloirs du château. Aussi discrètement qu'ils purent, ils rasèrent les murs et évitèrent les regards des serviteurs du palais jusqu'à la chambre du prince. Dans de longs baisers entrecoupés de rires, les deux jeunes hommes se dévêtirent l'un l'autre. Quand plus aucun obstacle n'empêchait la chaleur du corps en face lui parvenir, Philippe les allongea sur le grand lit qui ornait la pièce. Eschyle était sous lui, ses yeux d'abord chargés de désir désormais remplis d'appréhension. Son regard parcourait le plafond sans jamais se poser sur le visage de l'homme en face de lui. Philippe comprit. Il posa doucement sa paume sur la joue d'Eschyle et le contraint silencieusement à le regarder dans les yeux.

« - C'est ta première fois ? demanda-t-il. »

Eschyle hocha simplement la tête.

« - On n'est pas obligé de le faire, le rassura Philippe.

- Non, je veux qu'on le fasse, insista le roux. »

Philippe n'était pas le seul dont l'instinct le poussait à agir de façon surprenante. Eschyle lui avait dit tout son plan au sujet de sa famille sans même battre des cils parce que pour une quelconque raison, il lui faisait absolument confiance. Et là, c'était encore le cas. Il aurait bien son premier rapport tôt ou tard, autant l'avoir avec Philippe. Le prince Zimrien était un parfait adonis et en plus, il se sentait en sécurité près de lui. La situation était aussi idéale qu'elle puisse l'être.

Ils s'attelèrent donc à la tâche. Après de longs préliminaires, Philippe fit lentement et sensuellement l'amour à Eschyle. Le roux lâchait de petits soupirs d'aise qui rassuraient Philippe qu'il s'y prenait comme il fallait. Au bout d'un moment, ce fut Eschyle même qui accéléra le rythme de leur ébat. Il ondulait délicieusement ses hanches, transportant Philippe et lui-même aux portes du plaisir. Ils ne tardèrent pas à jouir, Eschyle entre leurs corps et Philippe tout au fond de lui.

Ni l'un ni l'autre n'était pressé de retourner au gala. Ils se prélassèrent dans les bras l'un de l'autre, entre caresses intimes et gémissements. Mais s'ils ne comptaient plus aller au gala, c'est le gala qui vint à eux. Ils étaient doucement en train de s'endormir quand un cri strident leur parvint. Ils se redressèrent soudainement, assis sur le matelas et se regardèrent, la même question sur leur visage :

« - Tu as entendu la même chose que moi ? »

Ils n'eurent pas besoin de répondre parce que la confirmation arriva sous la forme d'autres cris, chacun plus fort que le précédent. Quelque chose de grave se passait là dehors. Ils remirent précipitamment leurs vêtements et ouvrirent doucement la porte. Deux gardes étaient postés devant.

« - Qu'est-ce qu'il y a ? leur demanda Eschyle.

- Apparemment un incident au gala votre Altesse, répondit celui à sa gauche. »

Eschyle tenta de sortir mais le garde l'en empêcha.

« - Il serait préférable que vous restiez à l'abri ici votre Altesse.

- Non, protesta le prince. Je dois savoir ce qui se passe. Emmenez-moi. »

Leur prince ne comptait pas rester sur place. Au moins s'ils l'accompagnaient, ils pourraient le protéger d'éventuels dangers. Ils les guidèrent donc, lui et son invité, vers l'aile du château où se déroulait le gala. Dans la salle de bal, on n'aurait pas dit qu'il se passait grand-chose. Les invités étaient là, mais personne ne dansait. Au fond de la salle, ils remarquèrent un attroupement. Plusieurs personnes étaient campées devant la porte qui menait à une salle privée où le roi et la reine pouvaient se retirer en cas de fatigue. Au moins cinq gardes bloquaient l'entrée. Philippe comprit que lui, ne réussirait pas à passer. Il serra la main d'Eschyle et celui-ci, qui était plus devant, se tourna pour le regarder. Ils ne s'étaient pas rendus compte qu'ils s'étaient tenus la main tout le long du chemin. Philippe lâcha prise et lui fit signe d'aller sans lui.

Quand les gardes reconnurent le prince, ils dégagèrent la voie pour lui. Eschyle avait beau s'être attendu au pire, la scène derrière la porte le choqua au plus haut point. Dans une flaque de sang qui était surement le sien, la reine Isis était étalée par terre, le regard éteint et une dague qui transperçait son cou de bout en bout.

Nantos [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant