Le Coeur d'Eden | Tome 2

14 | Pas même un instant

(Je vous conseille de lire ce chapitre avec la musique Perfect - Ed Sheeran 🤧)

Crystal

— Je m'en veux tellement de ne pas me rappeler de cette nuit. J'ai l'impression qu'en l'ayant oubliée, j'ai également abandonné l'enfant que tu étais et que tu es désormais seul à affronter cette horreur.

J'ai serré fort sa main qui était dans la mienne, alors que nous étions assis sur son lit, nos regards embués liés comme nous en avions l'habitude.

— Mais je te promets Eden, que tu ne seras plus jamais seul. Pas même un instant.

Une fois l'adrénaline redescendue, j'avais ressentis un vertige dû à la faim, au manque de sommeil et au stress intense. Eden nous avait alors ramené chez lui, maintenant que la Reine se fichait de savoir où nous nous trouvions, car tout ce qui l'intéressait, c'était de voir soit mon cadavre soit celui d'Eden dans les jours qui suivaient.

Non seulement elle était cruelle, mais elle était en plus sadique et s'amusait à jouer avec ses proies.

Eden m'avait ensuite portée à son lit, où je me suis apparemment endormie. Lorsque je me suis réveillée en sursaut, il m'observait paisiblement. Puis alors que nous étions enfin seuls et loin de tout danger, je lui avais demandé de me raconter les souvenirs de cette nuit que j'avais perdu.

— Pas même un instant ? répéta-t-il.

— Pas même un instant.

Avec un faible sourire, il essuya la larme qui menaçait de couler du coin de mon œil. Je m'en voulais d'avoir oublié cette nuit d'horreur. Je m'en voulais d'avoir oublié le sacrifice de ma mère et l'enlèvement d'Eden. Aucun de nous deux ne savait ce qu'il m'était arrivé par la suite pour que j'en arrive à oublier mon passé. Si ce n'était pas arrivé, j'aurais peut-être pu sauver Eden plus tôt.

— Tu devrais faire attention aux promesses que tu me fais. Je suis du genre à tout prendre au pied de la lettre, me taquina-t-il.

— Eh bien, tu peux, car je ne compte vraiment plus te lâcher.

Et j'étais sincère. Peu importe si cela durerait quelques jours ou jusqu'à l'éternité, je ne comptais pas le laisser seul un jour de plus. Peut-être majoritairement à cause de la culpabilité que je ressentais, mais également à cause des papillons que je ressentais tandis il caressait tendrement ma main dans la sienne.

J'avais remarqué qu'à chaque fois que sa main était en contact avec ma peau, il ne pouvait s'empêcher de la caresser. J'étais sûre qu'il était capable de le faire pendant des heures, sans relâche. Et cela le rendait particulièrement adorable et attirant à la fois.

Nous n'en avions pas encore parlé, nous n'en avions pas besoin non plus, car je savais que ni Eden ne comptait me tuer, ni moi je comptais le laisser mourir à cause du poison. Je me sentais attristée par l'histoire d'Eden, par notre histoire, mais la rage que j'avais ressentie dans la salle du trône était l'émotion qui dominait. J'enrageais quant au fait que la Reine avait utilisé cet homme, pourtant si pur et innocent, comme s'il n'était qu'un vilain jouet.

Je savais qu'Eden n'avait pas même pensé un instant à me tuer pour survivre, je savais qu'il se laisserait mourir. Or, je refusais. Mais je ne comptais pas non plus pleurer et le supplier de me tuer à sa place, chose qu'il ne ferait pas de toute manière.

J'allais utiliser ma rage pour montrer à la Reine que nous n'étions pas ses jouets et qu'elle ne pouvait pas décider de notre mort aussi facilement. J'allais montrer à la Reine la haine que je lui portais à cause de ce qu'elle avait fait subir à Eden. Et puis si, malgré tout, je n'avais d'autre choix que de mourir pour sauver Eden, alors je mourrais, mais en entraînant cette pourriture avec moi dans la mort.