La boîte à fantasmes

Chapitre 6 : Carole

Il est des matins où l'on se réveille et où l'on sent dès le début que la journée ne se passera pas comme prévue. Ce samedi-là, c'est clairement le cas. J'ai eu une semaine compliquée au boulot, je ne suis pas de très bonne humeur et en plus, la météo n'est pas au beau fixe.

Et le rendez-vous du soir ne me met pas d'emblée en joie. Je me demande comment sera la dynamique de la soirée avec Marc qui reçoit deux femmes chez lui et qui va s'éclipser ensuite pour que l'on puisse, en théorie, s'envoyer en l'air. Je trouve le scenario bizarre et je n'arrive pas à me projeter, moi qui suis si cérébrale.

Il y a aussi des doutes plus profonds : comment vais-je réagir face à une femme, même si c'est un fantasme de longue date. Je ne sais pas du tout si je vais assurer, tant cela semble nouveau pour moi. Le fait de me retrouver entre les cuisses de quelqu'un et faire un cunnilingus plutôt qu'une fellation, est-ce que je saurai réellement m'y prendre ?

La journée se passe néanmoins normalement, comme un samedi. Lessive, courses, ménage, le train-train quotidien dans tout ce qu'il a de plus rassurant. Plus l'heure avance, plus il est évident que je n'annulerai pas le rendez-vous : ce n'est pas mon genre de rebrousser chemin, ce d'autant que je sais que je resterai totalement libre de mes choix le moment venu.

Marc est d'ailleurs très rassurant à ce sujet, à chaque fois que l'on aborde quelque chose de nouveau. C'est agréable d'avoir comme mentor un homme aussi attentif à mes envies. Et ce soir, sincèrement, je ne suis pas du tout sûre d'aller plus loin qu'un apéro. J'ai presque envie que cela se transforme en plan à trois, mais je n'ai pas l'impression que cela soit dans les projets de Marc.

Un peu avant 17 heures, je me mets en route. Je n'ai pas envie d'arriver en retard et surtout, je préfèrerais arriver avant Carole. Je me suis habillée tout à fait normalement, rien de fou cette fois. Dessous sexy, mais bien cachés par un jeans et un élégant T-shirt. Maquillage très discret : je ne suis clairement pas dans la provoc, même pas dans la séduction. La magie, si elle doit se passer, opérera différemment.

J'arrive un peu en avance et lorsque Marc m'ouvre la porte, je suis ravie de constater que Carole n'est pas encore là. J'enlace Marc qui me rend ce câlin qui sera le seul de la soirée avec lui. Je sens dès le départ que Marc ne veut rien faire d'autre que jouer les entremetteurs. Il a d'ailleurs soigné la table : l'apéro est magnifique, entre les plats de viande froide, les fromages et les desserts, on se croirait dans une réception d'un hôtel quatre étoiles. Il me suggère différents alcools et je décide de faire light en prenant un verre de vin blanc local : un bon chasselas de Lavaux.

Un petit quart d'heure après moi, Carole sonne à la porte. Elle est comme sur les photos : souriante, naturelle, habillée un peu du même style que moi. On se fait la bise et j'ai presque l'impression qu'elle est aussi gênée que moi par la situation. Cela me rassure quelque peu. J'avais peur que, forte de son expérience avec les femmes, elle arrive totalement rassurée et soit très entreprenante.

On trinque et on discute de choses et d'autres. C'est un apéro très classique et je peine à percevoir comment les choses vont se décanter, surtout qu'on est toutes les deux raisonnables sur l'alcool. On rigole beaucoup, presque comme deux copines et Marc, tout en étant légèrement en retrait dans les discussions, ne semble pas prêt à partir. Lorsque j'essaie d'observer Carole, j'ai toujours peur qu'elle croie que je veuille la déshabiller du regard et je m'abstiens donc. Mais je dois bien avouer que Marc a bien choisi : elle est vraiment mignonne et je pense que je pourrais avoir envie d'elle. Il manque toutefois l'étincelle qui embrasera la soirée et je ne vois pas trop ce qui pourrait la déclencher.

Ce n'est que plus tard que celle-ci se produit. Marc s'absente pour aller aux toilettes et Carole en profite pour me poser une question aussi surprenante que déstabilisante :