Le mariage

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" Ma très chère soeur,
Le jour où tu liras cette lettre, tu seras probablement déjà devenue Mme.Mollet.
J'espère que tu as réussi à trouver un moyen d'occuper tes journées. J'espère que tu n'as pas changé, que tu es toujours aussi gourmande et désobéissante. J'espère que tu continues de lire, de rire, de courir dans tous les sens et de peindre. J'espère aussi que l'homme avec qui tu es mariée te traite bien.
Si tu savais comme le château est bien vide à présent sans toi. Passer mes journées avec maman est d'un ennui mortel. Comme à son habitude, elle est toujours aussi désagréable.
Comme tu me l'as demandé dans ta dernière lettre, je m'en vais maintenant te raconter ce qui se passe à Celles.
Mme Leroux a mis au monde une jolie petite fille, qui à l'honneur de porter ton prénom. Nous avons commencé à cueillir les lavandes du champ pour en faire des parfums. Les enfants du village, par faute de ne pas avoir pu trouver un aussi bon professeur que toi, peignent de leur plein gré en s'inspirant de tes œuvres. Enfin, la vitrine de la librairie a été nettoyée, on pourrait presque s'y refléter ! Mais l'intérieure laisse encore à désirer...
Concernant mon état de santé, je te demanderai d'arrêter de t'inquiéter en permanence. Tu seras surprise d'apprendre que les médecins trouvent que ma condition s'améliore de jour en jour. Qui sait, je pourrais peut-être remarcher un jour ?
En attendant, je te prie de ne pas mettre autant de temps avant de venir me voir !
Mme et M Leroux, le libraire, et les enfants te saluent.
Tu me manques de tout mon cœur.
Je t'aime.
Francesco "

Amandine relit la lettre jusqu'à en mémoriser chaque mot. Celles lui manquait chaque jour un peu plus.
Elle pleurait.
Elle pleurait à cause de la lettre de son frère.
Elle pleurait aussi parce que Annette tentait, tant bien que mal, de démêler un nœud logé dans ses cheveux bouclés.

- Tu me fais mal Annette !
- Excuse-moi vraiment, mais je n'ai jamais eu à faire à des cheveux aussi durs à coiffer... un peu de patience j'y suis presque... tu veux quand même être jolie le jour de ton mariage, pas vrai ?

Non, Amandine s'en fichait éperdument. Qu'elle soit bien coiffée, bien habillée, bien maquillée, tout cela n'avait absolument aucune importance pour elle. Pour qui se faisait-elle belle ? Pour M.Mollet ? Certainement pas, elle ne l'avait pas vu depuis vingt-neuf jours. Il n'avait manifesté aucun signe de vie depuis qu'il avait placé cette bague au creux de sa main. Peut-être était-ce mieux ainsi. Elle avait peur d'apprendre à le connaître. Elle avait un mauvais pressentiment concernant cet homme, sans pouvoir se l'expliquer.

Quoi qu'il en soit, elle le reverrait aujourd'hui. Dans quelques minutes plus précisément.
Elle se rendra à la chapelle, où tous deux devront prononcer leurs vœux de mariage. Puis, il y aura une grande cérémonie, un gigantesque banquet, suivi d'un bal. Enfin, ils devront...

Amandine ne voulait pas y penser. Elle ne voulait pas l'envisager. C'était trop tôt. Elle n'était définitivement pas prête. Elle était tellement angoissée, qu'elle gigotait partout sur sa chaise.

- Amandine, voudrais-tu avoir l'amabilité d'arrêter de t'agiter ! Je n'arrive pas à finaliser ta mise en beauté, s'agaça Annette.
- J'ai peur.
- Je sais.
- Je suis terrorisée.
- Je sais.
- Et si ça se passe mal ?
- Tout se passera pour le mieux.
- Et si je fais mauvaise impression ?
- Tu seras parfaite. La preuve, regarde toi !

Amandine se retourna et fît face à l'immense miroir devant elle. La personne qui se tenait là devant elle, lui parut étrangère.

Amandine avait les cheveux parfaitement démêlés et coiffés. Ses boucles rousses n'avaient jamais été aussi bien dressées. Elles tombaient jusqu'au bas de son dos comme une légère cascade. Elles étaient ornés, ici et là, de fleurs sauvages. Le soleil de fin d'été les rendait encore plus rouges.
Son visage brillait grâce aux paillettes collées sur ses joues. Ses paupières et ses lèvres étaient peintes en rose. Son cou était décoré par une superposition de colliers en or.
Le saphir, placé sur son annulaire gauche, reflétait de petits ronds verts sur le sol.
Le plus impressionnant restait sa robe d'un blanc éclatant, ressérée au niveau de sa taille, par un ceinture de diaments, et qui s'élargissait ensuite sur le reste de son corps. Les manches en soie, étaient très larges à l'emmanchure et se rétrécissaient vers le poignet.
Le tout brillait intensément, tout comme les étoiles l'auraient fait dans la nuit noire.
Amandine n'avait jamais été aussi bien apprêtée.

La Première Dame Où les histoires vivent. Découvrez maintenant