L'anniversaire

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Est-ce une coïncidence ou un signe du destin que Aris Mollet et Amandine Mollet (Aubry) soient nés à un jour d'écart ?
Lui était né le réveillon de Noël, et elle le jour de Noël.
Il allait avoir trente-deux ans, tandis qu'elle en aurait vingt-deux.

Il faisait excessivement froid ce vingt-quatre décembre. Les flocons de neige tombaient par milliers et le jardin entier était enseveli sous un manteau blanc étincellant. Les branches des arbres étaient toutes gelées. Un vent glacial hurlait dehors. Pensive, Amandine regardait la beauté de la nature hivernale, lorsque Annette entra dans la pièce, sans un bruit cette fois-ci.

Elle tenait dans ses mains un petit colis complètement trempé par la neige fondue, qu'elle tendit à Amandine.
Lorsqu'elle en ouvrit le contenu, elle se mit à pleurer.
C'était un cadeau du village.

Tout d'abord, les Leroux lui avaient envoyés une petite photo, en noir et blanc, de leur peite fille prénomée Amandine. Elle n'était encore qu'un bébé, mais Amandine la trouva magnifique. Ils avaient également ajouté une boîte de biscuits secs, qu'elle allait s'empresser d'engloutir.

Puis, il y avait des tonnes de dessins, de peintures et de sculptures miniatures. Les enfants du village n'avaient jamais été aussi productifs pensa t-elle. La plupart d'entre eux la représentaient, mais d'autres montraient aussi les plus beaux paysages de Celles. Elle les accrochera tous dans sa chambre.

Elle pleura encore plus fort lorsqu'elle vit que le libraire lui avait offert une dizaine de contes. C'était ses préférés. Cet homme qui n'entendait pas et qui ne parlait pas lui manquait énormément. Maintenant, il  était certain qu'elle passera ses nuits blanches à lire.
Le colis sentait la lavande séchée, et pour cause elle trouva quelques petits emballages qui en étaient remplis. Cela raviva le souvenir de ces étendues violettes à son esprit.

Enfin, ses pleurs silencieux se transformèrent en gémissements quand elle vit son matériel de peinture, qu'elle n'avait pas pû apporter.
Cela ne pouvait être que l'œuvre de Francesco. Il avait par ailleurs joint une lettre avec tous ses cadeaux. En plus de lui témoigner son amour, il avait regroupé presque l'entièreté du village afin qu'ils lui adressent un petit mot.

Amandine était tellement émue qu'il lui fallut un moment pour reprendre ses esprits. Tout ce qu'il y avait dans ce colis représentait pour elle une valeur sentimentale inestimable.
Elle se sentit quelque peu coupable, car elle ne leur offrait jamais rien, et elle n'était pas encore partie leur rendre visite. Elle se jura cependant que lorsqu'elle aura des vacances, ainsi que sa première paye, elle ira droit vers Celles.

Elle avait peur demander à son mari de l'argent, au risque de le contrarier. Elle n'avait plus envie de revivre ce qui lui était arrivé, alors mieux valait se faire discrète. Quoiqu'il en soit, si elle paye le voyage avec son argent, M.Mollet ne pourra rien lui reprocher. Mais elle ne sera payée que dans quelques mois, donc il faudra attendre l'été.
Mais tout vient à point à qui sait attendre, n'est-ce pas ?

M.Mollet avait organisé une grande fête pour célébrer sa prise d'âge, et clairement pas pour celle d'Amandine. Il ne savait même pas qu'elle était née juste après lui. Mais cela ne la dérangeait pas, elle était persuadée d'avoir eu des présents infiniment meilleurs que lui.

Il avait convié toute la bonne société, tels que ses ministres, ses associés, des proches du roi, des hommes d'affaires, de hauts fonctionnaires, et toutes les femmes les plus désirées du royaume.
Parfois, Amandine se demandait si son mari faisait preuve d'infidélité envers elle, mais la réalité était que cela ne l'atteignerait pas. Elle ne ressentait rien pour cet homme mystérieux, sauf de l'inquiétude et de la peur, parfois.

L'ironie de la situation étant que, alors qu'elle ne l'avait pas revu depuis l'épisode de la gifle, il lui avait demandé de s'apprêter spécialement pour l'occasion et d'accueillir les invités au pas de la porte comme il se doit.
Cela juste pour donner l'image d'un couple uni. Amandine trouva cette idée risible. D'autant plus que, pour une raison qui lui échappait totalement, il avait voulu que leur tenues soient assorties.

La Première Dame Où les histoires vivent. Découvrez maintenant