La fille de l'hôpital psychiatrique

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Je vais remonter le temps.

Mon fiancé Nicolas, vient de m'expliquer que si je ne vais pas le chercher dans hôpital psychiatrique du siècle dernier, il n'en sortira jamais.

Paradoxe me direz-vous, vu qu'il est en face de moi ? Ce sont les méandres du temps. Si je ne vais pas le chercher il ne reviendra pas.

J'étais au courant, que lui et son frère jumeau Hugo travaillait à diverses expérimentations. Mais je n'avais jamais été impliquée.
Hugo s'est retrouvé coincé dans cet hôpital et Nicolas a pris sa place pour qu'il puisse s'enfuir. Maintenant c'est à moi le libérer.

Engoncée dans mon costume de 'représentante tirée à quatre épingles d'une famille riche et respectable', je devais aller chercher Nicolas, notre 'malheureux cousin traumatisé de la guerre et n'ayant besoin de rien d'autre que des bons soins et de l'amour de ses proches'.
J'étais debout et j'attendais, que mon fiancé m'envoie une centaine d'années avant, ailleurs.

- Prête ?? me cria-t-il, couvrant le bruit de ses machines ?

- Prê... commençais-je à répondre. Mais devant moi se découpaient et se mêlait dans ma vision des images de maintenant, des images d'antan. Des bulles comme un patchwork trop 'Frankensteineque'.

Je trébuchais et me redressait... dans une rue grise, terne. De vieux lampadaires, aucun signe de modernité. Des murs crasseux aux vieilles affiches dont les coins se décollaient.

Troublée, mon corps se mis en marche automatiquement. Un sans-abri doté d'une longue barbe blanche me dévisageait et mon anxiété sociale repris le dessus : quoiqu'il arrive je devais me fondre dans la masse.

Nicolas avait bien calculé son coup : quelques mètres devant moi se trouvait une plaque m'indiquant que l'entrée de l'institut était ici.
Selon lui, le lui de cette époque serait déjà au courant de ma venue. Et le lui paradoxal du futur saurait quand et comment nous faire repartir ensemble.

Je montais les marches du perron, posait la main sur la poignée de la porte, inspirait un grand coup et ... abaissait la clenche.
C'est toujours le type d'endroit où l'on sait quand on rentre, mais pas si on va en sortir, pensais-je.

Un petit hall beige et gris, sombre. Un comptoir avec une nurse à moitié dans ses papiers et à moitié déjà en train de me dévisager.
Prenons l'initiative. Je gonfle ma poitrine, redresse le menton et :

- Bonjour. Je viens chercher mon cousin. Mon arrivée est prévue.

- Nous allons voir ça. Vérifions les papiers d'abord. dit-elle en ouvrant un épais ouvrage.

                                                                 *

Quand tout fut en ordre, elle m'envoya auprès de l'infirmière en chef. Celle-ci me dit juste d'attendre, le temps qu'il prépare mon cousin et ses effets pour la sortie. Une calèche nous attendrait devant la porte. Elle me dit que je pouvais me balader dans les couloirs si je le souhaitais.

Les couloirs n'étaient que des déclinaisons du hall, étroits et en longueur. La vaine tentative de peindre en beige chaleureux était désarçonnée par les fenêtres obstruées. sous des airs calmes, on ne ressentait ici que la folie et la peur sous-jacente.
Je n'avais pas compris dans sa suggestion, ce qu'il y avait à voir dans les couloirs. Mais maintenant tout était clair. Les chambres étaient rares et la plupart des patients résidaient à même les couloirs, entassés les un sur les autres; certains sur des lits, d'autres sur des chaises ou à même le sol.

Je ne m'attarderais pas sur la description de ces personnes, car je les survolais. Je ne saurais vous rendre compte avec exactitude l'horreur réunie sur quelques mètres de parquet, et ce que j'y ai vu.
Mon état mental en aurait été trop ébréché, je faisais en sorte de me convaincre que je ne reviendrais jamais ici, que je ne risquais rien.

My Contemplative Pure GazeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant