Préquel - Chapitre 10 - Choisir sa famille

16 3 2
                                    

Chapitre 10

Mai 2017
San Diego
Heimana - 17 ans

Six ans.

Bientôt six ans que Maia était ici. Six ans qu'elle avait été oubliée.

Maia allait avoir dix-huit ans le mois prochain et n'était plus une enfant. C'en était fini des espoirs illusoires.

Armée de sa tenue de cérémonie, Maia tentait de circuler à travers tous les nouveaux diplômés jusqu'à tomber sur Aaron qui la prit dans ses bras dès qu'il l'aperçu, la soulevant dans les airs.

- Bravo, sœurette ! Cria-t-il en la faisant tourner, t'es enfin une grande.

- Lâche-moi avant de me casser des côtes, fit Maia après avoir éclaté de rire.

Aaron la relâcha et attrapa Cami qui venait enfin de les trouver, accompagnée de Sophia. La mère de famille avait les yeux rougis d'émotions et serra Maia dans ses bras.

- Je suis tellement fière de toi, ma chérie, déclara Sophia, la voix encore tremblante.

- Merci, Sophia.

Ils étaient en plein milieu d'une foule qui hurlait de joie, se sautait dans les bas ou tentait de se faufiler pour atteindre des proches. Cami et Aaron se dirigèrent vers April qui leur faisait de grands mouvements de bras pour se faire repérer. Sophia, qui l'avait relâchée, la prit une nouvelle fois dans ses bras.

- Je suis tellement contente.

- Attention, tu vas te remettre à pleurer, se moqua Maia qui accepta volontiers l'étreinte.

- Ce n'est pas gentil de se moquer, jeune fille.

Bras-dessus, bras-dessous, elles retrouvèrent les autres et Maia n'échappa pas aux embrassades d'April.

- Le pique-nique à la plage convient toujours à tout le monde ? Demanda Aaron.

- Évidemment que oui, ventre sur pattes, répondit Cami. Tu as bien amené les planches ?

- Tu me prends pour qui ? Je ne serais pas un véritable surfeur si je n'en avais pas toujours dans ma voiture.

Cami et Maia échangèrent un regard avant de rouler des yeux avec une synchronisation parfaite. Il leur fit un doigt d'honneur en réponse et Sophia lui fit une tape à l'arrière de la tête.

- Vous voulez passer à la maison pour vous changer avant d'y aller ? Demanda April.

- Non, nos affaires sont déjà dans notre voiture, fit Maia.

La veille de leur entrée en dernière année de lycée, Cami et Maia avaient eu une voiture en cadeau. Elles se la partageaient sans problème et n'avaient jamais autant hurlé de joie. Fini les vannes d'Aaron disant que c'était le grand. Elles pouvaient enfin se déplacer comme elles le souhaitaient. Maia aimait terriblement la vie simple qu'ils menaient. Pas d'artifice, d'extravagance. Elle avait découvert les fêtes de famille à la plage et c'était l'une des festivités qu'elle chérissait le plus. Les mamans préparaient des sandwichs, salades ou wraps dont Maia raffolait. Sans oublier l'énorme plaid qu'avait tricoté mamie Olivia. Ils le faisaient lors de joyeux événements, la fin de périodes tendues comme des examens ou travail. C'était à chaque fois un moment que l'adolescente gravait dans son cœur à tout jamais.

Arrivés sur le parking de l'école après de longues minutes à passer à travers la foule, chacun monta dans son véhicule.

- Je vais monter avec les mamans, annonça Maia en se tournant vers Cami qui l'observa, surprise. Tu as pris ton jeu de clés ? J'ai besoin de leur parler de quelque chose.

- Oui, je l'ai.

Maia monta à l'arrière de leur voiture et les mamans démarrèrent après s'être mis d'accord d'où se retrouver avec les enfants. Ils n'allaient certainement pas fêter cela au milieu de tout le monde, ils connaissaient de nombreux lieux tranquilles. Une fois sur la route, April conduisait en silence et Sophia finit par se tourner vers Maia.

- Tu voulais nous parler, ma puce ?

Ça y est. C'était maintenant. Maia joua un instant avec son chapeau de cérémonie qu'elle avait dans les mains.

- Je ne souhaite plus attendre que ma famille biologique revienne me chercher, finit-elle par dire. S'ils avaient réellement été une famille, ils auraient fait quelque chose, ils auraient agi autrement. Ils ne m'auraient pas juste abandonné comme ils l'ont fait. Je ne veux plus parler d'eux, plus y penser, plus en souffrir. C'est vous ma famille. Depuis bien longtemps et pour toujours, si... Si vous l'acceptez.

Au vu du sérieux de la conversation, April s'était garée dans une allée et s'était tournée à son tour vers Maia. Sophia échangea un regard avec sa femme et prit la parole :

- Tu es certaine de ton choix ? Car il est déjà très clair que tu fais partie de la famille, Maia. Tu es notre fille, à nos yeux, au même titre qu'Aaron et Cami sont nos enfants.

- Quelle que soit ta décision, reprit April, nous la respecterons. Si telle était ta crainte, nous n'avons pas l'intention de te mettre dehors à ta majorité.

- Je veux juste être en paix...

- Tu as le droit de l'être, confirma Sophia. Tu as le droit de vouloir être heureuse, de l'être même. Si pour cela, tu dois laisser ton passé derrière toi, fais-le. Mais aucune situation n'est irréversible. Ne ferme pas tes portes à ce qui pourrait arriver demain, d'accord ?

Maia baissa les yeux. Elle prit une grande inspiration pour se donner le courage nécessaire de poser la question qui lui brûlait les lèvres depuis un moment.

- Ça veut dire que j'ai maintenant le droit de vous appeler maman ?

Un silence prit place dans la voiture, la faisant relever la tête pour voir le choc sur leurs deux visages.

- Rien ne nous ferait plus plaisir, souffla April.

- D'accord... Maman.

- Je vais encore me mettre à pleurer, déclara Sophia, les yeux embués de larmes.

Maia et April pouffèrent de rire et la brune les entraîna dans une longue étreinte malgré la complexité de l'habitacle.

- On t'aime, ma puce.

- Je vous aime aussi.

C'était fait. Maia avait enfin une famille qui voulait d'elle.

Nous et les vaguesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant