Chapitre 2 : Ce que nous n'entendons pas

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Bas les masques, a supplié le cynique. J'avais depuis longtemps abandonné l'idée de pouvoir être comprise à défaut de - à mon intime avis - pouvoir comprendre au-delà de la façade les autres. Les critiques ne se terminaient pas mais, pourtant, on me reprochait toujours d'y répondre avec les miennes. Alors je finis par ne plus m'exprimer en tant que « moi ».

C'était lors de ma dernière année de collège. Je me souviens de ce jour-là, alors que je venais de rejoindre le club de théâtre - encore florissant de vies mélodramatiques - et décider d'y faire ma propre place comme Fuyu l'avait fait avec le basket.

« Excuse-moi, tu peux me laisser passer ? »

J'avais choisi d'imiter le caractère de Sakura Kouno pour la journée. Une attitude timide et effacée. Mais avec juste assez de gentillesse dans le sourire pour ne pas être carrément inexistante. J'avais relevé mes cheveux en queue de cheval haute et pris un temps monstrueux pour trouver une paire de lunettes adéquates dans la collection de mon père. Je ne voyais quasiment rien.

Je glissais les lunettes un peu plus bas sur mon nez en attendant une réaction du garçon dos à moi. Les rangées de casiers étaient trop proches les unes des autres pour passer avec deux personnes bloquant le chemin. Son ami fut le premier à me regarder et hausser un sourcil, il m'interpella ensuite :

« T'es nouvelle ? »

Les mots moururent sur ma langue et je secouais la tête. Celui qui m'avait ignoré jeta un coup d'œil par-dessus son épaule avant de se décaler un peu sur le côté.

« T'étais pas morte toi ? son ami lui asséna un coup de coude dur. Hm. Désolé. »

Je les dépassais. Mais à peine quelques mètres entamés, quasiment au bout du couloir, que je l'entendis dire à son ami :

« T'es con ou quoi ? C'était la nana du club de théâtre là. Fallait l'ignorer.

- La meuf du théâtre... l'ami inclina la tête, les yeux plissés de confusion. Oh, Ai ? Aki ?

- Aucune idée, elle a toujours joué l'excentrique. Trop chelou. Elle est pas méchante mais carrément gênante. T'as pas vu sa représentation ? Celle d'il y a un mois ? »

Mon estomac palpita à la mention de la représentation. Mon frère m'avait un jour que personne ne pouvait atteindre les bonnes grâces d'une personne sans s'attirer les foudres d'une autre. Donc au lieu de vivre éternellement à la recherche de l'approbation de quelqu'un, autant marquer les esprits, qu'importait que ce soit en bien ou en mal.

Tout va bien. Ça ne me dérange pas.

Bizarre. Chelou. Excentrique. Gênante.

Je suis d'accord d'être appelée comme ça, me répétais-je à nouveau.


•••••

« Nous ne sommes que des Hommes. Et je ne suis qu'une fille. »

•••••



« Vous êtes bêtes. »

Je me rendis compte que, depuis tout à l'heure, j'étais restée sur place. Mais les mots que je venais d'entendre ne venaient pas de moi. Je jetais un coup d'œil timide par-dessus mon épaule et croisais les yeux marrons d'une adolescente.

Une petite blonde aux manches trop longues se tenait à coté d'elle. Elle avait toujours l'habitude de mettre ses manches au niveau de son nez pour couvrir sa bouche, mais cela ne diminuait pas la colère sur son visage. A côté d'elle, une grande fille aux cheveux bruns toisait d'un regard mauvais les deux garçons. Elle ajouta :

L'appel du crime || Horimiya ||Où les histoires vivent. Découvrez maintenant