Chapitre 6 : Être nous-mêmes

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Les séances avec le psychologue, monsieur Asanokoji, étaient pour le moins très rapides. Je passais essentiellement mon temps à répondre à des questions ou parler de mes sentiments, et je l'appréciais vraiment ! Certaines de mes connaissances avaient tendance à se rebiffer, voire même parfois rire de la simple idée d'y aller, et reniaient de l'aide professionnelle gratuite.

Très honnêtement, je n'y connaissais rien en justice ; et par extension les conséquences si je refusais d'y aller. Est-ce qu'on m'enfermerait ? Ou bien me forcerait-on à aller voir quelqu'un d'autre, de payant cette fois, et qui obligerait ma famille à débourser des moyens que nous n'avions même pas ? Ainsi, en respectant les ordres du directeur et de tout le beau monde ayant mis son mot dans l'affaire, j'assistais à ces séances sans riposter.

Fuyu surveillait mon historique internet comme un vautour avec sa carcasse, il m'était donc impossible de m'informer sans éveiller ses drapeaux rouges.

« Bonjour, mademoiselle Aoi ! Comment allez-vous aujourd'hui ? »

C'était la première question qu'il me posait à chaque fois. Parfois il était assit près de la fenêtre, un livre entre les mains, et à d'autres moments il s'occupait de sa paperasse en attendant son prochain patient. Il me fit face depuis son bureau, l'air impeccable, bien que je puisse apercevoir de légères poches sous ses yeux.

Je souris et pris place face à lui, un genou balancé sur l'autre. Mes yeux se fixèrent de nouveau sur l'horloge malgré moi, aussi excitée qu'effrayée d'arriver à la fin de la séance. Iura et les autres attendraient-ils réellement mon arrivée ?

« Parfait, Monsieur ! Et vous, comment allez-vous ? »

Ritsu Kobanaru était mon modèle, j'avais réussi à m'en souvenir en chemin. Un garçon d'une autre classe, toujours gai et bienveillant. Je réfléchis un moment, essayant d'anticiper les questions de monsieur Asanokoji, puis le genre de réponse que Ritsu donnerait. Au fond, j'essayais aussi d'ignorer la présence du relevé de notes scolaire positionné sur le coté du bureau.

Plus que quarante minutes.

« Aujourd'hui aurait été une journée parfaite sans cette montagne de paperasse que j'ai dû terminer cette nuit, m'avoua le psychologue en riant. Et vous, comment a été la journée ?

- Oh, les cours, tout ça tout ça. Rien de bien nouveau !

- Vous semblez fixer la pendule avec impatience, avez-vous prévu de faire quelque chose ce soir ? »

Mince, il ne perdait pas de sa perspicacité. Je souris malgré tout et hochais la tête.

« Oui ! Je sors avec des gens aujourd'hui !

- Parlez-vous de vos amis ?

- Certains gars de ma classe et leurs copines, il me semble. »

Ainsi, nous continuâmes à discuter. Nous avions déjà passé en revue ma situation familiale plus que normale et mes agissements au collège. En somme, tout avait déjà été dit. Nos séances n'étaient plus qu'une formalité ; moi j'attendais la fin de mes séances obligatoires jusqu'à ce que le conseil me déclare digne d'être enfin laissée tranquille tandis que Monsieur encaissait joyeusement son chèque de paie à la fin du mois.

Au cours des vingt dernières minutes, monsieur Asanokoji se leva de sa chaise pour se promener dans son bureau. Ses doigts retracèrent les livres de la petite bibliothèque et je sentis des frissons d'inconfort glisser le long de mon échine.

« Mademoiselle Aoi, il y a quelque chose dont je souhaitais parler avec vous.

- Parlez, Monsieur, avant que l'anxiété n'aie raison de moi ! »

L'appel du crime || Horimiya ||Où les histoires vivent. Découvrez maintenant