26 - Bad words

102 14 69
                                    

                   « Hé, toi !, me précipite-je.

Essoufflé, j'arrive à sa hauteur.

— Toi, le vétéran !

Le Major Grön lève ses yeux fatigués vers moi.

— Oh, le fanboy d'Hathanaël. Comment va ?

— Ça roule, mais sûrement moins que toi., désigne-je son fauteuil des yeux.

— Hé, va te faire foutre. Qu'est-ce que tu me veux ?

— Tu m'avais dit que tu étais dans le régiment du Séraphin, pas vrai ? Tu aurais des photographies de cette époque ? Et tu l'as déjà entendu parler de sa famille ?

— Ouais, j'ai des photos. Je ne sais pas s'il est dessus, mais je peux te les vendre si tu veux.

— Ça marche ! Combien tu veux ?

Le Major se frotte le crâne, blasé. Il négocie une belle bouteille de rouge.

— Marché conclu. Viens, je t'emmène. Mais si tu ne me donnes jamais la bouteille, je te fais virer.

Comme si le Séraphin le laisserait me virer. Il ne sait pas à qui il parle.

— Tiens., me tend-il une boîte de sa chambre. C'est tout ce qu'il me reste de cette époque.

— Merci beaucoup, Major.

— Pour ce qui est de sa famille...

Il soupire. La boîte est plus lourde que j'aurais pensé.

— J'ai entendu dire qu'il n'en avait pas. Il vivait chez des gens. Ah, quoique. Son père est en taule, je crois. Je l'ai déjà entendu s'engueuler avec son pote sur ça.

— Oh ! Ils s'engueulaient à quel sujet ?!

— Son père avait demandé à le voir, un type avait apporté un télégramme. Il voulait y aller. Son pote était catégoriquement contre. Il disait qu'il aurait des problèmes, et qu'il avait peur pour lui.

— Et tu sais s'il y est allé ?

— Ouais, il n'y est pas allé.

Oh waw...

Le Séraphin a laissé quelqu'un prendre une décision pour lui...

— Tu connais le nom de son père ?

— Non. Je ne suis pas sa baby-sitter, mec.

— Et tu sais quoi d'autre sur lui ? Tu m'as dit que tu pouvais me donner plein de raisons de le détester. Dis-les-moi toutes.

— Pour commencer, il a buté deux-mille mecs.

— Je le sais, ça. Continue.

— Hé bien... Ce mec détestait tout le monde, pire rabat-joie du régiment. Il tirait toujours la gueule, mais tant que tu ne le faisais pas chier et ne le touchait pas, il ne faisait pas de vagues.

Il n'aimait pas qu'on le touche, hein ?...

— Tu n'as rien d'autre ?

— Jamais connu un type plus égoïste. Il n'en foutait pas une aux corvées, et si tu tombais devant lui il ne te relevait pas. Mais il était tellement flippant, les gars n'osaient pas s'en prendre à lui. Et puis, les rangs étaient moins en tension avant. Avant le Déluge, je veux dire. Les gens étaient moins méfiants.

— Pas surprenant. Autre chose ?

— Je ne sais pas, l'Indien... Si « être un connard et un meurtrier » ne te suffit pas à détester quelqu'un, revois ta morale... J'y réfléchirai et je te tiendrai au courant.

Ropes and InkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant