𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟖

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Andres

Une lueur de confusion glissa dans ses orbes bruns, certes rapide, mais suffisant pour que je puisse entrevoir cette Alma que je connaissais lors de notre enfance. Celle qui n'avait peur de rien malgré ses airs de petites filles gâtées. Un rictus se dessina sur mon visage, la voyant reprendre doucement contenance.

– Andres, si tu te moques de moi, ce n'est pas drôle.

Doucement, elle repoussa mes mains ainsi que le couteau. Son corps se raidit alors qu'elle détournait son regard. Elle voulut s'échapper de la situation, mais je la gardai fermement en place avec un bras autour de sa taille. Même à travers ces couches de vêtements, je pouvais ressentir la chaleur de son corps. Cette douce chaleur qui me procurait un repos que même le sommeil ne pouvait pas me procurer. Sans trop réfléchir, je fis glisser mon nez le long de son cou, humant son parfum enivrant. Quelques heures à peine, et je ne pouvais déjà plus me passer de son parfum.

Je ne pouvais déjà plus me passer d'elle.

Ce besoin grandissant prenait de plus en plus de place, et je n'arrivais plus à le cacher. Depuis le jour où j'eus l'opportunité de reposer mes yeux sur elle, je ne pouvais plus penser correctement.

Sans m'en rendre compte, mon cœur la désirait plus que tout. Maintenant que je la tenais là, dans mes bras, il était impossible pour moi de la lâcher.

De la laisser fuir à nouveau.

Alma resta un moment immobile, avant de laisser son corps fondre contre le mien. Comme deux pièces d'un puzzle qui se retrouvaient enfin.

Qu'est-ce que c'était plaisant. La voir instantanément changer juste au contact que je lui accordais.

– La journée a dû être stressante pour toi aussi, dit-elle en soufflant légèrement. Mais tu ne peux pas te permettre de dire ce genre de choses, Andres.

– Ce n'est pas la journée qui me pousse à exprimer cela, mi Alma.

D'un mouvement rapide, elle se trouva face à moi. Son visage n'était plus qu'à quelques centimètres du mien. Les rayons de la lune éclairaient son sublime visage pâle encore maquillé. Je dus me forcer à garder mes yeux plantés dans les siens, pour ne pas dériver sur ses lèvres rosées que je rêvais d'embrasser. Quelques mèches de ses cheveux châtains, encadrant son visage, s'écrasaient contre le mien dans une agréable caresse.

Tout ce qui émanait d'elle n'était que douceur, mais elle se forçait à être cette Alma que je haïssais. Celle qui m'empêchait d'accéder à cette facette d'une bonté inouïe. Celle qui me repoussait à la moindre occasion, comme si j'étais la source de son mal être alors que je ne cherche qu'à être son bonheur. Mes pensées dérivèrent jusqu'à ce que sa voix cristalline me parvienne.

– Andres, tu sais que je n'aime pas que tu m'appelles de cette façon. Puis, tes paroles n'ont pas de sens, qu'est-ce qui pourrait te pousser à dire ces âneries ?

Toi, pensai-je en ne lâchant pas son regard inquisiteur.

Après quelques secondes je soupirai, avant de me relever, m'éloignant de cette chaleur qu'elle me procurait. Et le silence nous entourant n'était plus aussi apaisant. Je pouvais sentir son regard me traverser de toutes parts, la frustration commença doucement à me ronger.

– Tu as raison, ça doit être la fatigue. Excuse-moi, mais as-tu une autre solution pour régler ce problème ? Demandai-je, car je suis certain que les hommes de mon père seront demain matin à notre porte.

Alma détourna son regard, mordant l'intérieur de ses joues pour ne pas laisser paraître son anxiété naissante.

Mais comment pouvait-elle penser que je ne le remarquerais pas ?

Elle me tendit sa main, toujours vêtue d'un gant.

– Donne-moi le couteau, et retourne-toi s'il te plaît.

– À deux conditions, dis-je.

– Je t'écoute.

– Que tu me laisses chercher de quoi te soigner, et que tu te changes, avant que tu ne fasses quoi que ce soit.

Alma me regarda un temps, avant de hocher de la tête. Silencieusement, je laissai glisser le couteau dans le creux de sa main, avant de disparaître dans la salle de bain connectée à notre chambre.

Je pris la trousse de soin, tout en vérifiant que tout était bien dedans; désinfectant, bandages, et médicament pour la douleur.

Pendant qu'elle était de dos, j'en profitais pour la détailler. Certes nous étions mariés, mais je ne voulais pas laisser passer ne serait-ce qu'une occasion de la regarder.

Alma était d'une beauté à en couper le souffle. La Lune en était probablement jalouse, car en ces nuits éclairées, elle perdait un admirateur secret.

– Andres ?

Sa question me rappela à l'ordre, me sortant de cette transe enivrante.

– J'arrive, dis-je tout en marchant doucement vers elle. Tiens, je retourne dans la salle de bain et lorsque tu auras fini tu n'auras qu'à dormir.

Elle fronça ses sourcils.

– Mais où vas-tu dormir ?

– Dans la baignoire, crois moi, elle est bien assez grande pour que je sois à l'aise. Rétorquai-je d'une façon moqueuse, avant de prendre un des nombreux coussins sur le lit.

Alma, gênée, détourna le regard. Je pouvais facilement deviner que l'idée de me voir dormir dans une baignoire ne lui plaisait pas, mais je ne voulais pas m'imposer auprès d'elle. Un léger sourire pris place sur mon visage, avant que je ne me dirige vers la porte de la salle de bain.

Nous partageons un dernier regard, puis elle souffla :

– Merci, Andres.

D'un geste brusque, je fermai la porte derrière moi. La solitude m'accueillait, mais un autre sentiment me nouait l'estomac. Chaque pas que je faisais résonnait contre les murs blancs, baignés par la lueur de la lune. Avant de sombrer dans le sommeil, je restai adossé à la porte, veillant à ce qu'Alma s'endorme paisiblement.

Ses gémissements de douleur éveillaient en moi un désir brûlant : courir vers elle et offrir ma chair pour épargner la sienne. Un pincement au cœur m'envahit, m'arrachant un frisson de frustration alors que je visualisais la scène qui résonnait contre les murs de la pièce vide. Le supplice d'être réduit à un simple spectateur.

Elle avait trop enduré; c'était à mon tour de porter son fardeau.

Alma pensait certainement que mes mots n'étaient que des paroles vides de sens, mais est-ce qu'elle se réjouira de voir que dans ce monde rempli de monstre elle était la protégée du pire d'entre eux ?

Je n'avais qu'une hâte, c'était de voir son regard rempli de tranquillité rencontré le mien, une fois que le sang de ces monstres donnerait une nouvelle couleur au sol de cette maison.

Depuis que je connais la vérité, une seule promesse me maintient en vie : la prochaine fois qu'ils franchiront le seuil de cette maison, leurs crimes cesseront définitivement.

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Instagram : maya_nessa_

𝐂𝐎𝐋𝐋𝐀𝐏𝐒𝐈𝐍𝐆Où les histoires vivent. Découvrez maintenant