Il n'y a jamais eu d'endroit où je me sens plus à la maison qu'ici. Même avant, où mes frères et sœurs plus âgés me jugeaient sans arrêt. Même maintenant, où les pensionnaires du Mythic's me critiquent autant que si j'étais une politicienne extrémiste. Même chez grand-maman, où Janis polluait mon air autant qu'une décharge nucléaire.
Ici, c'est mon chez moi, inconnu de tous, ou presque. Ici, je me suis battue pour obtenir ce que je voulais. Ici, je continue encore aujourd'hui à lutter pour les miens. Ici, je risque ma vie tous les jours. Ici, je fixe les règles. Ici, personne n'est au-dessus de moi. Ici, je suis Hexe, Reine des Rois, dirigeante des Songes.
Et même si la Guerre vole la beauté de mon monde, il n'en reste pas moins magnifique. Bientôt, je lui rendrai sa splendeur d'autrefois. Et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour y parvenir. Aucun Roi colérique, aucun frère et aucune princesse gâtée ne pourra m'en empêcher.
Mon Royaume a longtemps été un mystère pour tous, placé au même titre que l'Atlantide, un simple mythe dont même les dieux n'étaient pas certains de son existence. Aujourd'hui, il cache encore une énorme part de mystère, même à moi. Beaucoup pensent que ce n'était qu'un groupe de divinités vivants aux Enfers.
Même s'ils n'ont pas tout à fait tort, il ne s'agit pas que de ça. Il y a certes des immortels ici mais ce n'est qu'une infime partie de la population. Quant à sa localisation, on sait qu'il se trouve à la frontière de la Terre et des Enfers, des vivants et des morts, de la réalité et des rêves, en parfait équilibre entre les deux.
Mes pas résonnent dans la rue pavée, l'air frais me brule le visage, contraste avec la chaleur sur Terre tandis que la fumée des foyers s'échappent et lézardes entre les toits recouverts de tuiles rougeâtres. A travers une fenêtre, une enfant colle son visage à la vitre et me sourit. Elle m'a reconnu, super. Si je voulais être tranquille pour bosser cette semaine, c'est foutu. Les nouvelles vont vite, dans ce royaume.
Tout le monde va savoir que je suis de retour. Je vais avoir le droit à des rendez-vous jusqu'à pas d'heure et j'aurais des remarques de la part des citoyens si j'ai le malheur d'en déléguer un ou deux à Samy. Et dire que je voulais me concentrer sur un problème démographique et peut-être sur une nouvelle stratégie, si j'avais eu le temps.
Au moins, ils m'apprécient. Voyons le bon côté des choses. En même temps, je me doute que je ne peux pas faire pire que l'ancien régime. Ils me voient comme leur héroïne, c'est stupide. Je ne le suis en aucun cas, tout le mérite revient à Samy.
Je me force tout de même à répondre à la fillette et la salue en retour. Ce n'est pas sa faute si j'ai eu une salle journée. Elle, elle n'y est pour rien. La petite ouvre le carreau et me demande si je veux me joindre à eux pour le repas. Je refuse poliment. L'enfant insiste malgré tout, ses parents la rejoignent pour batailler avec elle et je fini par prétexter une entrevue avec la Leucise pour qu'ils me laissent partir.
Je reprends ma route sous la lumière de la Lune, espérant secrètement être interpeller par personne d'autre jusqu'à mon arrivée. J'aime mon peuple et je n'ai pas envie de manquer de respect à qui que ce soit, parce que c'est ce qui arrivera forcément si je viens encore à être dérangée. Même si je doute fortement que quelqu'un se balade à cette heure. Ici, personne n'a l'air d'aimer sortir après le coucher du soleil. Ça doit venir de la fameuse période de la tyrannie venant des occupants.
A quel point mon peuple a souffert ? Je ne le saurais peut-être jamais. Je repousse cette question dans un coin de mon esprit, je m'interrogerai dessus plus tard. Pour l'instant, je n'ai qu'une envie : me coucher et prier pour qu'il n'y ait aucune attaque cette nuit. Je ne suis pas d'humeur à aller sur le champ de bataille ce soir.
VOUS LISEZ
L'As De Songes
Fantasía"Tu n'es pas Hexe. Où est ma fille, bordel ?" Hexe a toujours été une personne difficile. D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, il n'y a toujours eu qu'elle, ses frères et de temps à autre ses grands-parents. Ses proches n'ont jamais réellement compr...