Min Yoongi

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ᚱᚹᚢᛇ

Samedi 3 mai 2025

Il y a presque deux mois, Hoseok m'avait fourré dans un vol pour Los Angelès.

C'était après une de ces fameuses disputes entre Jungkook et moi : il voulait partir en vacances sur Jeju et avait encore monté un plan abracadabrantesque pour le faire incognito. Je n'en pouvais plus de me cacher et de mentir, de faire «fuiter» des photos de moi avec la dernière actrice à la mode pour détourner l'attention. Nous faisions ça depuis bien trop longtemps. Je ne sais pas ce qui me pesait le plus finalement. Était-ce vraiment le fait de mentir au monde et de porter le fardeau qu'était cet autre moi, lisse et sans tache, qui ne me ressemblait pas ? Ou bien était-ce son obstination à ignorer, à faire fi de mes demandes et à fermer les yeux sur son emprise étouffante ? Je ne voulais pas le faire souffrir, mais lui, s'inquiétait-il de moi et de mes sentiments ?

J'avais pété un câble. Mais Jungkook pouvait être surprenant, en colère. Il avait même fini par lever la main sur moi. Lui, la bonhomie et la gentillesse incarnées. Il avait arrêté son geste juste à temps avant de s'enfuir, dévasté par ce mouvement de fureur qu'il n'avait jamais eu envers qui ou quoi que ce soit.

Il y avait donc cette proposition de collaboration avec un monstre de la production et de la chanson à LA. Un type que je considérais plus ou moins comme mon plus sérieux adversaire dans le petit monde des producteurs. Pour me remonter le moral, je me disais que j'étais plus jeune que lui et que j'avais à mon crédit plus de chansons, et dans un pays moins ouvert que la société libérale dans laquelle il évoluait.

Pour être tout à fait honnête, je jalousais aussi sa capacité à rassembler autour de lui des artistes et des producteurs avec lesquels j'aurais aimé travailler. Je me demandais souvent ce qu'on pouvait trouver à ce personnage taciturne. Je refusais de considérer qu'il était au moins aussi talentueux que moi, si ce n'est plus, et qu'il n'avait pas le sale caractère que j'aimais lui attribuer.

Et, aujourd'hui, j'admets qu'il me répugnait de le rencontrer aussi parce que, quelque part, je le trouvais attirant et je doutais que la chose puisse être réciproque.

Bref, le CEO avait insisté tant et plus que Hoseok avait cédé. Pour la boîte qui m'engageait, c'était une aubaine à ne pas louper. De quoi se faire «des couilles en or» en diffusant un message de tolérance vis à vis de la communauté LGBTQIA+ ; Min Yoongi n'avait pas sa langue dans sa poche à ce sujet et s'affichait ostensiblement avec des hommes. Mon agence puait l'hypocrisie ! Il fallait, dans le même temps, que je fasse profil bas concernant ma vie privée et ne rien laisser fuiter au sujet de Jungkook. Ça me débectait !

Hobi m'avait dit, enjoué :

— Allez, Nam ! C'est une chouette opportunité. Tu tournes en rond ici. Quelques semaines pour changer d'air et pondre une tuerie. Et, puis, ce sera l'occasion de souffler, hein ? Tu vois de quoi je veux parler ?

Oui, oui, je voyais bien de QUI il voulait parler.

— Tu veilleras sur lui ? avais-je murmuré pétri de honte. Je lui ai dit que je ne voulais plus jamais le revoir...

— Encore ! s'était-il exclamé, les bras lui tombant de dépit. Évidemment, c'est mon dongsaeng. Je ne vais pas le laisser s'enfermer à double tour dans son appart à boire comme un trou et à chanter toutes les nuits caméra ouverte !

Voilà comment je m'étais envolé vers celui qui titillait mon égo.

Je m'attendais à une rencontre incroyable. Au bord d'une piscine, sur un toit terrasse bondé de créatures plus divines les unes que les autres, deux jumelles blondes derrière les platines, avec Yoongi dans un coin à taper la discute nonchalamment avec Dre ou Blanco, un verre de whisky à la main.

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