Chapitre 1 : l'entraînement

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"Allez, Kate ! Tu peux faire mieux que ça ! Tu es fatiguée ?

Non, pas du tout. Je viens JUSTE de faire une vingtaine de tours de piste, une bonne centaine d'abdos, pareil pour les pompes, et ça fait plus de quatre heures que je m'entraîne au combat – enfin, je ne me plaindrais pas, si je savais ce que j'allais endurer par la suite... Ce serait même la partie facile... Si seulement je me doutais de ce que j'allais vivre dans quelques heures...

— Un petit peu.

— N'oublie pas que tu vas te battre contre des professionnels, demain ! Je ne tolérerai aucune erreur de ta part. Alors, tu vas continuer à t'entraîner ! Je ne veux plus que tu rechignes devant l'effort. Allez !

Pff. Mon père a toujours été comme ça. Il voulait que je me donne à 200% tout le temps. Il a fait de son rêve, qu'il n'a malheureusement pas pu réussir, le mien. Comme si j'avais besoin de savoir me battre... Dans le top 10 des championnes d'arts martiaux, et pareil en toutes catégories confondues. Mon père a fait de moi la meilleure. Mais à quel prix ? Je n'ai ni ami, ni confident. Je suis fille unique, je n'ai donc ni frère, ni sœur à qui parler, et je ne me suis jamais très bien entendue avec mes parents. Pourquoi ? Déjà, on ne se ressemble pas : j'ai de très longs cheveux blonds avec des yeux bleus, alors que mon père a des cheveux marrons, ma mère, roux, ainsi que des yeux respectivement marrons et verts. Ensuite, nous ne partageons pas du tout les mêmes centres d'intérêt, et enfin, on se dispute tout le temps, sans raison valable. J'ai la désagréable impression d'être de trop, dans cette famille...

— Oui ! Allez ! La fifille de papa peut bien réussir quelques enchaînements, me dit Morgana, une petite peste jalouse de mon talent, surtout gagné au prix d'innombrables heures d'entraînement.

— Occupe-toi des tiens, avant de me parler !

— Les filles ! S'il vous plaît, un petit peu de calme ! dit mon père.

Morgana lui répond :

— Oui, monsieur Evergleen", en insistant bien sur son nom de famille – et donc le mien.

L'entraînement reprend puis, quand le soleil s'est déjà couché depuis plusieurs heures, on s'arrête enfin.

Mon père et moi marchons sur le chemin de la maison. C'est un magnifique jardin, avec un petit chemin fait de petites pierres blanches et entouré de fleurs rouges. Un superbe cerisier du Japon est au milieu du jardin, juste à côté d'un grand lac, où l'on va parfois se baigner en été. À l'intérieur, ma mère, Evelyn, nous attend. D'habitude, elle n'est pas forcément là, mais aujourd'hui est un jour spécial : c'est mon anniversaire.

Mes parents sont en train de chanter la chanson traditionnelle quand on sonne à la porte.

Mon père va ouvrir, intrigué. Il est en effet vingt heures passées, et ce n'est pas un horaire très habituel, poli du moins, pour sonner chez les gens.

Au fur et à mesure qu'il se rapproche, j'ai la désagréable impression qu'il se tend. Debout devant la porte, hésitant à l'ouvrir, j'ai le sentiment qu'il est inquiet. Il sort son arme, qu'il porte en permanence sur lui, bien que nous soyons dans un monde civilisé, et plus dans je ne sais quel film datant de l'époque romaine. J'ai toujours eu l'impression qu'il vivait dans un monde parallèle au nôtre, sans prendre conscience que les temps avaient changés. Il s'inquiète beaucoup trop, si vous voulez mon avis...

Le carillon se fait plus insistant, décidant mon père à ouvrir la porte. Dans l'embrasure se dessine alors une dizaine, peut-être même une vingtaine de personnes. Toutes armées, elles se déplacent tout doucement, sans faire aucun bruit. Mon père lève son arme, et commence à parler dans une autre langue. Je ne la comprends pas, bien que je parle couramment plusieurs langues ; le russe, le japonais, le chinois, l'italien, l'allemand, l'anglais, l'espagnol et le norvégien (le dernier est un petit peu moins utile, mais j'en avais besoin pour une compétition qui se déroulait en Norvège).

La jeune prodigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant