Consigne : « Écrire une scène romantique visant à innover et à réinventer un cliché de la romance. »
845 mots
apprenti0auteur*****
Anthony s'attarda une dernière fois sur la page jaunie et tachetée d'aliments séchés du vieux livre de recettes de son grand-père. Après s'être assuré de n'avoir rien oublié, il vida le chocolat fondu dans de petits moules aux formes disparates. Derrière lui, son colocataire le jugeait du regard, trop hébété par ce qu'il préparait pour sa nouvelle copine.
— Quelle idée stupide ! critiqua-t-il, la voix outrée.
L'homme d'affaires releva le nez de son plateau et découvrit son ami, accoudé au comptoir, le menton appuyé entre ses deux paumes. Un air d'incompréhension se dégageait du blond qui s'échinait à le faire changer d'idée depuis le tout début de la matinée.
— Papy en a confectionné pour mamie tous les dimanches matin de leur vie. Clémentine aimera l'idée, j'en suis certain.
— Dis plutôt qu'elle va te trouver ridicule. Et d'ailleurs, nous sommes mardi soir, rien à voir avec tes grands-parents.
— C'est le jour où elle termine à vingt-et-une heures. Je vais la surprendre à son travail, n'est-ce pas romantique ?
— Pas du tout ! Tu n'y penses pas réellement ?
— Une belle surprise, j'en suis convaincu. Aucun de ses précédents petits amis ne la connaissait comme moi. Elle a la dent sucrée, alors pourquoi ne pas lui en offrir ?
Il saupoudra ses confiseries de cacao et de noisettes émiettées puis, il déposa le tout au congélateur pour figer le chocolat.
— Tu te fous de moi ? Anthony, tu vas la perdre si tu oses lui offrir ces trucs.
Confiant, malgré les avertissements répétés d'Olly, le jeune amoureux alla prendre une douche, le temps que les truffes durcissent.
— Amène des fleurs, proposa son complice des dernières années, toujours aussi pessimiste. Ce sera plus original, non ?
— Pas question !
— Offre-lui une bague, un voyage en Tanzanie, un saut en parachute ! Tout sauf ça ! T'as les moyens de lui payer trois fois le tour du monde en yacht et toi tu vas tout gâcher avec ton bricolage. Regarde-les ! Même ta nièce de cinq ans en ferait des plus beaux.
— Si Clémentine est vraiment attirée par moi, et non par mon argent, je le saurai à l'instant où elle en mangera un.
— Mais...
Anthony emballa ses précieux chocolats, abîmés lors du démoulage, et quitta le grand studio devant les yeux ahuris de son meilleur ami.
— Tu fais une grave erreur ! cria-t-il du haut du cinquième étage alors qu'il sortait du rez-de-chaussée de l'immeuble new-yorkais. Tu vas l'insulter et elle te les fera bouffer.
Un rictus amusé apparut au coin de ses lèvres. Pauvre Olly ! Heureusement qu'il était son meilleur ami et non son consultant financier. S'il l'écoutait, ses conseils le mèneraient inévitablement à la ruine. Ce qu'Anthony voulait, c'était admirer la surprise sur le joli visage rond de sa dulcinée. Une boîte de chocolats était exactement ce qu'il lui fallait. Il n'y aurait pas plus surprenant, il en était convaincu.
Il dévala les quelques deux cents mètres qui le séparaient du lieu de travail de Clémentine et entra en laissant la clochette de la porte annoncer son arrivée.
— Je suis à vous dans un instant ! cria la voix si magnifique de sa copine.
L'homme déposa la boîte sur le comptoir et attendit la venue de son amoureuse.
— Anthony ! Quelle belle surprise ! Tu as besoin d'offrir un cadeau ? C'est l'anniversaire de quelqu'un ?
D'un geste assuré, il poussa la boîte jusqu'à elle et sourit de toutes ses dents.
— Pour toi, Clémentine.
La jeune femme s'empourpra et prit le cadeau d'un geste hésitant. Elle essuya ses mains sur son tablier déjà bien garni, tira l'extrémité de la ficelle puis, déchira le papier brun avant d'ouvrir la boîte.
— Des... chocolats ?! s'étonna-t-elle.
— Je me suis dit que tu ne devais jamais en recevoir...
— En effet, rigola-t-elle. C'est la première fois qu'on m'offre un cadeau aussi... inusité.
— Alors, tu ne trouves pas que c'est stupide et ridicule ?
— Oh ! Pour ça, je confirme que c'est une dépense inutile. Mais c'est très drôle, s'esclaffa-t-elle. Quand je vais dire ça à maman !
— J'aime te surprendre. Je les ai faits moi-même, insista-t-il alors qu'elle prenait une pièce en forme de cœur qui s'égrena sous ses doigts.
De ses yeux amusés, elle goûta un second morceau du bout des lèvres. Il n'était pas succulent, ni horrible au goût, simplement correct. Cependant, l'amour qu'il y avait mis était palpable et son cœur comprit qu'il était exactement l'homme qu'il lui fallait. Il avait osé, là où personne avant lui ne s'était aventuré.
Derrière Anthony, le colocataire désespéré apparut sur le trottoir, plus inquiet que jamais. Il frappa de ses mains la fenêtre du commerce et colla son visage contre la vitre pour vérifier que son abruti d'ami ne s'y trouvait pas.
— Que lui arrive-t-il ? s'informa la brunette en le voyant ouvrir la porte en grand et se ruer vers eux.
Olly ne put que constater l'ampleur de la situation. Il se laissa choir sur l'une des chaises du commerce, l'air abattu. Cet idiot d'Anthony avait vraiment offert des chocolats à une chocolatière de mère en fille.
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Rose bleuté (Pink lock)
Short StoryRecueil réalisé dans le cadre du concours/projet Pink Lock. Les dix premiers chapitres contiennent une épreuve avec contrainte de scènes romantiques où l'originalité doit être à l'honneur. Les chapitres suivants sont de ma propre initiative ou pour...