PARTIE 14

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Le week-end avait été éprouvant pour Kathleen. Le samedi, après qu'Inès l'ait ramenée chez elle, prétextant auprès de ses parents qu'elle s'était subitement sentie mal pendant leur virée shopping, s'était écroulée de fatigue et avait dormi jusqu'à la nuit tombée. Elle s'était finalement réveillée, juste au moment où Mary comptait appeler le médecin, le ventre creux et l'impression d'avoir la tête dans un étau. L'esprit tourmenté par une multitude de questions sans réponse, Kathleen avait désespérément cherché une explication plausible à ce qui lui était arrivé et avait finalement décidé de téléphoner à son amie, dans l'espoir qu'elle puisse lui apporter un éclairage sur la situation. Elle savait qu'elle devait aborder le sujet avec précaution, craignant la réaction de son amie face à ses révélations. Les mots avaient du mal à sortir de sa bouche, chaque phrase pesée et mesurée dans l'espoir de ne pas déclencher une réaction trop vive. Mais Inès avait écouté avec attention, posant des questions pertinentes et offrant un soutien inconditionnel à son amie en détresse, lui suggérant même de faire des recherches, dans les archives de la mairie peut-être, ou à la bibliothèque, n'importe quoi au sujet des ruines.

Il était 15h30 passé lorsque Kathleen poussa les lourdes portes de la bibliothèque de l'université. Une bibliothèque magistrale digne d'Harry Potter, qui regroupaient facilement des milliers d'ouvrages répartis sur 2 étages, dans un décor chaleureux aux boiseries en chêne sombre et voûtes. Kathleen resta un moment subjuguée par l'immensité du lieu avant d'avancer dans l'allée centrale, éclairée par de nombreuses appliques. Perdue dans ce dédale de connaissances et d'histoire, Kathleen sentit le besoin pressant de trouver des réponses à ses questions. Sans savoir par où commencer, elle se tourna vers la bibliothécaire, cherchant son regard bienveillant et son expertise pour l'orienter dans cette quête de vérité. La bibliothécaire, une femme au visage empreint de sagesse et d'expérience, accueillit Kathleen avec un sourire encourageant. Sans un mot, elle se mit en mouvement, invitant Kathleen à la suivre à travers les allées dont les livres à la reliure en cuir, qui semblaient renfermer de nombreux trésors, étaient tous parfaitement alignés sur les étagères. Bientôt, elles atteignirent l'une des nombreuses allées où étaient disposées des échelles, permettant ainsi d'accéder aux ouvrages situés en hauteur. La bibliothécaire se mit à grimper avec agilité, ses gestes empreints d'une familiarité acquise au fil des années passées parmi les rayonnages. Kathleen la suivit avec un mélange d'impatience et de fascination, le cœur battant à l'idée de découvrir ce que renfermaient ces livres anciens et poussiéreux. Elle se sentait comme une exploratrice en quête de trésors cachés, prête à plonger dans l'océan de connaissances qui s'offrait à elle. Une fois en haut, la bibliothécaire se mit à fouiller parmi les ouvrages, cherchant celui qui pourrait contenir les réponses tant attendues. Les yeux brillants d'excitation, Kathleen observait chaque geste avec une attention soutenue, attendant avec impatience le moment où elle tiendrait enfin entre ses mains les clés de son mystère. Enfin, la bibliothécaire s'arrêta devant un ouvrage ancien, relié de cuir usé par le temps. Avec précaution, elle sortit de le livre de son étagère et le tendit à Kathleen, qui s'empressa de la saisir. Avant d'entamer sa lecture, elle fit un tour dans les archives, après avoir eu l'accord d'y jeter un œil et trouva de nombreux documents qui pourraient certainement l'aider à en savoir plus. Trépignant presque d'impatience, elle trouva sans mal des tables mises à disposition ou elle déposa toutes ses trouvailles lorsque Luna, qu'elle ne s'attendait pas à voir ici, se planta à ses côtés.

— Qu'est-ce que tu veux, Luna ? Je n'ai plus rien à te dire...

— C'est bien dommage, parce que moi, j'en ai des choses à te dire !

Kathleen pensait que le mieux à faire était de l'ignorer, ce qu'elle fit à la perfection puisqu'elle ne répondit rien. Elle posa un coude sur la table, laissa tomber sa tête dessus, et commença la lecture sans lui accorder la moindre importance. Brusquement, la main de la jeune femme vint s'aplatir brutalement sur le livre, arrachant à Kathleen un hoquet de surprise. Elle releva la tête et posa un regard foudroyant sur elle. Elle n'en vaut pas la peine, se dit-elle en retournant à ses occupations, je n'ai qu'à la laisser parler dans le vide !

Alors que Kathleen l'ignorait superbement bien, les yeux de Luna tombèrent sur les documents posés en vrac sur la table et vit là de quoi toucher un point sensible.

— Quoi ? Tu n'es pas au courant ?!

— Au courant de quoi ?

— Comment tes parents t'ont trouvée ! Dans la boue, comme une dépravée ! Répondit-elle, un sourire machiavélique sur son visage.

— Tu t'ennuie au point de venir raconter tes conneries à qui veut bien l'entendre ? Trouve toi quelqu'un d'autre, je n'ai pas que ça à faire, moi !

— Saches que j'utilise mon temps à bon escient, petite bâtarde !

À ses mots, le sang de Kathleen ne fit qu'un tour. Elle se releva abruptement, laissant sa chaise tomber à la renverse et vint se poster face à Luna, le regard rivé au sien, menaçant.

— Qu'est-ce que tu as dit ?

— J'ai dit que tu n'étais qu'une petite bâtarde ! Lui assena-t-elle une fois de plus.

La table se mit à trembler, les luminaires à clignoter et tout ce qui se trouvaient sur la table fut éjectés par terre. Pourtant, aucune des deux femmes n'y prêta attention, bien trop occupée à se fusiller du regard, prêtes à riposter, les poings serrés, la respiration lourde. Le sourire perfide de Luna s'accentua lorsqu'elle remarqua que Kathleen commençait à trembler, verte de rage. Visiblement satisfaite, elle tourna les talons et disparut comme si de rien parmi les allées de la bibliothèque. Hors d'elle, Kathleen resta quelques secondes sans bouger, puis se décida à ramasser sa chaise et s'y laissa tomber. Les coudes sur la table, elle plongea sa tête entre ses mains. Les larmes au bord des yeux, elle fut secouée par un violent sanglot.

— Est-ce que ça va aller ?

Surprise, elle releva des yeux humides vers Eliott, qui se tenait devant la table, visiblement inquiet. Elle essuya sa joue d'un revers de la main et hocha la tête en signe d'approbation.

— Au risque de te décevoir, tu arrives trop tard pour régler tes comptes... Finit-elle par dire, la voix enrouée.

Il ne répondit rien, mais afficha un léger sourire, bien loin du sourire satisfait qu'il affichait d'habitude. Tout deux accroupi face à face, se fuyant du regard, ils ramassèrent les livres qui jonchaient le sol et les rangèrent dans le sac de la jeune femme.

— Merci pour ton aide...

Les yeux bouffis par les larmes, elle ne lui adressa pas un seul regard et le contourna, prête à partir.

— Je te raccompagne ! Lança-t-il en s'élançant derrière elle.

— Merci de t'inquiéter pour moi, ou pas d'ailleurs ! Mais ce n'est pas utile ! Répondit-elle sans même se retourner.

Malgré ce qu'elle commençait à éprouver pour lui, sa façon de se comporter jusque-là ne lui donnait pas spécialement envie de se retrouver en sa présence. De plus, elle ressentait le besoin de faire le point, seule, pour réfléchir, mais Eliott ne sembla pas s'en préoccuper car il accéléra le pas afin de la rattraper, bien décidé. Il la devança sans peine et vint se placer devant elle, lui bloquant ainsi le passage. Kathleen soupira, excédée.

— Je te l'ai dit, ce n'est pas nécessaire, et de toute façon, je ne rentre pas directement chez moi !

— Je sais !

𝐄𝐃𝐆𝐄𝐖𝐎𝐎𝐃 [ 𝐓𝐄𝐑𝐌𝐈𝐍𝐄𝐄 ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant