Rugby ❤️‍🩹✅

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Quatorze ans plus tôt

Maë

— Qu'est-ce qu'il t'arrive, ma Maë ? Tu es dans la lune ? me demande Julia.

Je ne cesse de penser à lui depuis que je l'ai vu, pour la première fois, m'ouvrir cette porte. Son regard égaye mes nuits et il ne se passe pas un jour sans que je revoie son visage et son sourire. Il dégage tellement de gentillesse et de bienveillance. Bien évidemment, j'ai tout raconté à Julia dans les moindres détails. Elle, qui croit au coup de foudre, m'a sauté dans les bras en confirmant que ça y est, mon moment était arrivé.

Je suis retournée chez Louise plusieurs fois, j'y ai croisé ses parents, son chat, mais pas lui. Et pourtant, j'ai essayé de connaître la raison de son absence à chaque fois en essayant de noyer le poisson, il est trop occupé à faire des activités extrascolaires, c'est ce qu'on m'a répondu.

Je voulais tellement le revoir, admirer ses photos sur les réseaux sociaux ne me suffisait plus.

Sur cette pelouse où nous nous sommes installées, je ressens le besoin de calmer mes angoisses suite à mon comportement.

— Non mais tu te rends compte, Julia, je suis une malade, une psychopathe. Tous les jours, j'ai ce besoin d'aller voir s'il a publié de nouvelles photos...

— Tu n'es pas malade, tu es amoureuse.

Amoureuse ? Ce mot reste gravé dans ma mémoire. Est-ce possible de tomber amoureuse d'une personne que je ne connais pas ?

— Ce n'est pas possible...

— Tu es en admiration devant son physique. Il te manque juste à savoir ce qu'il se cache dans sa tête.

Je m'allonge auprès d'elle sur l'herbe.

— C'est ce qui me fait peur, mais il faudrait déjà que je puisse le revoir.

Julia se redresse d'un coup.

— Ils arrivent, regarde-les comme ils sont beaux.

Je souffle, montrant mon agacement face à l'attitude de ma meilleure amie.

— Eh, moi aussi j'ai le droit de tomber amoureuse...

Je rigole et me replonge dans mon livre. Julia a absolument voulu venir admirer l'équipe locale de rugby qui s'entraîne le samedi matin à neuf heures. Oui, oui, neuf heures, je suis normalement encore en train de dormir. Cela ne lui suffit pas de supporter les lancers de ballon dans le couloir du lycée, il faut en plus de cela, se lever aux aurores le week-end.

La seule chose qui m'a convaincue, c'est qu'ils annonçaient beau et chaud. Une petite séance de bronzage avec un bon livre ne se refuse pas. C'est pendant cette période que je fais le plein de vitamine D.

Cela fait bien quinze minutes que je l'entends pousser des soupirs d'admiration et faire des commentaires sur le physique des jeunes rugbymans.

— Ouah, il est grand celui-là.

— On n'est pas dans un musée ou un magasin, Julia.

— Arrête de lire et admire ce beau paysage.

— Non, je t'ai dit que je t'accompagnerai mais à une seule condition, que je puisse lire, tu te rappelles ?

— Tu es bête de ne pas en profiter. Ton fameux Julien, tu ne le reverras peut-être pas.

Prenant conscience qu'elle pourrait avoir raison, mon moral descend en flèche. Alors, je suis condamnée à le regarder via l'écran de mon téléphone. L'idée que je lui sois indifférente me traverse l'esprit sans cesse. Il serait rentré en communication avec moi, sinon, non ? Je préfère garder à l'idée que nous finirons par nous recroiser. Avec sa sœur qui ne cesse de faire appel à moi, je devrais pouvoir le revoir à nouveau, mais est-ce que j'aurai le courage de l'aborder ? On ne peut pas dire que notre première rencontre ait été au top en matière de communication.

— Euh, Maë, un jeune homme s'approche de nous, tu crois qu'il a entendu mes pensées ?

Expirant toute l'air de mes poumons, je me redresse pour me retrouver face à... Bordel !

— Salut ! dit-il.

De nouveau, je suis incapable de prononcer un mot. Oh non, mais pour qui va-t-il me prendre ? Il ne vient pas pour toi, Maë. Julia est bien plus belle et intéressante. Est-ce que cette pensée m'aide à aller mieux ? Les rencontres, je me les imagine dans ma tête et elles sont parfaites, mais en réalité j'ai tellement peur. Je ne suis pas prête à ramasser mon cœur qui pourrait être brisé en mille morceaux par un garçon.

— Coucou, répond Julia, qu'est-ce que nous pouvons faire pour toi ?

Mon regard se fixe sur la couverture de mon livre où j'intègre chaque détail de celle-ci, obligeant mon esprit à penser à autre chose.

— Maë, c'est ça ?

Julia me donne un coup de coude dans les côtes, m'obligeant à le regarder. Toutes les premières sensations que j'ai ressenties la première fois réapparaissent. Un frisson agréable parcourt ma peau au niveau de mon dos.

— Oui, arrivé-je à prononcer.

— Est-ce que ça te dirait de me retrouver ce soir à l'Entrepôt ?

L'Entrepôt ? Qu'est-ce que c'est que ce truc ? J'imagine une sorte d'usine désaffectée, mais qu'est-ce que nous pouvons faire là-bas ? Julia ne cesse de me fixer, se demandant certainement pourquoi est-ce que je ne réponds rien. Et d'ailleurs, elle a bien raison, qu'est-ce que je suis en train de faire ? Je rêve de ce moment depuis des jours et je suis là, en train de réfléchir.

De nouveau, un coude vient frapper mes côtes.

— Ok, lâché-je.

— Cool, on se dit vingt heures ?

— Ok.

Qu'il ne m'en veuille pas, c'est le seul mot que je suis capable de prononcer. Sourire fixé sur ses lèvres, il nous laisse pour rejoindre ses amis.

— Ce n'est pas vrai, Maë, c'est lui Julien ?

— Oui, chuchoté-je.

— La vache, il est craquant.

— Je ne peux pas y aller.

— Oh que si tu vas y aller.

— Mais, je ne sais pas où il est cet entrepôt. Et puis, ce lieu me fait flipper.

Julia hausse les sourcils avant d'exploser de rire face à ma mine apeurée.

— Relaxe, l'entrepôt est un bar qui se situe pas très loin du lycée. Il n'est pas réputé pour avoir de mauvaises fréquentations, si c'est ça que tu veux savoir.

— Mais... Et s'il me trouvait nulle ou pire encore, inintéressante. Peut-être qu'il m'invite juste parce que j'aide sa sœur.

— Le seul moyen de le savoir c'est d'y aller, ma cocotte.

— Je ne peux pas. Il ne m'en voudra pas de ne pas venir. C'est du temps gagné pour lui.

— Tu arrêtes, je vais t'y amener, s'il faut, mais tu y seras ce soir.

— Mais, je ne suis à l'aise qu'avec toi.

— Tu y arriveras.

— Mais...

— Stop, souffle un coup, ce beau gosse vient de t'inviter et c'est ce que tu attends depuis longtemps, alors tout va bien se passer. Je ne serai pas très loin, si cela peut te rassurer. 

Après les larmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant