Manipuler L'Amour (Sharnalk / HxH)

Chapitre 18 : Trahir ou trahir

Des pas résonnaient froidement entre les murs délabrés de cet endroit lugubre.
Phinks marchait doucement le long d'un sombre couloir. A mesure qu'il avançait, le son d'une lame se faisant aiguiser devenait de plus en plus net. Jusqu'à ce que ses yeux ne puissent se poser sur la lame en question. 
Il s'arrêta là, dans l'encadrement sans porte d'une salle tout aussi abandonnée que l'immeuble dans lequel il se trouvait. A l'intérieur de la pièce, dans un mouvement répétitif de glissement, Feitan aiguisait inlassablement l'un de ses outils. Assis dans un coin, seul, il se fondait dans les ténèbres, entièrement absorbé par son activité. Cependant, à peine le blond eut-il fait un pas dans son antre qu'il avait relevé le regard, détachant ses yeux de sa lame.

Dissimulant un frisson, Phinks continua d'avancer, et rejoint alors son compère, sans briser le silence glaçant installé en ce lieu. 

La veille, les plans s'étaient déroulés sans encombre. L'Araignée avait joué le requiem du deuil pour leur camarade perdu. Puis, ils avaient habilement dérobé tout les objets des enchères, en les remplaçant par de fausses copies. Et enfin, ils s'étaient fait passé pour morts aux yeux du monde alors qu'ils rentraient victorieux en tout point. Après ce retour glorieux et cette soirée festive, les membres s'étaient tranquillement reposés, bien satisfaits de leurs méfaits.

Alors Phinks ne comprenait pas. 

Avec la totale réussite de la veille, Phinks ne comprenait pas pourquoi son acolyte était dans un tel état. Car non, le comportement de Feitan n'était pas habituel.
Certes il avait ce côté morbide et impitoyable qui le rendait effrayant, et, oui, il était plutôt courant qu'il se mêle à l'obscurité dans un silence funeste, mais là, c'était différent. En quoi exactement ? Le blond ne saurait le dire. Pourtant il sentait que Feitan n'était pas dans son état normal. Il était d'ailleurs probablement l'un des seuls êtres existants, voire le seul, à pouvoir déchiffrer ainsi le tortionnaire. Le brun n'était certainement pas du genre à s'exprimer sur ses tracas, et encore moins sur ses possibles émotions. Pour les gens comme eux, ce genre de choses n'étaient jamais évoquées à vrai dire.

Néanmoins, Phinks avait bien compris que quelque chose tracassait son camarade. Ou devrait-il dire, son ami. Car c'était bien par ce lien qui les unissait qu'il était capable de sentir la détresse du numéro 2. Restait maintenant à trouver le moyen d'aborder le sujet.

Ayant donc continué d'avancer, le plus grand arriva jusque son compère et prit place à ses côtés. Il resta pourtant muet, et Feitan reprit ses mouvements répétitifs. 
Les secondes commencèrent à s'écouler, et se changèrent en minutes qui s'écoulèrent à leur tour. Les deux hommes, côtes à côtés n'échangèrent ni mots ni regards, pendant un temps qui parut une éternité pour le blond. Et puis, enfin, le ténébreux brisa le silence.

- T'as déjà été amoureux ?

- HMPF-KOFKOF!

S'il n'était pas assis, Phinks en aurait sûrement perdu tout équilibre. Au lieu de cela, il s'étouffa instantanément devant l'inattendu de cette question.

- Fei, tu-

La lame se planta à moins d'un millimètre de son oreille.

- Pas moi, sombre crétin. Interrompit le brun agacé.

Puis, devant l'air ahuris et désarçonné de son acolyte, Feitan explicita :

- Shar...

A nouveau, le silence régna quelques secondes, le temps probablement que l'information soit traitée par le pauvre Phinks.

- Shar ? Répéta-t-il finalement, encore plus perdu.

Le brun hocha la tête avant de soupirer. Il semblait enfin prêt à parler un peu.