19- Funestement Beau

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  Si Eren n'avait pas su que répondre quand Livaï lui avait demandé qu'est-ce qu'était réellement le mensonge, il pouvait dire lui avoir menti

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Si Eren n'avait pas su que répondre quand Livaï lui avait demandé qu'est-ce qu'était réellement le mensonge, il pouvait dire lui avoir menti. Dans son esprit embrumé par la chaleur intenable et étouffante de l'hôpital, il se rappelait de ce sang, son sang, leur sang. Quand ses yeux d'apparence si innocents tombèrent mollement sur ses mains teintées d'écarlate, aussi sèches que ce soir là, de la même couleur que cette funeste soirée mortuaire, son estomac se tordit.
Livaï était-il vivant ? Aucune idée et Eren ne préférait pas y penser, il était d'ailleurs incapable d'y penser. De veilles images ternies par le temps, ternies par l'amertume de leur souvenir refaisaient surface et il ne savait plus que faire.
  Pourtant, la main de Mikasa sur sa cuisse le fit reprendre approximativement pied en la réalité.

  — Eren, respire calmement, ça va aller, lui dit-elle doucement.

  — Où est maman ?

  — Maman est partie acheter de quoi manger. Elle a prévenu l'hôpital pour Kenny. Tu veux de l'eau ?

  Non, je risque de la vomir, pensa-t-il. Alors il répondit tout autre chose, un faux air détendu barrant mollement son visage livide:

  — C'est gentil mais je m'en passerai...

  — Cesse de faire le fort Eren, tu ne peux pas me mentir à moi.

  Le jeune homme se mordit la lèvre inférieure, complètement dépourvu. Protéger Mikasa, il l'avait toujours fait. Il l'avait protégé de ses états d'âme fatalement négatifs, l'avait préservé des remords qu'il avait eu en tuant pour la sauver. Mais aujourd'hui, Mikasa avait grandi alors, totalement désemparé, il laissa ses yeux s'emplirent de larme et se loger tendrement dans l'univers métalique du regard de sa demie-soeur. Mon dieu, ton regard ressemble tellement au sien...
  Et s'il ne le revoyait plus jamais  ? Et s'il devait à jamais se contenter de l'éclat moins glacialement vibrant des yeux de sa soeur ? Et si Mikasa était, à présent, la dernière des Ackerman, ce clan maudit par l'injustice d'une réputation souillée ?
  Avec tendresse, Mikasa posa sa main sur le velour de sa joue rougie par la tristesse. Elle lui souriait, un sourire à l'arrière goût amer, à l'avant goût réconfortant.

  — Il s'en sortira, c'est un Ackerman après tout. Il s'en sortira, il te la toujours dit, c'est le Monde qui est injuste et non la vie, et non le destin. Je suis sûr que ton père fait tout ce qu'il peut pour lui donner une seconde chance pour rire, aimer, pleurer, parler et apprécier le Monde, aussi injustement Laid, aussi justement Beau soit-il.

  Et les doigts fins de Mikasa s'humidifièrent quand le sel des larmes d'Eren s'échoua contre la douceur de leur épiderme. Dans une longue étrainte, ils se persuadaient que le destin savait faire la justice, que la roue de dame vie tournait, dans une tendre étrainte, ils s'aimaient de la plus belle des manières, de la plus platonique des façon. Après tout, ils avaient vu la mort et aujourd'hui, y faisaient de nouveau face. Plus de protection puisque personne ne pouvait se préserver contre la perversité de cette société totalement érronée, parce que personne ne pouvait réchapper à l'horreur de la vie, si vite retirée.
  Pourtant, il suffisait d'un changement, d'un détail déranglant le rouage pour faire croire, pour amener l'espérence et c'est ce qu'il se passait, là, dans cet hôpital. Grisha Jager, l'un des chirurgiens les plus talentueux, usait de son savoir faire pour sauver la vie de celui qu'il aurait rejeté si Eren ne lui avait pas raconté son histoire. Il s'affairait sur le corps innanimé du bel ébène, on aurait dit qu'il dormait. L'expression deux salles deux ambiances prenait tout son sens: dans l'une d'elle, deux ados' bien trop vite plongés dans le Monde des adultes partageaient leurs larmes dans l'espoir que ce soir funeste ne devienne pas mortuaire. Dans l'autre, un père honteux d'avoir injustement dénigré le jeune homme à l'aspect durement enfantin, atrocement mort que ses capacités chrirurgiennes s'affairraient à sauver.
  Le temps semblait passer tellement lentement qu'à une vitesse folle, les heures s'écoulaient. Enveloppés de l'incertitude du "A demain, au lycée", ils restaient assis sur les sièges miteux de la salle d'attente comme si, d'un coup, un miracle allait se produire. Comme si les Anges qu'il admirait tant allaient venir lui refuser l'accès au Paradis, le condamnant à errer délicieusement dans le doux Enfer qu'est ce Monde ébranlé.
  De la même manière que les heures, la nuit fila et les néons de l'hôpital avaient voulu l'effacer.
  Eren avait l'imression de ne pas avoir dormi alors que Mikasa lui assurait que, sur son épaule, il s'était assoupi quelques heures. Au petit matin, Carla était de retour et leur tendait des viainoiseries avec un sourire qu'elle voulait réconfortant.

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