A Crazy Love Story

6 - Fake dating trope

Hadriel

J'avale la distance qui me sépare de Sissi d'un pas lourd et impétueux. Voilà presque une demi-heure que je poireaute comme un con en l'attendant. Comme si je n'avais que ça à faire de mon temps ! J'ouvre la bouche, impatient de lui livrer le fond de ma pensée, tout en avisant son accoutrement du jour : des bottes de gogo danseuses et une robe en jean riquiqui qui, je le sens, va encore mettre mes nerfs à rude épreuve.

— Vous êtes en retard, aboyé-je, doublement contrarié.

Presque sans ciller, elle croise les bras sous sa poitrine, attirant dangereusement mon attention sur elle.

— Je n'avais pas vu l'heure passer, se défend Sissi.

Je relève les yeux et je crois halluciner.

— C'est votre façon de vous excuser ?

Pour toute réponse, la petite brune me refait le coup du regard de biche pris dans les phares d'une voiture.

— Cessez votre numéro, ça ne marche pas, craché-je avec hargne.

Aussitôt que je le déclare, elle abandonne son regard de cocker et redresse le menton bien haut.

— Pourtant, ça a marché deux fois hier, réplique-t-elle.

La garce mérite l'oscar de l'insolence.

Je n'ai pas le temps d'exprimer tout le mépris qu'elle m'inspire, qu'elle saisit mon bras droit de ses deux mains et me force à avancer vers le bar - celui où nous étions hier après notre passage chez le notaire. Mais alors que nous approchons de l'entrée, je me raidis et marque l'arrêt. Mon coeur bat à toute vitesse à cause de la colère qui monte, et qui ne cesse d'augmenter.

Alors que je serre les poings, Sissi se met à paniquer :

— Euh...Hadriel, tout va bien ?

La haine m'enivre toujours davantage lorsque je sors de mon mutisme pour siffler :

— Mon ex est ici avec...

Elle suit la direction de mes yeux, percute l'inévitable, et devine :

— ...Son nouveau mec.

— Anciennement mon meilleur ami, complété-je entre mes dents serrées.

La petite brune ouvre grand la bouche, scandalisée d'apprendre la double trahison à laquelle j'ai dû faire face cet hiver. Mais en un clignement de paupières, son regard outré change et devient malicieux. Presque machiavélique.

— Venez, j'ai une idée, déclare-t-elle.

Sans en dire davantage, elle tire à nouveau sur mon bras et nous fait entrer dans le bar bruyant, sans même me laisser le temps de protester.

Mais qu'est-ce qu'elle a en tête, au juste ?!

Je termine à peine de me poser la question que Sissi se plaque étroitement contre moi et passe mon bras autour de sa taille. Moi, tout en noir, et elle, avec son style excentrique et ses bottes vernies orange, on peut difficilement nous manquer. Cela se confirme lorsque Olivia et Bruno tournent la tête dans notre direction.

— Détendez-vous, tout va bien se passer. J'ai un plan.

Mais c'est tout le contraire qui se produit lorsque Sissi, l'imprévisible, me fait ce serment.

Bordel, la connaissant, je crains le pire.

— Hadriel ! me salue ce traitre de Bruno.

Un peu gauche, celui qui fut un temps un ami, presque un frère, recule sa chaise et se lève. Olivia l'imite, complètement décontenancée.