Deux mondes, un portail

Chapitre 17

   Les petites Princesses avaient toutes les deux cru avoir connu le plus grand des malheurs en perdant leurs amis. Mais, elles étaient loin du compte. Elles n'étaient pas au bout de leur peine. Depuis la disparition de la famille de lait de Loélia et l'accident de Jack, le Roi et la Reine étaient devenus étranges. Ils avaient interdit catégoriquement quiconque d'aller au lac. Ce qui à première vue est normal puisque plusieurs personnes avaient laissé la vie. Sauf que parfois, les Princesses surprenaient leurs parents à les fixer sans raison, comme s'ils avaient peur de les perdre. Puis, ils devinrent distants. Ils se disputaient souvent aussi. Une fois les Princesses étaient toutes les deux dans la bibliothèque, cachaient derrière les grandes étagères, plonger dans leurs livres qui les faisaient voyager au-delà de leur peine. Leurs parents étaient rentrés en se disputant violemment. Walter disait qu'il fallait les emmener quelque part le plus vite possible, et Romy refusant catégoriquement. Puis quand ils s'étaient aperçus de la présence des filles, ils s'étaient brusquement arrêtés, interdits. Ils les avaient envoyés dans leurs chambres sans explications avec le visage fermé.

   Trois années passèrent, les parents étaient devenus bipolaires. Ils étaient occasionnellement "pegous" (1) = Collant comme dirait Loélia, puis parfois très distants. Les filles avaient essayé de comprendre leurs comportements, mais elles n'avaient jamais compris. Bien sûr, ces deux disparitions étaient inquiétantes. Leurs parents auraient dû au contraire réduire le plus possible la distance entre eux. Et, un jour arriva, où leurs parents leur annoncèrent qu'ils les quitteraient pour un bon moment, car ils allaient faire un grand voyage d'affaires.

   — Mais où se situe ce voyage d'affaires ? Et, avec le Roi de la Marselhesa ? N'est-ce pas un peu imprudent de laisser le Royaume ? s'enquit Rosalina inquiété de ce voyage tout à fait inattendu dans une atmosphère de guerre.

   — Ce voyage est pour le bien du Royaume Rosalina. Nous allons dans un Royaume au-delà de l'Occitania. Et, puis, nous ne partons qu'avec très peu d'escorte. La majeure partie de notre garde sera ici. Nous voulons la meilleure protection pour vous, dit-il en l'embrassant sur le front.

   — Mais Père, vous n'êtes jamais allés aussi loin... balbutia Loélia.

   — Ne t'inquiète pas ma fée, dit Romy en lui caressant sa joue. Matalena viendra vous garder. Comme cela le voyage te paraitra moins long.

   Cette fois, Loélia regarda sa mère dans les yeux. Sa mère venait de la tutoyer comme elle le faisait quand elle était petite. Romy eut, elle aussi, un arrêt. Le Roi enchaina alors sur autre chose pour cacher ce trouble. Mais, les deux sœurs s'étaient jeté un regard entendu. Leurs parents leur cachaient quelque chose. Elles se levèrent de la table ou elles étaient assises pour le dîner, et partirent dans leurs chambres sans demander leur reste. Le Roi et la Reine les rappelèrent, mais celles-ci n'en firent qu'à leur tête. Mais, cela ne changea en rien la décision de Walter et de Romy. Le jour de leur départ arriva, et tout le château était en ébullition pour préparer leur départ. Les Princesses, elles, étaient attristées du départ de leurs parents. Quand tout fut prêt, ces dernières choisirent chacune un parent pour le coller et ne plus le lâcher. Tout le palais faisait une allée d'honneur aux souverains pour leur souhaiter bon voyage. Même la petite Isabella leur faisait un signe dans les bras de sa maman. Avec ses petites mains et ses cheveux frisés, elle faisait déjà craquer tout le Royaume.

    — Loélia ma fée, dit Romy en se penchant vers sa fille. En m'attendant, tu pourras t'occuper d'Isabella pour aider Gwendolyn ? Car être maman, c'est beaucoup de travail. dit-elle en lui faisant un clin d'œil. Walter ria doucement pendant que Loélia hocha fièrement de la tête.

   — Bien, mes filles, dit Walter. Sachez que nous vous aimons plus que tout au monde. Nous reviendrons vite.

   — Oui mes Princesses, on sera là plus vite que vous ne le pensez !