Limerenza

Chapitre 1 : Mon printemps

Le vent frais du matin se glisse sur mon visage encore endormi, avec une marche plus rythmée que mes pensées encore embrumées, je mets mes airpods et prends mon portable en main pour lancer ma playliste sur spotify, tout en me laissant guider par mes pas. En route pour mon footing qui me mènera vers le sentier faisant le tour de la pointe de la Revellata, un petit bout d'île qui se trouve à la sortie de Calvi... Il n'y a encore personne aussi tôt de la matinée et même si la température tourne autour de 10 degrés, on peut s'attendre à passer nos journées où la temperature dépasse les dix huits degrés sur notre petite île.

Par habitude de notre météo plutôt clémente, je ne me suis couverte avec mon legging, que d'un gilet par dessus ma brassière, et c'est parti pour environs deux heures de marches.

Même si le levé de soleil reste le même chaque jour, avec le décalage de minutes nous apportant toujours un peu plus de lueur du soleil, les couleurs du ciel varient et ne sont jamais les mêmes... comme mes pensées... aujourd'hui plus intensément encore, je ne parviens pas à appaiser mon humeur. Il me faudra ma dose de caféine une fois que j'aurais fait mon tour.

J'entame la marche vers le sentier en appréciant le calme et la vue qui s'étale devant moi avec l'odeur des plantes qui s'émane et m'entoure. Je n'ai pas spécialement de chaussures adaptées mais j'ai l'habitude même en baskets, je reste tout de même prudente, on ne manque jamais de se faire mal si on ne pose pas bien ses pieds sur les obstacles qui nous entravent. Ce genre de moments de répits fait du bien après une grosse semaine de travail, quoi de mieux quand la nature nous offre tout ce qu'il faut pour se recharger ?

Mon portable sonne déjà; je suis à peine en hauteur de la pointe de l'Oscelluccia, et quand je vois l'appelant je redoute la conversation, alors je mets le téléphone sur silencieux et je continue ma marche. Je n'aime pas ce côté opressant même si je sais que je ne vais pas y échapper longtemps... ça va être quoi cette fois l'excuse ? Et je ne parle pas de la sienne mais bien de mon excuse. Car oui, si en générale ce sont les femmes qui recherchent l'attention et qui ont des inquiétudes sur le "que fait-il" et "avec qui", je suis celle qui ghost carrément dans la relation. Je ne devrais pas, je sais pourtant qu'après je suis traquée sur les réseaux sociaux, je laisse alimenter sa douleur, lui qui est à la recherche de réponses aux questions auxquelles je ne peux même pas y répondre. Je ne sais pas comment lui donner de l'attention car je ne sais déjà pas moi-même ce que je désire réellement. Je ne veux ni être seule, ni être dans une relation profonde. Rien ne me touche, rien ne me retient. Alors je devrais prendre mon courage à deux mains et finir ce qui n'a pas vraiment commençé.

Après ma longue promenade le long des falaises, où si l'on a l'œil, on peut y découvrir notre célebre Armeria soleirolii entre les rochers, j'arrive au phare, je monte le chemin accessible en voiture et profite enfin de la vue au niveau du muret en pierre, de la brise marine et l'étendue des eaux transparentes qui s'éclaircissent avec le jour. Je reprends mon téléphone en main. 08h10 et je constate les 5 appels manqués dont un message qui suit :

- Tu es morte ou tu es vivante ?! Rapelle-moi, que je saches au moins ce que j'ai fait de mal putain...

Je souffle exaspérée et je reste pensive, une de mes mèches flottantes au vent que je coince derrière mon oreille et voilà que je suis à nouveau perturbée rien qu'avec son message. 

Je soupire mais je m'accorde encore du temps pour ce moment privilégié avec la nature et mon esprit que le libère tant bien que mal de toutes pensées négatives, puis je reprends à nouveau ma marche. J'ai encore plus d'une heure pour savoir quoi lui écrire si je prends la peine d'y penser réellement. Difficile de justifier ce que je vis quand rien que le fait d'être seule me procure plus de plaisir que de la compagnie, aussi agréable soit-elle.