Frères tourmentés

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Ekrizdis était assis sous l'arbre, le dos appuyé contre le tronc rugueux, une bouteille d'eau à la main. Il se forçait à boire l'eau, chaque gorgée lui demandant un effort immense. Ses yeux étaient fermés, ses pensées concentrées sur la sensation du liquide qui coulait dans sa gorge, sans goût, sans fraîcheur. Il savait qu'il devait se maintenir en bonne santé, malgré la douleur constante qui le rongeait pour se nourrir.

À quelques mètres de là, Abraxas était assis à la vieille table rouillée, le journal déployé devant lui. Son regard sombre parcourait les lignes de texte, cherchant désespérément des nouvelles de la situation au palais.

— Ça ne parle même pas de la disparition d'Elara, murmura Abraxas, brisant le silence. Comment peuvent-ils ignorer quelque chose d'aussi important ?

Ekrizdis ouvrit les yeux et tourna lentement la tête vers son frère. Il savait que la disparition d'Elara était une affaire d'état, soigneusement dissimulée par ceux au pouvoir. Aucun média n'oserait en parler sans l'approbation de l'Imperator.

Il n'avait pas la force de répondre ou même de produire un quelconque sons ou grognement, mais son regard suffit à exprimer sa compréhension. Abraxas jeta le journal sur la table avec frustration, se passant une main tremblante dans les cheveux.

— Ils ne se soucient que de leurs propres intérêts, continua Abraxas, la voix tremblante de colère. Peu importe ce qui arrive à notre famille tant que leur précieux ordre est maintenu. Il n'y avait rien sur toi, non plus ! Personne n'a même pensé à te chercher !

Ekrizdis hocha doucement la tête, ressentant la même colère brûler en lui. Il savait que le silence des médias n'était qu'une preuve supplémentaire de la manipulation et de la corruption qui gangrenaient leur monde.

Abraxas se leva brusquement, renversant sa chaise au passage. Il commença à faire les cent pas autour de la table, incapable de contenir son agitation.

— Rien... Et... et on le savait quand...

Abraxas soupira, et baissa les yeux honteux.

— Tout le monde savait que tu voulais partir, dit-il. Je t'en voulais d'avoir ce rêve et... Tu allais m'abandonner. Je t'en voulais tellement d'être... si insouciant ! Tu te moquait de tout alors qu'on risquait pire que la mort ! Tu sais... quand tu m'as parlé de ton séjour à Azkaban... je me suis dit que tu l'avais bien mérité... Combien de fois, maman y avait été envoyée après avoir pris ta défense ? Et la fois, où ça a été toute une semaine ? Toi, ils t'avaient juste enfermé dans le cellier ! Tu avais l'air d'aller bien... toi... J'avais aussi été puni ! Tout ça parce que tu as frappé Caius ! Tu savais que maman allait en souffrir aussi ! Je t'en voulais... tellement... tu ne réfléchissais jamais aux conséquences...

Ekrizdis posa la bouteille d'eau et se redressa lentement, sentant chaque muscle protester contre l'effort. Il fit un pas vers son frère et posa une main sur son épaule, serrant. Comment expliquer à Abraxas tout ce qu'il avait enduré pour le protéger mais aussi leur mère ? Comment lui raconter les menaces de Caius envers leur mère et le prix à payer pour que ce dernier ne fasse rien ? Ekrizdis avait toujours pris pour tout le monde. Le plus jeune, après tout, mais aussi le rebelle. Malgré les coups de Lazarus, quelques Doloris aussi, les abus de Caius, Ekrizdis n'avait jamais accepté de désespérer.

Il secoua un peu Abraxas, et grogna. Ce n'était pas juste ce que son frère lui disait.

— Pardon, murmura Abraxas les joues rouges en voyant les larmes de son frère. Je... J'étais stupide... Titus dit... dit que tu étais souvent battu par... par Lazarus et Maura... et même des fois alors que tu n'avais rien fait. Pardon... Noctus... Il me rappelait constamment tes comportements, tes relations douteuses... Tes fugues... toujours... Des jours entiers où tu disparaissais, on ne sait où.

Invisible IV - L'Ombre éveilléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant