Chapitre 4: Le chant du vent (1/2)

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Artie avait quelques regrets. Il avait décidé de rattraper Oli sur un coup de tête, sans songer à ce que serait le trajet à ses côtés. Le silence était si pesant qu’il sentait sa nuque se courber sous son poids. Oli n’avait pas répondu à sa demande, il ne lui avait d’ailleurs adressé ni parole ni regard. Jamais Artie ne s’était senti invisible de la sorte. C’était une sensation très désagréable que d’avoir l’impression d ‘être un fantôme. Il toussota pour attirer son attention, Oli n’eut aucune réaction. La nuit tombait, la forêt pourtant très accueillante de journée devenait menaçante avec le crépuscule. Artie ne pouvait s’empêcher de penser aux sombres secrets qui pouvaient se tapir dans l’ombre, et qu’il ne voulait absolument pas avoir à découvrir. Si les ruelles sombres de la ville ne lui faisaient plus peur après des années à devoir les traverser en revenant de se soirées, la forêt quant à elle était un environnement inconnu ; et de ce fait, particulièrement dangereux. Sans le réaliser, Artie se rapprocha de son collègue qui marchait avec assurance… Il lui écrasa le pied.

-          Fais un peu attention !

Il avait donc bel et bien remarqué sa présence, et l’avait accepté sans un mot. Artie s’éloigna un peu, à peine. Il n’était pas rassuré.

-          Excuse moi, je ne voulais pas te marcher dessus mais je n’y vois rien.

-          Il ne fait même pas encore nuit.

-          Il fait quand même bien sombre.

-          Si tu le dis.

Il continuait d’avancer sans hésitation, il n’avait pas trébuché une seule fois sur les racines qui leur coupaient le chemin. Artie ne pouvait qu’admirer cette aisance.

-          Tu connais bien le bois, pas vrai ?

-          J’ai toujours vécu ici.

-          Ha.

Oli n’ouvrait pas la conversation, mais il ne semblait pas totalement fermé à une discussion. Artie prit son courage à deux mains pour en savoir davantage.

-          Tu es né dans la région ?

-          En effet, perspicace.

Il ignora la pique qui lui était lancé.

-          Donc tu n’es jamais sorti de ce coin ? Tu as fait tes études ici ?

-          Exact.

Artie était sous le choc : quelle adolescence insipide il avait dû avoir à vivre, entre les chênes et les cottage, sans aucun bar ou aucune boîte de nuit ?

-          Tu as du terriblement t’ennuyer. Ça veut dire que tu n’es jamais sorti danser avec des potes ?

-          Je suis sorti danser…

Oli affichait un sourire mystérieux. Il ne le regardait pas, alors Artie prit le temps de l’observer encore. Ses yeux mélancoliques pétillaient néanmoins d’une excitation nouvelle, le sourire qui tordait sa bouche illuminait son visage. Artie lui trouva un charme nouveau, différent de sa première impression. Là où il avait vu un jeune homme beau comme un spectre, pâle et froid, il voyait désormais une beauté féerique, douce et lumineuse. Il se remit à toussoter, non plus pour briser le silence mais bien pour briser sa propre contemplation.

-          Est- ce qu’il y a une école, dans le coin ?

-          Il y a une école primaire.

-          Et le reste ?

-          J’ai étudié à la maison.

Il devait s’être senti si seul. Ce fut la première pensée d’Artie et elle le rendit un peu triste. L’amertume qu’il ressentait vis à vis de son collègue s’adoucit, comme un thé trop infusé lorsqu’on y ajoutait un nuage de lait. Il se rapprocha encore de lui, cette fois sans lui marcher sur les orteils.

Fairy Ring On My FingerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant