Chapitre Dix-huit : Épée & larmes

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Le temps était à la tourmente, sur Florence. Les Limbes s'ouvrirent en plein sur la Piazzale Michelangelo, balayée par les rafales d'un vent glacé, qui ne tardèrent pas à emporter les pétales de la couronne de pâquerettes infernales aux quatre coins de la cité du Lys. Le trio découvrit une esplanade déserte, si ce n'était l'archange Michel surplombant la ville entière, son épée à la main. Les rares rayons de soleil qui filtraient à travers les nuages noirs et lourds l'éclairaient dans toute sa juste ire. Il se tourna vers eux. Lucifer poussa Sacha derrière lui pour le protéger de son éclat.

Sur le visage du Prince de la Foi, le choc de voir Haziel et Lucifer réunis se disputa à la fureur de les voir bafouer aussi ouvertement ce qu'On avait dicté.

— C'était donc vrai. Le Diable marche bien sur Terre.

Il paraissait toujours avoir du mal à y croire. Son attention se focalisa sur Haziel.

— J'espère que tu es conscient de ce que cela signifie.

Lucifer le coupa. Son archange déchu avait été assez rudoyé pour aujourd'hui.

— Haziel s'est retrouvé malgré lui mêlé aux affaires de l'Enfer.

Michel ne lui accorda pas un regard, continuant à le darder sans pitié sur Haziel, si fatigué qu'il avait bien du mal à le supporter.

— Et je lui ai tendu la main, et il l'a refusé. Il a brisé la confiance qu'On lui avait accordée, encore, dans Sa grande Charité, malgré son blasphème. Lui et les déchus seront jugés pour ça. S'ils restent quelque chose d'eux après ce qui risque de suivre.

Haziel eut un rictus. Aujourd'hui, il avait été blessé, enlevé, enfermé, menacé et libéré. Et à présent, la pire crainte qu'il avait eue en apprenant que le Diable comptait rester sur Terre était en train de se réaliser. Son avenir s'annonçait aussi sombre que le ciel nuageux au-dessus d'eux, mais il avait tout de même une lueur d'espoir. Contrairement à ce qu'il lui avait promis, le général était venu sans ses armées. Haziel tendit la pointe de l'aile cerclant son front vers l'épée qui l'avait jadis transpercé.

— Tu es le seul qui est armé ici, Michel. Nous ne voulons pas nous battre.

— Tout comme tu ne voulais pas te battre au Huitième Jour. Et pourtant...

Il laissa la fin de sa phrase mourir sur ses lèvres. Lui aussi se rappelait comment aurait dû finir leur affrontement, s'ils n'avaient pas été interrompus. Il reprit, avec un sarcasme fruit de siècles de rancune.

— Cherches-tu encore à défendre la Paix, Haziel ? Cela fait des millénaires qu'il est trop tard pour cela.

Se libérant de la poigne du Diable qui le maintenait derrière lui, Sacha bondit. Il le regretta un peu, lorsque la lumière que dégageait Michel manqua de lui brûler définitivement les rétines. Il persévéra cependant, mettant son bras en protection.

— Ne te moque pas de lui !

Il en avait assez que tout le monde s'en prenne à Haziel. Le déchu s'élança pour le rattraper, mais il était trop tard. L'attention de Michel était maintenant sur le garçon. Son regard s'assombrit en voyant l'anneau sacré au doigt d'une créature de la nuit. Il tendit la main.

— Tu n'as rien à faire avec cela, fils de Mammon.

La chevalière fila de l'annulaire de Sacha pour se mettre sur celui de Michel. Le dhampire sentit quelque chose d'invisible, mais de bien réel, lui empoigner le cou. Il fut soulevé du sol. Il aurait bien crié pour protester, mais aucun son ne sortait de sa gorge écrasée. Il griffa sa gorge dans le vide en essayant de se libérer. Haziel porta sa main à son torse, horrifié :

Plutôt pourrir sur TerreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant