14 février 1944 à Paris
Ruben,
Tu l'auras remarqué, j'ai cessé le jeu de rôle. Je ne me cache plus, parce que je n'en ai plus besoin. Plus besoin car ma vie est injuste, non, car la vie est injuste. Nous avons vécu cachés tout ce temps, comme si nous étions des monstres, comme si nous nous devions de préserver l'humanité de notre existence polluante, repoussante aux yeux de notre nation. Nous avons tout essayé Ruben, pour nous préserver de ce mal, nous préserver de cette horreur qui occupait notre pays et qui n'avait de cesse de vouloir nous exterminer, nous envoyer à la mort comme de vulgaire animaux d'élevage qu'on envois à l'abattoir. Voila ce que nous sommes Ruben, nous sommes des animaux destinés dès la naissance à être massacrés. A leurs yeux, nous ne sommes pas humains. Nous sommes une abomination qu'il faut radier de la surface du pays, car pour l'instant ils n'en sont qu'à ce stade... Un jour, ils seront heureux ces nazis, ces horribles démons, car le monde entier se sera soumis à leurs pieds, le monde entier sera débarrassé de la vermine que nous sommes. Si ce jour là arrive, tant mieux pour eux, je serais mort depuis longtemps. Ce soir mon cœur aura arrêté de battre, mes poumons auront arrêtés de pomper l'oxygène précieux qu'ils ont revendiqués pour eux seuls, et j'aurais arrêté de polluer leur air. Je serais mort et jeté dans une fosse parmi d'autres cadavres, d'autres monstres abominables qu'ils auront décidé de massacrer. J'aurais, dans cette fosse, la place qui m'appartient dans ce monde. Je suis une abomination qui doit reposer parmi les autres horreurs que cette Terre à portée.
Je n'en veux pas à ma mère qui, sous les coups de mon père découvrant ses plans, à mis à nu mon secret enfoui au fond d'elle. Je n'en veux pas non plus à mon père qui, horrifié de vivre sous le même toit qu'un monstre, est allé me dénoncer. Je n'en veux pas non plus aux flics qui tapent à ma porte à ce moment ou j'écris mes derniers mots. Je ne t'en veux pas non plus, toi qui à contribué à me rendre si monstrueux à leurs yeux, car je t'aime. Je n'en veux qu'à moi-même, moi qui n'a pas sur lutter contre l'horreur. Je mérite ce qui va m'arriver mon amour, alors je n'en veux qu'à moi.
En ce jour, qui devrais être un jour magnifique, je vais mourir. Souviens toi d'une chose Ruben, souviens toi de mes derniers mots. Je t'ai aimé, je t'aime et je t'aimerai toujours Ruben, alors prend soins de toi, ne les laisses pas t'allonger à mes côtés dans cette fosse qui sera mon cercueil, vis ta vie et ouvre les yeux du monde, montre lui que nous ne sommes pas des abominations, que ce que nous avons vécu était magnifique, que personne n'effacera cela. Vis Ruben, ne les laisse pas te prendre cela.
Joyeuse Saint Valentin mon Ruben, ton petit Eliott.
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Correspondance épistolaire interdite entre deux adolescents normaux.
RomanceRuben et Eliott sont amoureux. Mais s'aimer alors qu'on est du même sexe, en 1943, c'est dangereux. Voila pourquoi Rubis, la tourterelle d'Eliott, voyage si souvent pour que les deux jeunes hommes puissent avoir une relation, même si elle n'est qu'é...