chatpitre 6 、

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— Marius Lemonnier.

L'appellation sonne toujours si creux. Je ne sais pas. Mon frère et ma sœur ont plusieurs prénoms, eux. C'est moins impressionnant quand ma mère veut m'engueuler, dommage pour elle, vu que je suis celui qui en a le plus souvent besoin. Et redommage, mais je porte son nom, je pense que ça lui rappelle constamment que c'est celui qu'elle a élevé toute seule qui est ingérable. Je sais qu'elle a honte, alors mon regard se fait pesant sur elle, comme pour amplifier son ressentiment.

Je ne réponds pas d'ailleurs, me balançant sur mes pieds avec désinvolture. Miaou n'a pas eu ses croquettes puisqu'on m'attendait au pas de la porte, alors il se colle à mes jambes, miaulant.

— J'étais morte d'inquiétude. T'aurais au moins pu m'envoyer un message pour me faire un signe de vie. Il aurait pu t'arriver n'importe quoi et j'étais pas au courant d'où t'étais, avec qui, ni de quand est-ce que t'allais rentrer. Je t'ai attendu après avoir fini le repas chez les voisins et t'es même pas revenu, j'ai pas dormi de la nuit Marius. Ça te prend trois secondes d'envoyer un SMS, et t'es toujours scotché à ton tel. C'est pas la première fois que tu me fais des coups comme ça, sans te préoccuper de comment je peux me sentir. Mets-toi un peu à ma place, j'en peux plus de te rabâcher tout le temps les mêmes choses juste parce que tu t'en fous.
— Je m'en fous pas, je la contredis simplement, piteusement.

Les miaulements de Miaou et le bruit de la hotte occupent le silence. Sentir la présence du père des Camille m'angoisse.

— Surtout t'excuses pas, Marius.

Elle s'en va sur ça. Je l'entends claquer la porte de sa chambre. Je compte jusqu'à sept dans ma tête. Elle ressort pour prendre son téléphone qu'elle a oublié sur la table à manger. Elle me fixe.

— Mets la table, tiens.
— Je dois nourrir Miaou.
— Et bah organise-toi pour finir tout avant que ça soit prêt, qu'est-ce que tu veux que je te dise.

Je soupire et m'active en traînant des pieds. Super, l'ambiance.

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Le professeur nous rend les copies du DM après une semaine d'attente. Je fixe l'appréciation depuis quelques minutes, dégouté. « Connaissances insuffisantes. L'exercice ne semble pas avoir été compris. Je ne sais même pas si les 7 points attribués sont le fruit du travail de Marius ou des réponses pompées sur une IA tant c'est mal articulé. »

Ismaïl semble s'en être mieux tiré, avec un peu plus de la moyenne. Zazou, si elle a pas 19, se fait allumer par sa mère, donc j'espère que c'est ce qu'elle a eu. Elle travaille toujours dur en plus, ce serait injuste qu'elle ait moins en donnant tout.

Je mets ma tête dans mes mains, dépité. J'imagine pas la réaction de ma mère. Le pire c'est que j'ai bossé. Certes, à la dernière minute, mais j'ai quand même mis mon âme dans ce putain de truc de merde là. Le prof a vraiment pas de cœur. J'ai même pas utilisé internet, il raconte n'importe quoi mais ma mère va quand même y croire – évidemment. Elle est trop naïve en plus, aucune chance pour qu'elle avale pas ça. Ça paraît logique.

— Ça va mec ? me lance Isma dans un chuchotement.
— J'vais faire un AVC là, j'y crois pas putain...

Il me sourit d'un air désolé, frottant mon dos.

— C'est pas grave. Tu te rattraperas au prochain. Je t'aiderai.

J'acquiesce, un peu rassuré par ses paroles. Ismaïl a toujours les bons mots, en tout cas, toujours les bons mots pour moi.

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