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TW : Langage familier, rapport à la colère.

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EZIA.

- La pluie est démentielle ce matin - soupire Judith en dépassant les portes qui mènent jusqu'au couloir principal.

Je rabat la capuche de mon manteau et inspecte minutieusement ma tenue. La moindre parcelle de ma peau est congelée par la pluie glaciale, je suis trempée jusqu'aux os. Ce matin le bus scolaire a eu du retard. Je me suis retrouvée à attendre sous la pluie torrentielle avec pour seule compagnie la colère que j'ai ressenti envers moi-même pour ne pas avoir pris de parapluie. Wyatt n'avait pas cours de la matinée sinon je suis certaine qu'il y aurait pensé, lui. Putain, je me déteste d'être aussi bête.

Mes chaussures laissent des empruntes boueuses sur le sol tandis que je me dirige vers mon casier, Judith sur les talons. Mon compartiment porte le numéro 13. Une combinaison qui porte le mauvais œil et que je me trimballe depuis pratiquement trois ans. Un numéro que j'ai toujours détesté, autant pour ce qu'il signifie que pour sa position géologique. À côté des toilettes féminines, il y a toujours une petite odeur désagréable, celle du savon exotique mélangée à la pisse toute fraîche. Parce que malgré leur âge avancé, certaines filles ne savent toujours pas respecter le travail des agents d'entretien.

Autant qu'on se le dise, de bon matin, il n'y a rien de mieux pour vouloir rentrer chez soi illico-presto. Aujourd'hui, une odeur de chien mouillé s'est ajoutée à cette mixture des enfers. Je tape mon code à vitesse grand V avant de fouiller l'entièrement de mon espace personnel à la recherche d'habits secs. Heureusement pour moi, ma tenue de sport hiberne toujours entre deux cahiers qui se battent en duel. 

- J'espère que je vais pas avoir de problème – fais-je remarquer en refermant la porte d'un coup sec.

Je fais référence à mes vêtements : en dehors de la tenue réglementée, personne n'est autorisé à se promener dans une tenue aussi dérisoire que celle que nous arborons lors de nos cours de sport. Mon temps de réflexion permet à ma jupe patineuse imbibée d'eau d'inonder toute la zone du couloir dans laquelle nous nous trouvons. Heureusement les toilettes sont juste à côté, je n'aurai donc pas à traverser tout le lycée trempée jusqu'à la moelle. Comme quoi, il faut toujours voir le positif dans le négatif, même quand ça nous paraît impossible. 

- Il pleut à torrent, ils comprendront – affirme Judith en d'adossant contre le mur situé en face d'un des toilettes libres – J'espère aussi qu'ils comprendront que cet engouement autour de Côme Torrance va beaucoup trop loin.

Je retire ma jupe et mes collants, les traits crispés. Évidemment, Judith a été la première que j'ai mis au courant à propos de la découverte que j'ai fais vendredi soir. Elle est tellement sous le choc qu'elle m'a avoué en avoir fait des cauchemars tout le week-end. Quoi de plus normal lorsqu'on apprend que son ancien meilleur ami se fait désormais aux côtés d'un dangereux criminel ?

Mais le pire ce n'est pas ça. Le pire c'est que tout le lycée est euphorique au sujet de cet homme. J'ai compris qu'il avait retourné le cerveau de beaucoup d'élève dans le bus mais je ne pensais pas que c'était à ce point. Quand nous sommes arrivées au lycée lundi matin, tout le monde ne parlait que de lui : en plus d'être sur toutes les lèvres, des photos de lui avec des petits mots doux avaient été affiché dans les moindres recoins du lycée, y compris la cafétéria. 

Nous sommes mercredi matin et rien a changé. Tous ces abrutis ne pensent qu'à lui, ne vivent plus que pour lui. À croire qu'ils ne se rendent pas compte qu'une pauvre lycéenne y a laissé sa vie. 

Butterfly EffectOù les histoires vivent. Découvrez maintenant