Chapitre IV : contradictions.

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PDV Matteo :

— Monsieur, votre invité est arrivé, nous informe l'un des soldats qui attendait devant le bureau de Carlos.

Je perçois une légère tremblote dans sa voix, une nervosité qui se trahit dans ses traits crispés. Il n'est visiblement pas à l'aise en notre présence. D'un simple geste de la main, je lui intime de s'occuper de notre invité, le libérant de ses souffrances.

— Je ne tarderai pas à arriver, dis-je avant qu'il ne quitte la pièce.

Mon attention revient sur Carlos, installé dans son fauteuil en cuir, ses yeux plissés sous la lumière vacillante de la flamme de son briquet. Il allume une cigarette, la flamme révélant brièvement les rides sur son visage. La fumée de la cigarette flotte dans l'air, presque palpable, se mêlant au silence lourd qui enveloppe la pièce.

Nous étions en pleine réunion avant d'être interrompus, discutant de nos prochaines missions. Cependant, je devine que notre conversation n'est plus le principal intérêt de Carlos. L'étincelle de curiosité dans son regard m'indique qu'il ne laissera pas passer l'occasion de poser des questions.

— Qui vient donc te rendre visite à cette heure-ci ? demande-t-il en tirant une longue bouffée.

Il a fallu du temps avant que Carlos accepte que je reprenne activement part aux missions. Il ne me fait toujours pas confiance et profite de chaque occasion pour me questionner sur mes faits et gestes.

Je suis surpris qu'il ne m'ait pas fait suivre hier. J'avais envisagé cette possibilité, mais rien n'indique qu'il sait que j'ai revu Madeleine dans la soirée. J'ai envoyé Renato vérifier que Madeleine était toujours en sécurité avec le gang des motards, et il m'a certifié qu'elle se portait bien. Même si Carlos se doute de quelque chose, il ne suppose pas qu'il s'agisse de Madeleine, sinon il serait déjà parti la chercher. Et ça, je ne pourrais pas le permettre.

— Venderpots, je réponds en me levant, faisant grincer la chaise sur le parquet. Il m'a demandé une rencontre il y a plusieurs jours, mais je ne suis pas certain de ce qu'il attend.

Carlos écrase sa cigarette sur son cendrier, hochant lentement la tête.

— Fais en sorte qu'il ne cause pas trop de problèmes, Matteo. Nous n'en avons pas besoin en ce moment.

Les récentes attaques contre l'organisation ont mis tout le monde sur les nerfs, et Carlos est devenu de plus en plus paranoïaque. Nos ennemis n'hésitent plus à attaquer nos territoires les plus protégés, et cette audace pousse les autres gangs à faire de même. Tout le monde sait que Carlos protégera son territoire jusqu'au bout, ne laissant aucun mètre à qui que ce soit.

— Je veillerai à ce qu'il reste à sa place, tu peux me faire confiance.

Les derniers mots sont prononcés avec prudence. Malgré mon comportement exemplaire ces derniers mois, Carlos se méfie toujours de moi. Il fait régulièrement surveiller mes mouvements par certains de ses soldats, et je suspecte même qu'il ait fait placer des micros dans le manoir.

Une part de moi le hait pour ce qu'il m'a fait subir, mais une autre, plus enfouie, refuse de couper ce lien. L'idée même de vivre sans lui me fait suffoquer, comme si mes poumons ne pouvaient plus fonctionner.

Il était tout ce que j'avais connu.

"J'ai été la seule personne à réellement t'aimer, ne l'oublie jamais", m'avait-il dit, alors que j'étais enfermé.

J'ai mis du temps à le comprendre. Même si je refusais de l'accepter, j'ai dû me résoudre à le croire pendant plusieurs mois. Mais hier... ses yeux, son odeur, ses expressions. C'était une torture de rester loin d'elle.

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