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30 mai.

Ruminant dans son lit, Maxime osa demander à Mathis un nouveau somnifère. Un seul, parce qu'il n'osait pas demander le deuxième. Après, il allait le prendre pour un addict alors que tout ce qu'il voulait était dormir. Même s'il fera des cauchemars, ce n'est pas grave. Il préfère en faire les yeux fermés qu'ouvert. Parce qu'après, il les confondrait avec la réalité. Mathis lui donna un cachet avec sa bouteille d'eau. Lorsque Maxime l'avala, il imagina Sidjil le gronder, lui dire que c'était mauvais. Mais que devait-il faire, dans ce cas ? Ne pas dormir pour qu'on lui reproche ses cernes ? Quoi qu'il faisait, on y voyait un reproche. Ou peut-être que c'était tout simplement lui, qui se reprochait le plus. Parce que sa mère ne l'avait jamais appris à faire ses propres choix, et que son père ne lui parlait pas sans une bouchée d'alcool. Parce que le plus grand reproche que Maxime se faisait, c'était d'exister.

Mathis éteignit son ordinateur, se blottissant dans son lit. Comme c'était une journée de cours, il le fit plus tôt qu'à l'habituel. Maxime regarda juste la lumière s'éteindre alors qu'il ne pouvait plus apercevoir le visage de son ami, livré à lui-même. Peut-être que le jeune homme avait peur du noir. Il avait juste peur de ce qui pouvait en sortir. Comme si des mains pouvaient commencer à s'étaler sur son corps sans qu'il ne puisse pousser le moindre son. Comme si Maxime était un objet, député de liberté. Comme s'il pouvait arrêter de parler, parce que de toute manière, cela n'aura pas d'importance. Personne ne l'écoutera.

Il fit un rêve, cette nuit-là. Le genre de rêve que tu n'oublies pas, parce qu'il tourne en boucle dans ton esprit. Il était seul, debout, dans le noir. Tout d'un coup, Sidjil arriva. Maxime commença à s'approcher de lui, mais il ne pouvait pas bouger. Alors il se mit à crier. Aucun son ne sortit de sa bouche. Ses lèvres s'ouvrirent sans rien laisser sortir. Sidjil ne se retourna pas, partant sans même le remarquer. Etait-il si invisible que cela ? Malgré tous ses efforts, Maxime n'aura jamais sa place. Il entendait peut-être toujours Sidjil, mais Sidjil n'arrivait pas à l'entendre. Alors quand les mots ne sortirent pas, les larmes coulèrent. Même dans un rêve, Maxime senti son nez lui picoter jusqu'à ce qu'il renifle, sa gorge se nouer et ses yeux rougirent. Il s'étala par terre, et, pour une fois, ne cacha pas ses larmes.

Il se réveilla en sursaut, avec la sensation de n'avoir jamais arrêté de pleurer. C'était le réveil de Mathis qui l'avait réveillé, pour une fois. C'était toujours cela, quand il faisait un cauchemar. Le seul moment où il dormait longtemps, mais terriblement mal.

Il n'y avait pas de meilleur moyen pour expliquer qu'il commença mal la journée. Il se servit un café au petit déjeuner, et ne croisa pas Renard du matin. Mauvais présage. Mathis ne remarqua rien, mettant sa mauvaise humeur sur le fait qu'il venait de se réveiller, et rien d'autre. Ce n'était pas étonnant, Mathis n'était pas du tout du matin, il n'espérait pas que les autres le soient. Maxime ne vérifia même pas son téléphone, sachant mieux que quiconque qu'il ne recevrait rien. Que de l'espoir détruit. C'était toujours pareil, et cela le tuait. Alors, il préférait ne pas essayer. Pas d'espoirs, pas de déception. Ainsi, la vie avait moins de goût, mais elle faisait aussi moins mal. Depuis quand Maxime avait commencé à se cacher ainsi ? Ce n'était pas que le cauchemar, non. C'était bien plus. C'était depuis qu'il était arrivé ici, à Toulouse, et s'était rendu compte qu'il n'avait personne. Personne ne l'avait appelé. Maxime n'avait pas de famille.

Mathis parla peu, sur le chemin. Il baillait sans cesse, se plaignant du manque de sommeil. Maxime lui répondait que c'était lui qui s'était couché aussi tard et la conversation s'arrêtait là. Il faisait déjà chaud, à huit heures. Le jeune homme mourrait, sous son tee-shirt à manche longue. Seulement, il ne pouvait pas dévoiler le reste ; il n'était pas prêt à affronter tous ces regards de pitié.

Ils arrivèrent tard. Assez tard pour devoir courir pour être à l'heure en cours, seulement ils en avaient aucune envie. Alors ils marchèrent, et Maxime arriva en retard en classe. La porte de la salle n'était pas encore fermée, alors cela allait. Devant, il restait une place vide à côté d'Anastasia. Il avait envie de sourire. Cette dernière se tourna vers lui, les cheveux dorés se retournant dans un mouvement parfait, alors que son dur regard s'adoucit à son contact. Elle lui indiqua de venir vite, ce qu'il fit. Le jeune homme essaya de se faire discret, mais le professeur d'anglais le remarqua.

Passion ecchymose [MaxBiaggiXDjilsi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant