Le visage de l'homme masqué

9 - Enoch Ys

655 mots

Le regard d'Irwin se tourna tout naturellement vers Laszlo, mais il changea vite son avis.

— Angela, commença-t-il, tu veux bien venir avec moi ?

— Bah bien sûr ! Quelle question !

Le dragon se déplaça enfin et la porte s'ouvrit. Irwin et Angela, qui semblait particulièrement fière d'avoir été choisie, traversèrent un rideau de fumée et se retrouvèrent dans une vaste salle vide. Ils allèrent jusqu'au fond, leurs pas résonnant sur le sol métallique, et découvrirent une porte à l'ancienne, en bois avec des gonds de métal lourd. Irwin essaya de la forcer, mais il se rendit compte qu'il n'y avait pas de poignée. Ne parvenant pas à ouvrir la porte, il ouvrit le judas.

En l'ouvrant, il fut surpris de voir un œil bleu un peu éteint le regarder par la feinte, comme si quelqu'un avait collé son visage contre la porte.

— Laissez-nous passer ! ordonna Irwin.

— Je vais vous poser une question, dit une voix encore plus rocailleuse que celle du dragon. Vous n'avez qu'une chance. Si vous avez la bonne réponse vous entrez, et sinon, vous retournez chez vous. Quelle est la pierre que vous devez redouter le plus ?

Angela n'hésita pas.

— Le quartz, dit-elle, le quartz rose. Laissez-nous passer, maintenant.

Et la porte s'ouvrit. Il y avait devant eux un nouveau rideau mais, quand Angela tenta de la traverser, elle n'y parvint pas. Étrangement, Irwin réussit tout à fait facilement.

Devant lui, au centre d'une vaste pièce, un vieil homme était assis sur un trône de pierre.

— Approche-toi, dit-il de sa voix rauque. Je suis incapable de me lever de mon siège, hélas.

— Mais... et l'œil...

— Un simple tour de magie. Approche.

Irwin obéit avec lenteur. Le vieil homme avait une longue barbe et de longs cheveux du blanc le plus pur qui soit, le visage abondamment ridé et ses yeux bleus étaient un peu éteints.

— Qui êtes-vous ? demanda Irwin.

— Je suis Enoch Ys.

— Vous êtes un mage ?

— Un magicien.

— Pourquoi n'avez-vous pas laissé Angela entrer ?

— C'est à toi que je dois donner des réponses. Ton rôle dans cette histoire est très important, Irwin.

— Mais, c'est Leno le... attendez une minute : comment connaissez-vous mon prénom ?

— Je sais de nombreuses choses que tu ignores, assura Enoch Ys. Notamment quelque chose de très important que je dois d'ailleurs t'apprendre.

— Quoi donc ?

— L'un de tes amis est le frère de ton ennemi. Et cet ennemi pourrait bien faire basculer son frère dans le mal. Si c'est le cas, s'il y arrive, alors ton ami est perdu.

— Quel ami ?

Enoch Ys secoua la tête.

— À toi de le découvrir.

— Et mon ennemi ? Est-il au courant ?

— Il l'ignore, et que le Mage d'Améthyste fasse qu'il ne l'apprenne jamais.

— Vous ne pouvez vraiment rien me dire de plus ?

— Non. Tu dois t'en aller à présent.

— Mais...

— Va-t-en. Et fais attention.

Irwin fut brusquement poussé en arrière et atterrit à côté d'Angela, toussant et suffoquant.

— Tout va bien ? s'enquit-elle.

Irwin répondit par un sourire timide. Il essaya ensuite de pousser la porte, mais elle ne céda, et le judas résista lorsqu'il tenta de l'ouvrir, le tout sous l'œil intrigué d'Angela.

— On y va, décida Irwin.

Une fois qu'ils eurent traversé la salle et le rideau de fumée, ils virent que Karel, Laszlo, Pjotr et le dragon étaient en train de converser aimablement.

— Il était très sympathique, finalement, dit Pjotr avec regret sur le chemin du retour.

— Ouais, fit Karel, n'empêche qu'on aurait pu tous passer beaucoup plus facilement si on lui avait donné un bon coup de pied dans le...

— Oh, pitié, le supplia Laszlo. Je déteste quand les gens disent « je te l'avais bien dit ». C'est comme forcer quelqu'un à boire avec son nez, puis au final lui dire qu'il aurait pu utiliser sa bouche. 

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