Chapitre 10

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Le lendemain, Rose et moi nous réveillons presque en même temps. Je baille en m'étirant et je sens que mon visage a bien dégonflé. Je ne peux m'empêcher d'être reconnaissante envers le Macchabé. Rose est encore un peu faible, alors je l'aide autant que je peux à se mettre debout, puis nous sortons de la tente en nous tenant par le bras. Le Borgne est encore assit à la même place que cette nuit, quand je l'ai vu près du feu, et je me demande s'il a pu dormir ne serait-ce qu'un peu. Il ne nous regarde pas quand nous nous asseyons, son unique œil gris fixé sur le feu qui danse et lèche le fond de la casserole positionnée au-dessus.

— Du café ? nous propose gentiment le Macchabé, en souriant. Se souvenant de son goût ignoble, je me contente de refuser poliment. Pourtant un café m'aurait fait grand bien.

— Tenez, du pain ! La Tempête me tend la nourriture avec sa main mécanique. Je ne peux réprimer mon sourire en le voyant si à l'aise avec. Il me fait un rapide clin d'œil en me souriant à son tour avec malice.

— Mange, et tu rentreras chez toi.

Je sursaute. Je ne m'attendais pas à ce que Le Borgne parle. Je me retourne vers lui et vois qu'il s'adresse à Rose. Elle le regarde, étonnée. Elle avale son morceau de pain avant de répondre :

— Et Helena ?

C'est vrai que cette phrase ne s'adresse pas du tout à moi par contre. Mon retour à Canyon n'est apparemment pas prévu pour tout de suite. Je me tais en les balayant tout les deux du regard.

— Je dois voir deux, trois choses avec elle.

Je grimace. Il parle comme si je n'étais pas là, et j'ai horreur de ça.

— Non, hors de question ! S'énerve soudainement Rose en balançant son morceau de pain par terre.

Je suis surprise par son comportement. Elle porte encore les stigmates de notre captivité. Son regard n'est vraiment plus le même. J'ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais je n'ai pas le temps de prononcer le moindre mot, Rose me coupe.

— Quand je vois dans quel état vous nous l'avez rendu la dernière fois ! Je ne laisserais pas ça se reproduire ! continue la petite blonde, avec un répondant complétement nouveau.

Rose n'est pas du tout du genre à parler comme ça avec des personnes qu'elle ne connaît à peine.

— Je suis au courant pour la dernière fois. Les responsables ont été punis.

Il parlait toujours avec ce ton calme et posé. Je rongeais mon frein de les voir parler de moi alors que je suis là. Je prends alors la parole :

— Si vous voulez que je termine la prothèse de La Tempête, je le ferai.

Je me suis promis que si je les recroisais, je le ferais. Le fait de pas avoir pu la terminer m'avait hanté presque autant que la présumée mort de l'homme qui se tient face à moi. Je déteste le travail inachevé. Rose me regarde, bouche bée, complétement estomaquée.

— Mais... Helena... balbutie-t-elle.

— Ca va aller Rose, tu vas rentrer, et tu ne parleras pas de Le Borgne, juste de Nick, et c'est tout. Je termine ce que j'ai à faire ici, et je te rejoins, promis.

Elle ne me répond pas, mais ses yeux se remplissent de larmes. Avec ce que nous avons vécu, je comprends sa peur. Mais je me suis faite une promesse. Et je dois parler au chef du gang. J'ai besoin de lui parler de ce que je lui ai fait.

Le Borgne s'agite en face de moi, la mine renfrognée, comme gêné de pas être celui qui donne les ordres. Ou gêné que je sois celle qui demande à mon amie de mentir pour les protéger. Rose ouvre la bouche pour protester, mais la referme aussitôt.

Les Forgeurs de Monde: T2 La Pierre et le SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant