Chapitre 6

35 8 0
                                    

Minho

— Minho...

Je sursaute dans l'obscurité et me tourne vers la forme sombre qui se tient à quelques pas de moi. La lampe torche de mon téléphone étant tournée vers ce que je fais, à savoir étaler par terre les différents éléments de notre tente à monter, je ne reconnais Bangchan qu'à sa voix.

— Tu dois être épuisé ! s'exclame ce dernier en se rapprochant encore.

Je hausse les épaules, gêné. C'est vrai. Épuisé, je le suis. Devoir gérer et coucher les enfants m'a achevé. Mais je me sens surtout piteux de ne pas avoir terminé la tâche qui m'était dévolue. Tâche pour laquelle je me suis, en prime, porté volontaire. Comme un idiot un peu présomptueux, sans doute, j'imaginais que mon habitude du camping me ferait achever de monter le campement complet avant la nuit.

J'en suis si loin... Oui, j'ai honte. Je suis gêné de ne pas avoir été à la hauteur.

— Désolé, j'ai été moins efficace que je le pensais, avoué-je à notre directeur. Je me dépêche de monter celle-là pour que Felix puisse dormir confortablement.

Si ça ne tenait qu'à moi, je me serais endormi dans mon sac de couchage à même le sol, sitôt mon groupe de gamins jeté dans ses tentes dédiées. Il a beau faire froid, maintenant, j'ai connu pire pendant mes vacances à la montagne, en Corée.

— Oh non ! réplique Bangchan, un sourire bienveillant dans la voix. Je viens de croiser Felix pendant ma dernière ronde avant de dormir. Laisse votre tente tranquille, vous la finirez demain. Vous allez dormir dans l'infirmerie tous les deux. Vous l'avez bien mérité. Non seulement toutes les tentes des enfants et des autres accompagnateurs sont montées, mais vous avez aussi gonflé tous les matelas ! Tout le monde est couché, sauf vous deux... et moi. Donc, pose tout ça, et file à l'infirmerie.

Surpris, je reste une longue seconde à fixer son ombre sans visage.

— Ah..., finis-je par lâcher sans trop savoir quoi dire.

Enfin, si. Je sais quoi dire, mais je ne sais pas comment.

Merci !

— D'accord, marmonné-je seulement.

— Je crois que Felix a déjà ramené tes sacs là-bas, donc dépêche-toi d'aller te coucher. Nous nous voyons demain, d'accord ?

Je hoche la tête. Je ne sais pas s'il voit le mouvement, mais je suis soudain trop las pour doubler mon assentiment de la voix. Probablement que si, si j'en crois la main qu'il abat doucement sur mon épaule pour la tapoter.

— Et, Minho... Bon travail, aujourd'hui ! Allez, va te reposer ! À demain !

Je ne suis pas convaincu de mériter ses mots, sa confiance ou la gentillesse qui résonne dans sa voix. Mais je me promets de faire mieux demain.

J'écoute les pas de Bangchan décroître dans l'herbe, vois son ombre s'estomper, comme avalée par la nuit, et demeure un instant immobile, silencieux, planté là.

Dormir à l'infirmerie. Au chaud. Dans un vrai lit !

Ah le bonheur !!!

Je range mes outils, remets tout le barda dans les sacs de transport puis ferme mes doigts engourdis sur mon téléphone. Je garde la lampe torche allumée, histoire d'éclairer mon avancée. Je suis tellement fatigué que je titube et trébuche sur le moindre brin d'herbe ; il ne manquerait plus que je tombe dans le noir... je suis si épuisé que je serai capable alors de me rouler en roule pour dormir là.

À mesure que j'approche du bâtiment en dur dont la fenêtre laisse filtrer une lumière chaude malgré des rideaux clairs, je sens monter en moi une certaine nervosité. Sans doute que je prends réellement conscience, seulement maintenant, que je vais dormir juste à côté de Felix... loin de tous les autres membres de notre groupe.

𝕊𝕙𝕚𝕟𝕖 for me (ℳ𝒾𝓃𝓁𝒾𝓍 )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant