𝕊𝕙𝕚𝕟𝕖 for me (ℳ𝒾𝓃𝓁𝒾𝓍 )

Chapitre 17

Felix

Je ne peux plus reculer. Je dois assumer. M'excuser, peut-être ? Lui expliquer, au moins. Peut-être qu'il s'en fiche de son côté, mais moi, ça m'obnubile beaucoup trop. Et je ne veux pas qu'un malaise s'installe entre nous alors que nous commençons seulement à nous entendre. Un peu.

Sangchan m'a donné une occasion en or pour gagner un peu de temps, tout à l'heure. Sauf que c'est fini, maintenant, et je me retrouve à sourire pour cacher l'angoisse qui me torpille le ventre.

Je fais quoi, je fais quoi je fais quoi ?

Je déteste laisser des non-dits ou des situations conflictuelles s'envenimer sans rien faire. Depuis toujours, je suis allé sans hésitation à la confrontation pour trouver un terrain d'entente, mais avec Minho... avec Minho, ce n'est pas si facile.

Il envoie Minbok rejoindre Sangchan aux toilettes, se racle la gorge avant de me lancer un "Salut, bien dormi" un peu timide.

— Oui... merci pour la couverture.

— De rien. Tu grelottais. Je peux pas laisser un... collègue grelotter : j'ai pas envie de gérer les jaunes tout seul.

Il enfouit ses mains dans ses poches, évite ostensiblement de croiser mon regard.

Lance-toi, Felix !

— Au fait...

— Hm ?

— Hier...

Il frémit. Détourne les yeux qu'il venait de poser sur moi... et je me dégonfle.

— Il s'est passé quoi à la réunion ? Parce que Sangchan m'a parlé de poissons, mais la visite à la ferme était prévue demain, non ? Pour éviter aux enfants de marcher longtemps deux jours de suite...

Minho expire longuement, comme s'il retenait son souffle depuis plusieurs minutes.

— Oh, ça ! Je croyais que tu voulais parler de... non rien. Les poissons. C'est à cause de la météo. Demain, il pleut. BangChan a préféré faire la sortie aujourd'hui. Il a appelé la ferme salmonicole, la compagnie de ferry et tout est OK pour qu'on y aille aujourd'hui. Les grands iront à pied jusqu'à Lochranza, mais les deux groupes de petits prendront les bus de l'île, l'arrêt est à un quart d'heure d'ici, ça devrait aller pour eux. Du coup, on mangera plus tôt, à 11 h, et en attendant, c'est atelier perles et bracelets macramé jusqu'à 10 h 30. Voilà, tu sais tout.

Son débit me donne le tournis. Il ne m'a pas informé, il m'a mitraillé de mots.

— Bon, du coup, j'ai pas besoin d'attendre le gosse, si ? Non. À toute.

Et il tourne les talons. Si je le laisse partir maintenant, je n'aurais plus l'occasion de lui parler avant ce soir et ça, c'est hors de question.

— Minho, attends !

Il se fige. Je le rejoins en quelques pas après avoir vérifié que les enfants ne revenaient pas.

— Hier... je suis désolé pour ce que j'ai dit. Enfin, je ne suis pas désolé, parce que tu es beau, et que tu étais beau, mais je suis désolé si tu l'as mal pris. C'était pas le but. C'était juste que... le chaton t'as transcendé, et même si tu es toujours beau, esthétiquement parlant, là c'était différent. Comme si ton toi intérieur se dévoilait et... et je dis n'importe quoi. Juste, oublie, OK ? Je veux pas que ça mette de malaise entre nous. Comme pour le "J'ai jamais voulu être ton ami", c'était pas ce que je voulais dire, mais... ouais, non, ça c'est trop tôt.

Je secoue la tête, contrarié. C'est à mon tour de parler trop vite, sauf qu'en prime, je m'embrouille. Lui me dévisage, bouche bée, battant des paupières.