Une très longue journée . 01

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Tous les personnages comptent dans cette histoire.

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Pierre . 01


Pierre, ce jour-là, avait passé sa journée entre bâillements et léthargie partielle. Cela faisait plusieurs semaines qu'il flottait dans cet état, une sorte de sommeil éveillé. Les journées s'étiraient interminablement dans leur appartement trop petit, avec pour seule distraction les bruits du quartier ou les messages d'Alice. Il ne savait plus trop ce qu'il attendait, si ce n'était que le temps passe plus vite.

Depuis six mois qu'ils étaient en région Île-de-France, Pierre avait l'impression de stagner. Il n'avait pas imaginé que leur vie serait soudainement transformée en quittant leur village, mais il ne s'attendait pas non plus à ce que ce soit aussi compliqué ici. Ni lui ni Alice n'avaient de grandes attentes en arrivant, mais la réalité les avait rattrapés bien plus vite qu'ils ne l'auraient cru.

Le jeune homme de dix-huit ans bailla encore, en regardant son téléphone qui vibrait. Un message d'Alice. Il l'ouvrit sans trop réfléchir.

D'Alice : « Je repasse à l'appart avant de voir Charles, ce soir.»

Pierre esquissa un sourire.

Charles, ce type bien sous tous rapports. Il n'était pas du genre à provoquer chez Pierre des doutes ou de la jalousie. Au contraire, Charles semblait avoir un effet apaisant sur Alice, et Pierre l'appréciait pour ça. Cela ne faisait que trois semaines qu'ils se fréquentaient, mais Alice, toujours si prudente, commençait à se détendre en sa présence. Ce n'était pas encore de l'amour, mais Pierre voyait bien qu'elle s'attachait à lui, et ça lui faisait plaisir. Voir Alice un peu plus sereine, c'était tout ce qui comptait.

Pierre s'apprêtait à répondre un banal « ok » quand un autre message arriva presque aussitôt.

D'Alice : « J'ai pas envie de lui dire ça. C'est de ta faute Pierre et tu me gonfles à être aussi raisonnable. »

Pierre éclata de rire, un son qui résonna étrangement dans le silence de l'appartement.

De Pierre : « Ça fait trois semaines que tu le fréquentes et à aucun moment t'as ken avec lui. Il va bien finir par comprendre que c'est pas logique que tu sois enceinte. »

D'Alice : « L'opération du Saint-Esprit Pierre ! Tu connais ? »

Pierre secoua la tête, toujours amusé. Alice avait ce don de plaisanter sur tout, même quand la situation était plus délicate. Il savait bien qu'elle n'était pas encore tout à fait à l'aise avec l'idée de parler de certaines choses à Charles, mais Pierre ne doutait pas qu'elle finirait par le faire. Alice n'était pas du genre à cacher ce qu'elle ressentait quand elle faisait confiance à quelqu'un.

De Pierre : « Arrête tes conneries. T'aimes bien ce mec. Sois honnête avec lui. Et puis, ça s'est passé avant vous deux. Si vous devez construire quelque chose, autant que ce soit sur des bases solides. »

D'Alice : « Dixit le mec qui veut jamais être en couple et qui, pour communiquer avec moi sur le canapé, fait des bruits bizarres. »

Pierre éclata de rire à nouveau. Alice le taquinait souvent sur son refus de s'engager, mais ce n'était jamais méchant. Elle connaissait ses raisons, et cela ne le dérangeait pas qu'elle plaisante à ce sujet. Au contraire, cette légèreté faisait partie de leur dynamique. Leur complicité était une évidence, une relation où tout pouvait être dit sans jamais devenir pesant.

De Pierre : « Tu ne me mérites pas donc je vais plus répondre à tes messages. »

Il envoya la réponse en souriant, avant de balancer son téléphone sur le canapé. Se levant, il se dirigea vers la cuisine dans l'espoir de trouver quelque chose à grignoter, mais le frigo était aussi vide que son emploi du temps. Il soupira en fermant la porte, imaginant un seau de poulet frit qui lui aurait fait oublier, ne serait-ce qu'un instant, cette sensation de vide.

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