Chapitre 3

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— Je t'avais pourtant dit que tu n'aurais pas dû travailler. C'était trop précipité souffle Leah

Je grimace, une vive douleur transperce mes côtes. Je ne m'étais pas rendu compte à quel point rester debout toute une soirée  allait me faire souffrir.
— Je pensais qu'en évitant les talons, ça irait mieux, dis-je en soupirant.

J'avale l'antidouleur que je tiens au creux de ma main, espérant un soulagement rapide.
— Si j'avais su... En plus, le nouveau patron m'a bien fait comprendre qu'il me surveillait. Franchement, ça ne pouvait pas tomber pire.
— Je lui dirai que tu n'as pas pu te présenter. Dans ton état, tu ne peux clairement pas retourner bosser.
— Non, laisse tomber. J'ai déjà fait mauvaise impression. Je prendrai juste ma dose d'antidouleur.

Je ne peux pas me permettre de m'arrêter alors que j'étais absente quasi un mois entier. J'ai une voiture à acheter – la mienne est à la casse à cause de l'accident – et un loyer à payer. Carl nous a trouvé un super appartement, mais le souci, c'est qu'on est payés en liquide. Négocier avec les propriétaires pour les paiements en espèces est presque impossible, alors le propriétaire nous propose un loyer indécent de 2800 $. Heureusement que le strip paye bien.

— T'inquiète pas va. Plus que ce soir et demain et j'aurais le week-end pour me reposer.

J'avale rapidement un deuxième verre d'eau et ferme les paupières, espérant que la douleur s'atténuera bientôt.

Il est 22h lorsque nous arrivons au Piano. La journée du 3 septembre touche à sa fin, et pourtant, rien ne s'est passé. Un étrange mélange de soulagement et de frustration m'envahit. Je me sens idiote d'avoir monté tout un scénario autour de cette date. Peut-être que j'ai imaginé cet homme et son tatouage, à cause du choc à la tête. Pourtant, une partie de moi reste convaincue : je l'ai bien entendu crier mon prénom...

— Les filles, nous appelle la voix de Candy. Le patron nous attend en salle. Il ne manque plus que vous.

Nous la suivons, et une vague d'étonnement mêlé à de l'incompréhension me submerge dès que nous passons la porte. Tout le monde est là.

Six hommes, aussi imposants que des armoires à glace, entourent le patron. Il est assis nonchalamment sur le banc, dos au piano qui trône sur la scène, à côté des barres de strip-tease — ce même piano qui a donné son nom au bar. Une aura virile et irrésistible émane de lui, et je me déteste de le trouver aussi séduisant. Les néons qui dansent sur son visage lui donnent une allure sensuelle, presque diabolique, rendant la situation encore plus troublante. Mon cœur s'emballe quand je réalise que les hommes qui l'accompagnent sont armés.

Qui sont-ils ? À leurs côtés, une blonde sculpturale, aux seins opulents qui feraient pâlir Lolo Ferrari, se tient près de Carl. Le regard du nouveau boss balaie la salle avant de se poser sur Leah et moi. Alors que nous nous asseyons près des autres, autour d'une des nombreuses tables où s'installent d'ordinaire les clients, il prend enfin la parole.

— Bien. Je crois que tout le monde est là.

Il marque une pause, puis reprend :

— Comme vous avez dû le comprendre, Carl prend une retraite anticipée.

Il pose une main condescendante sur l'épaule de Carl, un sourire narquois aux lèvres.

— Je suis passé hier soir pour régler quelques détails et observer le fonctionnement de cet établissement. Il est évident que des changements s'imposent. Si, avec votre ancien patron, vous aviez l'impression d'être chez mamie, sachez que je ne suis pas Carl.

Son ton glacial laisse entrevoir une menace à peine voilée, et l'atmosphère devient lourde, pesante. Les regards s'échangent, chargés d'incertitude et de questions.

3.9.2025Où les histoires vivent. Découvrez maintenant