Chapitre 4

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« Comment ? » C'est la seule chose qui parvient à franchir mes lèvres tant l'angoisse m'a envahie.

— Tu en fais une tête, City, me lance-t-il avec un sourire narquois. Il appuie lourdement sur mon prénom, comme s'il savait à quel point cela me déstabilise.

— J'ai fait des recherches sur chacun de vous. Il n'existe pas de Sofia Lopes correspondant à ta description avant ces deux dernières années, alors je me suis intéressé à ton amie Leah Clarkson. Pas besoin d'être au FBI pour comprendre qui tu es, City Mendez. conclut-il avec une froide assurance.

Deux émotions s'entrechoquent en moi : le soulagement, parce que s'il dit vrai, cela signifie qu'il n'a aucun lien avec Christian. Et la panique, parce qu'il vient de dévoiler ce que j'ai soigneusement caché pendant deux longues années. Qui sait ce qu'il a découvert d'autre ?

— S'il vous plaît, ne m'appelez plus comme ça... dis-je dans un souffle.

— Tu commences déjà à me demander des faveurs, City ? ironise-t-il, un rictus déformant ses lèvres. Sache une chose : je ne fais jamais rien gratuitement.

Je serre les dents pour ne pas réagir. Je déteste le chantage, mais je n'ai aucune marge de manœuvre ici. Ce type est trop dangereux, et je ne connais encore que la surface de ce qu'il est capable de faire.

— Je ne participerai pas à ce jeu de chantage quand je n'ai aucun pion et que c'est vous qui dictez les règles. Appelez-moi comme vous voulez, dis-je, en tentant de dégager une assurance que je ne ressens pas.

J'ai la terrible impression que s'il perçoit la moindre faille en moi, il s'y engouffrera sans hésiter.

Son large sourire s'étire davantage, dévoilant une rangée de dents parfaitement blanches. Comme si ça ne suffisait pas, il fallait qu'il ait en plus un sourire impeccable. Je déglutis alors qu'il continue de me fixer, sondant mon visage comme s'il cherchait à y lire chacun de mes secrets.

— Tu es bien sage. Pour moi, tu ne seras ni City, ni Sofia, mais... Il marque une pause, puis, avec un ton moqueur, ajoute : mon ange.

Il prononce ces deux derniers mots avec une douceur étrange qui me déconcerte. Un instant, il semble lui-même surpris par la tournure de sa phrase. Mais avant que je puisse répondre, il tourne les talons et s'éloigne, comme si cette conversation n'avait jamais eu lieu.

"Mon ange"... C'est ainsi qu'Anton m'appelait. Mon regard se pose machinalement sur le bracelet à mon poignet, une bouffée de souvenirs douloureux remontant à la surface.
Putain. Putain. Putain. En soi, est-ce si grave qu'il connaisse mon vrai prénom ? Ici, ils penseront sûrement que c'est juste un nom de scène. Je n'utilise jamais de carte de crédit, je paie tout en liquide, et City Mendez a disparu des radars depuis que je me suis installée dans cette ville. Personne ici ne fait le lien avec New York, et il y a plus de 4700 kilomètres et 43 heures de route non-stop qui me séparent de la Grosse Pomme. J'essaie de me rassurer, mais le visage de Christian Clarke s'impose dans mon esprit, déclenchant une vague d'angoisse oppressante. Je le sens, il me cherche encore. Il ne me lâchera pas. Ce qu'il a avec Paul semble si important que je suis certaine que Paul est aussi à ma recherche.

« Je t'ai nourrie et logée presque toute ta vie, pro bono, et ce n'était pas que pour le joli petit cul de ta mère. Ne me prends pas pour un con, City. Tu vas épouser ce type. C'est un bon parti », m'avait-il dit avec ce ton tranchant dont il avait le secret.

Je suis tirée de mes pensées par la voix de Nina, assise au bar en train de discuter avec Lola, une rousse aux boucles désordonnées.

— Fais le calcul, on est 23 employées, selon les soirs. Ça fait 46 000 $ ! Cet homme est riche comme Crésus. Si ses clients sont aussi fortunés que lui, ça nous changera de repartir avec seulement notre fixe ou ces pauvres 200 dollars qu'on gagne à la sueur de notre front, s'exclame Nina, les yeux pétillants.

3.9.2025Où les histoires vivent. Découvrez maintenant