Chapitre XIV : Adieu

12 2 0
                                    

Music/ Low Life - the weekend

Hina



Après avoir fuis Soichiro, je parviens à me frayer un chemin jusqu'à l'endroit qui me sers de refuge.
Un petit appartement exiguë, dans un quartier malfamé. Le lit trône au centre de cette unique pièce, entouré d'une simple commode. La baie vitrée laisse un léger aperçu sur le monde extérieur, seule source de réconfort dans cet environnement malsain.

Je me traîne jusqu'au lit et me laisse tomber mollement sur le matelas en gémissant de douleur. Carapace Kaiju ou non, mon corps n'est pas en mesure d'endurer un rythme aussi soutenu. Des bleus recouvrent ma peau, des plaies purulentes se forment progressivement là où la carapace de Freyja s'accroche.
Je laisse glisser mes doigts sur ma combinaison pour la retirer, le sang séché collant  encore à ma peau. La sueur et la crasse n'aidant en rien, je serre les dents et avec le peu de patience que je dispose, parviens à enlever la combinaison qui vient s'écraser sur le sol dans un bruit sourd.

Hina. Souffle Freyja de sa voix rauque.

La ferme, je ne veux plus t'entendre.

Elle ricane et reprends :

Tu ne peux pas me fuir éternellement, ma petite. N'oublie pas, tu m'as créé. Je suis toi et tu es moi.

Ça a été la plus grosse connerie de toute ma vie.

Son ricanement se mue en un rire caverneux et sinistre.

Non, et tu le sais. Tu l'as voulu. Jour après jour à dépecer les cadavres de mes semblables, à te greffer des lambeaux de chair et à t'injecter ces cellules sans sourciller une seconde. Et pourquoi ?

Je passe ma main sur mon visage en signe de frustration.

Tu n'as pas à le savoir.

Mais je le sais déjà.

Si tu le sais, alors pourquoi venir m'emmerder avec ça ?

Parce que tu ne l'avoueras jamais à voix haute et surtout parce que, tu dois accepter ce que tu es devenu.

Je grogne en me tournant sur le matelas.

Ne commence pas, tu me fatigues.

Tu sais que tu as un problème et tu refuses de l'affronter. Cette transformation t'as tellement chamboulé que tu m'as créé de toute pièce dans ton esprit pour alléger ta mauvaise conscience. Pauvre idiote, tu sais que je n'existe pas et pourtant tu t'entête à rejeter tes fautes sur moi. Pourquoi ? Tu as trop honte de te regarder dans un miroir ? Le sang que tu as sur les mains ne partira jamais, fais toi une raison. Tu es la seule et unique coupable.

La ferme ! Ferme la ! Tu ne sais rien ! J'ai enduré tellement de choses, je ...

Peut-être, mais tes crimes ne s'effaceront pas juste parce que « tu as enduré » ces souffrances. Tu te cherches des excuses à longueur de journée pour pardonner tes actes répréhensibles, mais tu sais quoi ? J'ai un scoop. Ça ne marche pas. La culpabilité reste ancrée au fond de toi comme un parasite. Tu es incapable d'assumer que toutes ces morts, c'est toi qui les a provoqué. Nous sommes les deux faces d'une même pièce.

Ma mâchoire se contracte. Le déni est évident, je suis consciente de tout ça mais comment arriver à me pardonner ? Qui le pourra ?
Ces familles en deuil et ces démons qui me hantent refusent de me laisser le moindre répit.

Qui te pardonnera ? Ton vice capitaine ? Tu t'es entiché de lui au point où tu t'imagines peut-être qu'il verra au delà du monstre que tu es devenue. Ma pauvre fille, tu es bien naïve. Tu penses qu'il t'apprécie ? Tu penses qu'il ressens quelque chose pour toi ?

Lentement, des larmes coulent le long de mes joues, venant inonder silencieusement l'oreiller. Mon cœur se serre douloureusement dans ma poitrine, comprimant ma cage thoracique et m'empêchant de respirer. J'ouvre la bouche, un cri silencieux se fige sur mes lèvres. Mes pleurs sont vite étouffés par la douleur qui irradie dans mon corps.

Tu vois ? Tu es faible et pathétique. Pleurnicher, toujours pleurnicher sur ton sort. Tu n'es rien de plus qu'une faiblarde, incapable de porter ce fardeau que tu as toi-même choisi de porter.

Ta gueule ... la ferme.

Pourquoi ? Ai-je tord ? Tu sais bien que non. Je suis toi, Hina.

Tu es peut-être dans mon esprit, tu es peut-être le simple fruit de mon imagination mais n'oublie pas que tu as aucun pouvoir.

Elle ricane.

Ah oui ? Pourtant, à chaque moment de doute tu n'hésite pas à te laisser submerger par tes émotions. Tu n'es plus capable de distinguer le bien du mal. Un jour, même ton vice capitaine mourra de ta main.

Non ...

Oh ?

Une puissante vague de douleur me submerge, obligeant mon corps a se contorsionner dans un angle impossible. Mon sang bat dans mes tempes, mon rythme cardiaque accélère.
Je sens la présence écrasante des cellules Kaiju sous ma peau, elles deviennent incontrôlables. Elles se mêlent à mes propres cellules, les dévorants les unes après les autres.

A-arrête ça

Reprend le contrôle. Prouve moi que je ne suis rien d'autre qu'une créature inventée. Montre moi que tu la seule à posséder ce corps.

Ma mâchoire se contracte à l'extrême, mes doigts agrippent les draps alors que je me tords en gémissant.

- dé ... gage. Ma voix est faible et hachurée.

Un rire sinistre résonne dans ma tête.

- rend moi, mon corps !

La bataille est acharnée, Freyja ne se laisse pas dominer aussi facilement. Je la repousse, tentant de l'emprisonner dans un coin de mon esprit.

- Dégage ! Je ne suis pas une marionnette ! Je suis maîtresse de mes choix. Peu importe ce que ça sera, je les assumerai jusqu'au bout, quitte à devenir l'ennemi de tous ! Mais je refuse de te laisser me dicter ma conduite !

Les assauts des cellules Kaiju se stoppent.

En es-tu sûr ?

Certaine.

Même si elle n'est présente que dans ma tête, je sens un léger sourire.

Alors, tu n'as plus besoin de moi.

Freyja ...

Même si sa présence a rendue ma vie difficile, j'ai la sensation qu'une partie de moi m'ait arrachée. Je la déteste mais, sa présence m'apportait un certain réconfort. Je n'étais pas seule.

Tu n'es pas seule, Hina. Tu ne l'a jamais été.

Adieu, Freyja.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Oct 06 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Desperate Heresy  - Soshiro Hoshina (Kaiju no 8)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant