Chapitre II | Voie 9 ¾ et Poudlard Express

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❝ Il n'y a pas de hasard. Il n'y a que des rendez-vous. ❞
— Paul Eluard

La gare de King's Cross était toujours aussi bondée, surtout en ce 1er septembre 1971. En plus des Moldus qui s'activaient pour arriver là où ils devaient être à l'heure, des familles sorcières se déplaçaient ici et là en direction des voies 9 et 10. Les chariots à bagage attiraient quelques regards confus, principalement à cause des balais ou des chouettes et hiboux enfermés dans les cages. La plupart des Moldus avaient fini par trouver cela normal, assistant à cet étrange spectacle chaque 1er septembre.

Pour cette première rentrée, Lily était venue avec la famille de Severus, les parents Evans ne pouvant pas accompagner leur fille à cause de la rentrée de Pétunia. Un peu nerveuse, la rousse ne quittait pas son ami, le suivant comme son ombre jusqu'à la barrière se trouvant entre les voies 9 et 10.

— Si vous avez peur, courez droit devant vous au signal de l'agent du Ministère, indiqua le père du noiraud en montrant le sorcier déguisé en contrôleur moldu.

Les deux enfants hochèrent la tête et, peu après, voilà Severus qui s'élançait en premier, courant de toutes ses forces, disparaissant avant l'impact de son chariot avec la barrière. Lily en ouvrit la bouche de surprise et regarda autour d'elle pour voir les réactions des Moldus. Aucun d'eux n'avait remarqué la disparition du jeune homme, si ce n'était cette métisse qui fixait la barrière avec de grands yeux. A bien y regarder, la fille avait elle aussi un chariot à bagage contenant l'immense malle frappée au blason de la fameuse école de Poudlard - probablement que la métisse était aussi ce que la communauté magique appelait une Née-Moldue. Lily reposa son regard vert sur la barrière, déglutit de nervosité et s'élança à son tour, fermant les yeux au moment de l'impact. Elle eut la désagréable impression de s'enfoncer dans de la mélasse ou de la gélatine jusqu'à se retrouver à l'air libre, rouvrant les yeux pour observer le quai sur lequel elle venait d'arriver, où attendait une locomotive rouge baptisée Poudlard Express.

— Lily, regarde... fit Severus en lui pointant une plaque au-dessus du pan de mur qu'ils venaient de traverser.

La jeune fille leva les yeux et lut le chiffre de la voie : Voie 9 ¾. Pas de doute, ils étaient arrivés à bon port. Et à l'heure si elle en croyait l'horloge qui indiquait qu'il était dix heures et demi.

— Viens, on va chercher de la place dans un compartiment.

Les deux enfants s'éloignèrent sur le quai, croisant une fille qui semblait avoir déjà vêtu son uniforme scolaire dans les tons bleu et bronze, puis des faux jumeaux - la fille observait le Poudlard Express avec un air rêveur tandis que son frère était aussi expressif qu'une pierre tombale un jour ensoleillé. Lily et Severus finirent par monter dans le train, longeant les compartiments en en cherchant un de libre pour poser leurs bagages et s'installer en vu du long voyage qui les attendait.

Dans le premier compartiment, ils furent un peu gênés à cause des regards du groupe d'adolescents de quatorze ans, notamment à cause du garçon qui était déjà grand pour son âge - en plus d'avoir une certaine musculature. La fille à côté de lui leur parut plus sympathique, principalement grâce à son sourire, ses yeux pétillants et son visage rond qui empêcherait n'importe qui de rester énervé plus de vingt-quatre heures.

Dans le deuxième compartiment, ce fut un trio féminin qui occupa la place. Lily reconnut la métisse aperçue sur les quais 9 et 10 un peu plus tôt. Avec elle, se trouvaient une autre métisse - plongée dans un livre sur... le tarot ? - et une fille blanche à l'air renfrogné, qui semblait belle et rebelle, le regard ostensiblement tourné vers l'extérieur pour signifier clairement qu'elle boudait le monde entier.

Dans le troisième compartiment, le mélange fut plutôt curieux, au point que même Severus haussa un sourcil : il y avait la fille en uniforme qui semblait relire ses devoirs, un garçon qui dessinait le coquillage qu'il avait posé sur la tablette de la fenêtre et les faux jumeaux. La sœur observait le coquillage avec fascination tandis que le frère s'était replié dans son coin, celui opposé à la porte du compartiment, comme pour surveiller tout le monde. Il regarda fixement les deux amis, ces derniers se dépêchant de filer, gênés par son regard froid.

Dans le quatrième compartiment, il n'y avait que deux personnes, mais elles semblaient avoir besoin de tout l'espace disponible. Le garçon était allongé sur la banquette de gauche, les bras croisés derrière sa tête et une jambe replié, avec les yeux fermés, comme s'il était bien parti pour faire la sieste. La fille, quant à elle, occupait la banquette de droite en étant assise à la place près de la fenêtre pour lire, son sac à côté d'elle et la cage de transport de son chat à la dernière place. Lily et Severus soupirèrent et continuèrent leur chemin, arrivant bientôt dans les derniers wagons du train.

Le cinquième compartiment fut encore une mauvaise pioche : quatre garçons occupaient l'espace. L'un lisait dans son coin, les jambes repliées vers lui ; un autre semblait réviser ses coups aux échecs sorciers au vu du plateau posé devant lui et du livre dans sa main ; un troisième ne cessait de bouger, semblant à la recherche d'une position confortable ; et le dernier leva les yeux pour observer les deux amis, esquissant un sourire moqueur.

— Qu'est-ce que tu regardes, toi ? intervint Lily en voyant le regard moqueur que lançait le garçon à Severus.

— Lily, laisse tomber, ce n'est pas une bonne idée... marmonna Severus.

La jeune fille se retourna vers son ami, prête à protester tandis que le garçon leur lançait toujours un regard moqueur, visiblement fier de voir que l'un des deux avait compris de quelle famille il venait - une famille que l'on ne voulait pas avoir pour ennemie.

— S'il te plaît, Lily, continua Severus, j'admire ton courage, mais viens, allons nous installer ailleurs...

A contre cœur, la rousse finit par obtempérer et suivit son meilleur ami pour aller tenter leur chance vers les derniers compartiments potentiellement disponibles alors que le train commençait à s'ébranler. Elle se retourna tout de même une dernière fois pour imprimer les traits du visage du garçon moqueur dans sa mémoire, espérant ne pas se retrouver dans la même maison que lui et essayant de comprendre pourquoi Severus l'avait éloignée de ce type. Ce dernier lui lança un dernier regard moqueur avant de se fermer la porte de son compartiment, le train s'ébranlant pour s'éloigner du quai et filer vers Poudlard.

Maraudeurs | T.1 - Des rencontres qui changent une vie | Harry PotterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant