11: Confrontation Intérieur

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Le soleil s'était à peine levé, et l'appartement était encore plongé dans une douce pénombre. Gabriel ouvrit lentement les yeux, se sentant légèrement engourdi par le sommeil mais 

étrangement apaisé. Les événements de la veille lui revenaient par vagues : la plage, les rires avec Elias, le retour à l'appartement, ses vêtements trempés collant à sa peau... C'était une sensation à la fois familière et nouvelle. Ils avaient passé une journée si simple, mais si pleine de vie, et cela faisait longtemps que Gabriel ne s'était pas senti aussi libre.

Elias dormait encore, étendu sur le canapé, une couverture légère remontée jusqu'à ses épaules. Gabriel observa son visage détendu pendant un moment, un léger sourire aux lèvres. C'était comme si, sans qu'il ne s'en rende compte, Elias était parvenu à repousser les ombres qui hantaient Gabriel. Il s'étira lentement avant de se lever pour aller se préparer un café. Mais alors qu'il se dirigeait vers la cuisine, une vague d'inquiétude l'envahit soudainement.

Il pensa au moment où Elias avait proposé de retourner se baigner plus loin dans l'eau. Même si Gabriel avait refusé, il ne pouvait s'empêcher de repenser à la sensation de malaise qui l'avait envahi, et à ce qui en était la cause : ce souvenir du vestiaire, qui continuait de le poursuivre. Malgré les sourires, les blagues et les moments de complicité, quelque chose en lui semblait refuser de lâcher prise.

Il soupira, se servant une tasse de café avant de s'appuyer contre le plan de travail. Le liquide chaud réchauffait ses mains, mais il n'arrivait pas à se détendre. Perdu dans ses pensées, il ne remarqua pas Elias qui se réveillait lentement sur le canapé. Elias le regarda quelques instants, fronçant légèrement les sourcils en voyant l'expression troublée de Gabriel.

— Hey, murmura-t-il d'une voix encore enrouée par le sommeil. Tout va bien ?

Gabriel sursauta légèrement, surpris de voir Elias déjà éveillé. Il tenta un sourire, mais il était évident que quelque chose le tracassait.

— Oui, oui, ça va... Je pensais juste à hier, répondit-il en haussant les épaules.

Elias se redressa, tirant la couverture sur ses genoux, et le fixa, l'air intrigué. Il savait que Gabriel avait tendance à minimiser ses émotions, à les garder pour lui. Mais Elias n'était pas du genre à laisser passer les non-dits.

— Hier, c'était cool, non ? demanda Elias avec un sourire encourageant. On a réussi à se détendre, même si tu as fini trempé.

Gabriel hocha la tête, mais son sourire se fana rapidement. Il baissa les yeux sur sa tasse de café, jouant avec le rebord de celle-ci du bout des doigts. Elias se leva, s'approcha de lui, et posa une main douce mais ferme sur son épaule.

— Gabi... qu'est-ce qui te tracasse ? Tu sais que tu peux m'en parler.

Le ton de la voix d'Elias était calme, apaisant. Gabriel releva les yeux, rencontrant le regard sincère de celui qui se tenait devant lui. Il hésita un moment, pesant ses mots, avant de finalement se décider à parler.

— Quand on était à la plage... j'ai refusé d'enlever mon t-shirt pour une raison, dit-il doucement. C'est pas parce que j'ai honte de mon corps ou quoi, c'est juste... ça m'a rappelé un truc. Quelque chose que je pensais avoir oublié.

Il y eut un instant de silence, Elias attendant patiemment la suite, sans chercher à forcer les choses. Gabriel apprécia cette manière qu'il avait de ne pas le presser, de le laisser prendre son temps.

— Quand j'étais plus jeune, j'ai eu une mauvaise expérience, continua Gabriel, ses yeux fuyant à nouveau ceux d'Elias. Dans un vestiaire, avec d'autres gars. C'était... humiliant. Et depuis, dès que je suis torse nu devant quelqu'un, j'ai l'impression de revivre ça.

Elias sentit une douleur sourde lui serrer le cœur en entendant ces mots. Il savait que les souvenirs pouvaient parfois peser lourd, et il se sentait impuissant face à la détresse de Gabriel. 

Mais il savait aussi que le pire serait de minimiser ce qu'il ressentait.

— Merci de me le dire, répondit-il finalement, sa voix douce mais ferme. Je suis désolé que tu aies eu à vivre ça. Et je ne te forcerai jamais à faire quoi que ce soit avec moi qui te mette mal à l'aise. On prend les choses à ton rythme, d'accord ?

Gabriel se sentit soudainement submergé par une vague de gratitude. Il n'était pas habitué à ce genre de compréhension, à cette patience. La plupart du temps, les gens autour de lui préféraient éviter de parler des sujets qui fâchent, mais Elias n'était pas comme ça. Il se tenait là, présent et sincère, prêt à affronter même les sujets les plus douloureux, simplement parce que cela faisait partie de ce qu'était Gabriel.

— Merci, souffla Gabriel, ses yeux brillants d'émotion. Je ne pensais pas que ce serait aussi difficile de te dire ça.

Elias hocha la tête, un léger sourire aux lèvres.

— Eh bien, tu l'as fait, et ça demande du courage. Et pour ce que ça vaut, je suis content que tu sois là, avec moi, même trempé.

Ils partagèrent un petit rire, qui sembla alléger un peu l'atmosphère. Elias se pencha et posa un baiser léger sur la tempe de Gabriel avant de reculer, lui laissant l'espace dont il avait besoin. Ils restèrent ainsi un moment, côte à côte, sans avoir besoin de dire plus.

La journée se poursuivit tranquillement, chacun vaquant à ses occupations tout en restant dans la même pièce. Ils semblaient avoir trouvé un équilibre, une manière d'être ensemble sans se marcher sur les pieds. Gabriel appréciait cette légèreté, et même si ses pensées revenaient parfois à ses souvenirs, il se sentait plus fort pour les affronter.

Lorsque le soir tomba, Elias proposa d'aller se promener sur la plage. Gabriel hésita un instant, mais finit par accepter. La perspective de revoir la mer l'apaisait, et il savait qu'Elias ne le forcerait à rien. Ils marchèrent côte à côte sur le sable, les vagues caressant leurs pieds nus, et le vent salé jouant dans leurs cheveux. C'était un moment simple, mais incroyablement réparateur.

Alors qu'ils regardaient le soleil se coucher à l'horizon, Gabriel se tourna vers Elias, une expression de sérénité sur son visage.

— Merci de m'avoir écouté, murmura-t-il. Je sais que ce n'est pas toujours facile de parler de ces trucs-là. Mais... avec toi, j'ai l'impression que je peux essayer.

Elias le regarda, et un sourire chaleureux s'étira sur ses lèvres.

— C'est tout ce que je veux, que tu puisses être toi-même, entièrement. Et peu importe le temps que ça prendra, je serai là. On continue, pas vrai ?

Gabriel hocha la tête, sentant une nouvelle vague d'émotions monter en lui. Pour la première fois depuis longtemps, il se sentait prêt à affronter ses démons, parce qu'il savait qu'il n'était plus seul.

— Oui, murmura-t-il. On continue.

Ils restèrent là, les pieds ancrés dans le sable, regardant le ciel s'assombrir peu à peu, mais la lumière qui brillait en eux ne faisait que grandir. Ils avaient encore un long chemin à parcourir, mais pour la première fois, Gabriel se sentait prêt à affronter ce qui les attendait. Ensemble.

Entre Ombres et LumièresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant