El Diablo

Le Jeu des Masques

La nuit s’était installée au-dessus du club des **Hell’s Sons**, et l’air frais de la soirée semblait alourdir l’atmosphère. Le grondement des motos s'était éteint, laissant place à une étrange quiétude. Delilah, ou plutôt **Michaela**, errait dans les couloirs du club, perdue dans ses pensées. Les récentes révélations de son père tournaient en boucle dans son esprit. Elle n’était plus sûre de rien. Tout ce qu’elle avait cru connaître, tout ce qu’elle avait pensé être vrai, s'était révélé n’être que mensonge.

**Swart** l’observait depuis un moment, dissimulé dans l’ombre. Il avait vu les changements subtils dans son comportement ces derniers jours, des regards fuyants, des silences plus longs. Quelque chose pesait lourdement sur elle. Mais il n’était pas du genre à poser des questions frontales. Avec Delilah, il savait que tout était un jeu de masques.

Il la rejoignit finalement dans la grande salle du club, où elle se tenait face à la fenêtre, une cigarette entre les doigts, regardant l'obscurité comme si elle y cherchait des réponses.

« Tu ne dors jamais, hein ? » demanda Swart en s’approchant doucement, sa voix grave mais teintée de douceur.

Delilah ne tourna pas la tête, mais un léger sourire apparut sur ses lèvres. « Toi non plus. »

Il s’approcha encore, s’installant sur une chaise près de la fenêtre, en face d’elle. « C’est pas pareil. J’ai mes démons… mais toi, t’as l’air d’avoir un putain de champ de bataille dans la tête. »

Delilah haussa légèrement les épaules, feignant l’indifférence. « Et si c’était le cas ? Ça changerait quoi ? »

Swart la regarda attentivement, ses yeux bleus perçants cherchant à percer ses défenses. « Ça changerait que je voudrais t’aider à en sortir. »

Elle se mit à rire, un rire sans joie. « M’aider à me sortir de quoi, Swart ? Y’a rien à sortir. »

Il fronça les sourcils, mécontent de la voir encore se cacher derrière ses faux semblants. Depuis qu’elle était arrivée, il avait appris à lire entre les lignes. Il savait que Delilah cachait quelque chose de profond, de dangereux. Mais à chaque fois qu’il tentait de la sonder, elle se fermait. Il était temps de pousser plus loin.

« Tu sais, » commença-t-il lentement, jouant avec un vieux briquet entre ses doigts, « j’ai connu pas mal de filles dans ce monde. Des filles fortes, des filles brisées, des filles qui cherchaient à se reconstruire. Mais toi, t’es différente. » Il posa ses yeux sur elle, espérant capter son attention. « Je sais que t’as pas dit toute la vérité sur toi. »

Delilah se raidit à ces mots, son corps se fermant instinctivement, comme un mécanisme de défense. Elle évita son regard, tirant nerveusement sur sa cigarette. « Tu penses vraiment savoir qui je suis, Swart ? »

« Je pense que t’as menti. » Il la fixa avec insistance, mais sans agressivité. Il voulait qu’elle parle, qu’elle se libère. « Je pense que cette histoire de vengeance, elle est plus complexe que tu le laisses paraître. Et je pense que t’es pas vraiment Delilah. »

À ces mots, Delilah sentit son cœur s’accélérer. Comment pouvait-il savoir ? Comment pouvait-il deviner ce qu’elle-même n’avait découvert que récemment ? Elle serra les poings, essayant de ne pas laisser transparaître son agitation.

« Delilah ou pas, ça change quoi ? Je suis là pour une seule chose : me venger. Ça te suffit pas, ça ? » rétorqua-t-elle avec une pointe de défi.

Swart secoua la tête, son regard toujours aussi perçant. « Non, ça me suffit pas. Parce que je te vois, Delilah. Je vois la douleur, la colère, mais aussi la peur. » Il se leva lentement, s’approchant d’elle avec prudence. « Je sais que t’as un passé plus sombre que ce que tu veux bien dire. Et je sais que t’as été brisée par des hommes comme ceux qu’on traque. Mais ce que je comprends pas, c’est pourquoi t’es encore là, à jouer ce jeu, à cacher qui t’es vraiment. »