Irina

Les Henderson

Irina

La sonnerie stridente déchira le silence de la base, résonnant à travers les couloirs métalliques. Je me réveillai en sursaut, le cœur battant à tout rompre, désorientée.

Pendant quelques secondes, j'eus du mal à comprendre où j'étais, mon esprit encore englué dans les brumes du sommeil. Le réveil digital à côté de mon lit affichait impitoyablement 6h30. Mon corps tout entier protestait. Après la soirée épuisante de la veille, un peu plus de sommeil aurait été un luxe inestimable.

-Cette foutue sonnerie me donne envie de m'enfoncer un couteau dans le crâne, grogna Sarah en s'extirpant brusquement de son lit.

Je la regardai se lever, désordonnée, son visage crispé de fatigue.

-J'en connais une qui n'est pas du matin, murmurais-je avec un sourire taquin.

Mon commentaire eut l'effet escompté. Sarah me lança un regard noir, sa mauvaise humeur encore plus évidente.

- Irina, savoure bien ton dernier jour sur cette terre, parce que je te tuerai dans ton sommeil cette nuit, rétorqua-t-elle, une moue boudeuse sur les lèvres.

Sa menace, à peine sérieuse, m'arracha un sourire amusé. Mais avant que je ne puisse répliquer, la porte de notre chambre s'ouvrit brusquement. Harper fit irruption, déjà apprêtée, vêtue d'un débardeur et d'un pantalon impeccablement ajusté, ses cheveux soigneusement coiffés, comme si elle s'apprêtait à poser pour un magazine de mode. Comment faisait-elle pour être si impeccable, même à cette heure maudite ?

-Tu t'es levée à quelle heure ? demanda Isa d'une voix ensommeillée, en se redressant à peine de son lit, les yeux encore à moitié fermés.

-À cinq heures. Comme tous les jours depuis mes douze ans, répondit Harper avec un ton léger, presque joyeux. C'est une habitude, maintenant. Mon cerveau se réveille tout seul.

Je n'avais jamais rencontré quelqu'un comme Harper. Une machine. Imperturbable et disciplinée. Une adversaire redoutable, c'était certain, mais elle avait aussi un don pour éclairer l'atmosphère pesante de la chambre. Sa présence apportait une étrange vitalité dans cet endroit autrement sinistre.

- Allez, dépêchez-vous, le premier entraînement est à sept heures ! s'exclama-t-elle en tapotant des mains, comme une coach motivante.

Je soupirai en prenant mes affaires. Direction la salle de bain, tout au bout du couloir. Cinq bonnes minutes de marche, à ce rythme, et seulement vingt minutes pour me préparer. Ça allait être serré, mais tant pis, je pourrais me passer de maquillage aujourd'hui.

Une fois prête, je m'empressa de rejoindre le point de rendez-vous, espérant être à l'heure.

-6h55, tu es juste à l'heure, ma chérie, annonça Harper avec un clin d'œil.

-Et Sarah ? demandai-je, intriguée par son absence.

-Elle est restée au lit, répondit Harper nonchalamment, comme si cela n'avait rien d'étonnant.

-Tu aurais dû la forcer à venir ! m'exclamai-je, indignée.

-Je ne suis pas sa mère, répliqua-t-elle en haussant les épaules.

Je poussai un soupir exaspéré. Sarah et son fichu entêtement... Elle tenait plus à son sommeil qu'à tout le reste. Mais Harper me désigna soudain la silhouette familière de Sarah qui s'approchait, toujours à moitié endormie mais présente.

Un sourire rassuré se dessina sur mon visage en la voyant arriver. Sarah était petite, pas plus d'un mètre cinquante-cinq, mais elle dégageait un charisme indéniable avec son carré brun impeccable et ses yeux perçants d'un marron profond. J'admirais son aisance naturelle avec les autres. Avant, j'aurais tout donné pour lui ressembler. Même aujourd'hui, je ne pouvais m'empêcher d'envier ce genre de personne. Mais avec le temps, j'avais appris à accepter mes différences. Mes pensées dérivèrent, jusqu'à ce que Sarah claqua ses doigts devant moi, me ramenant à la réalité.