Le crépuscule drapait la forêt d'une lueur irréelle, baignant les troncs imposants et les branches noueuses d'un éclat rouge-orangé qui s'effaçait lentement dans l'obscurité montante.
Les arbres, jadis protecteurs, se dressaient maintenant comme des géants indifférents, observant en silence la lente procession d'elfes qui glissait entre eux.
Chaque pas sur la terre froide résonnait comme un adieu au monde qu'ils laissaient derrière eux.
Il n'y avait que le silence, pesant, brisé parfois par le souffle du vent qui faisait frémir les dernières feuilles accrochées aux branches.
Les arbres semblaient soupirer avec eux, comme s'ils regrettaient aussi ce lien sacré qui s'effritait peu à peu. Jadis, cette terre résonnait en harmonie avec les elfes, vibrant sous le pas léger de leur peuple.
Aujourd'hui, cette connexion n'était plus qu'un lointain souvenir.
Lyria avançait en tête, droite, le visage impassible, même si la lueur rouge du crépuscule semblait accentuer les ombres sous ses yeux.
Derrière ce masque de calme, elle sentait le poids immense du regard de ceux qui la suivaient. Sa mâchoire était crispée, ses poings serrés, dissimulant un tumulte intérieur qui menaçait de la submerger.
Elle se répétait sans cesse les mots de Galanor : L'espoir réside dans les ténèbres. Mais chaque souffle de vent froid dansait autour d'elle comme une moquerie, murmurant des promesses vides.
Elle pensait à la prophétie. Comment pouvait-elle placer son espoir dans des versets obscurs qui exigeaient une alliance contre-nature ? Chaque pas qu'elle faisait s'accompagnait de cette pensée lancinante : Ai-je pris la bonne décision ?
Les arbres s'épaississaient à mesure qu'ils s'enfonçaient dans la forêt, et Lyria ressentait la terre sous ses pieds avec une acuité douloureuse.
Elle pouvait presque entendre les racines des arbres gémir sous le poids du désespoir de son peuple.
Ces arbres qui autrefois vibraient avec la magie elfique ne lui renvoyaient plus qu'un silence morne. Ce lien sacré qui existait entre les elfes et la forêt s'éteignait, tout comme la magie qui les avait protégés depuis des millénaires.
Les jeunes elfes qui les accompagnaient marchaient avec une résignation presque palpable. Ils étaient plus silencieux que leurs aînés, et pourtant leur douleur était plus criante.
Elwen, l'apprentie guérisseuse, regardait la terre comme si elle cherchait à s'y ancrer une dernière fois, ses pensées tournées vers les blessés qu'elle n'avait pas pu sauver.
Ses mains serraient un bouquet de racines desséchées, vestiges d'un passé où la nature elle-même guérissait les blessures. Maintenant, ces plantes n'étaient que des ombres mortes, tout comme l'espoir qui s'effritait en elle.
Elle se tourna vers une autre jeune elfe, Arya, qui marchait à ses côtés, aussi silencieuse qu'un spectre.
« Crois-tu que nous reverrons ces terres ? » murmura Elwen d'une voix brisée.
Arya ne répondit pas tout de suite. Son regard s'attarda sur les ombres qui se déployaient autour d'elles, semblables à des spectres veillant sur leur dernier voyage.
« Non, » finit-elle par dire, la voix étrangement calme. « Ce qui est perdu ne revient jamais. Nous le savons tous. »
Leurs mots se perdirent dans le vent, mais Lyria, qui marchait quelques pas devant, les entendit.
Elle ferma brièvement les yeux, sentant le poids des sacrifices s'alourdir sur ses épaules.
Et pourtant, je dois les mener vers une nouvelle terre, même si je ne suis pas sûre qu'elle existe, pensa-t-elle.
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L'Héritière et le Prince Noir
FantasyDans un monde où les elfes autrefois immortels voient leur magie s'éteindre, et où les machines humaines réduisent la nature en cendres, Lyria, la dernière héritière d'une noble lignée elfique, doit prendre une décision impensable. Trahie par les a...