Chapitre 8

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One


J'ai mal au crâne, trop mal au crâne.

J'essaie de me redresser, je ne peux pas rester sur le sol crasseux de cette cave.

David est en train de cogner, il cogne sur Tobias...

- Non, crié-je. Arrête!

- One.

Je me redresse difficilement en m'accrochant au mur.

- One.

Je suis complètement vaseuse, ma vision est trouble. Je me dirige droit sur David, perdant l'équilibre à des moments. J'arrive à sa hauteur et attrape son bras, puis je le tire en arrière.

- One !

Je sursaute et mon poing part tout seul sur la personne qui est devant moi. Mais alors que mon poing frappe sa mâchoire, je me rends compte que c'est Mal. C'est parti tout seul, mais il m'a réveillé en plein cauchemar.

Mes mains retrouvent immédiatement ma bouche, les yeux grands ouverts.

- Oh putain, Mal !

La situation me fait un peu rire quand même. Une patate ne fera pas de mal à Monsieur Grincheux. J'ai envie d'en rire, mais aussi, je m'en veux un peu. Surtout quand je vois sa lèvre fendue.

Il me lance un regard noir, les sourcils froncés. Il passe un coup de langue sur sa plaie et moi, j'ai bloqué sur ce geste. Parce que c'était franchement sexy..

Je me gifle mentalement.

Je détourne les yeux et me laisse tomber sur mon siège en passant une main sur mon visage afin de dissiper cette image de lui. Ses lèvres charnues et cette langue, accompagnées de ce regard que, étonnement, je trouvais sexy.

Il sort de la voiture, me faisant constater qu'on est dans un parking. J'enfile mes baskets et sors de la voiture à mon tour.

Je tourne sur moi même et vois Mal qui me regarde depuis le coffre.

- Je te préviens. Je vis avec ma sœur, elle est très très curieuse et un peu intrusive. Alors on ne parle pas d'Allan. Toi et moi, on devient potes devant elle et tout ira bien dans le meilleur du monde.

Il me fixe en attendant une réponse.

C'est compris. Pas d'Allan. On est potes.

Je hoche la tête et croise les bras sur ma poitrine. Il claque le coffre de la voiture, ce qui me fait légèrement sursauter.

Nous traversons le parking, puis passons une porte, là où nous attend un ascenseur.

Respire... Ça va aller...

Je resserre les bras autour de moi.

Tu l'as déjà fait plein de fois, t'as juste à penser à autre chose.

J'ai développé une sorte de petite claustrophobie. Me retrouver dans un petit espace clos est terrifiant et me ramène à de très mauvais souvenirs.

Stress post-traumatique.

J'ai consulté un psy pendant des années. Nous nous sommes exercés, il m'a fait entrer et sortir dans un ascenseur pendant des semaines, tout en restant de plus en plus longtemps à l'intérieur. J'arrive maintenant à gérer une crise de claustrophobie.

Normalement.

Les portes s'ouvrent et nous rentrons. J'inspire une grande bouffée d'air, je me mets derrière lui et ferme les yeux. J'essaie de visualiser des espaces larges, infinis. Je repense à la mer, à tous ces espaces non explorés, que j'avais comparés à moi. C'est clairement le cas. J'ai vécu une vie mouvementée, j'en vis encore une.

Mais je sens mes mains qui commencent à trembler, mon coeur se met à accélérer malgré moi.

J'ai des problèmes traumatiques et la claustrophobie n'est qu'un parmi d'autres. J'ai tendance à faire des crises d'angoisse, sans parler de mes cauchemars. Un simple regard noir peu me provoquer une crise incontrôlable. Voir des enfants souffrir peut aussi m'en provoquer. J'ai tendance à prendre les choses à cœur et à défendre la veuve et l'orphelin.

Je ne supporte pas l'injustice, ni la violence gratuite.

Plutôt ironique pour une tueuse à gages.

J'essaie de me concentrer sur le dos de Mal. J'aimerais qu'il parle là, tout de suite, pour me changer les idées, me faire penser à autre chose. Mais je ne veux pas lui montrer mes faiblesses.

Enfin, le bip retentit. Les portes s'ouvrent, me faisant respirer à nouveau et calmant les palpitations de mon cœur.

Mal sort et je le suis jusqu'à la porte en face de l'ascenseur. Il ouvre la porte, puis me fait signe de rentrer. Une fois à l'intérieur, je découvre un salon très froid.

Les murs sont gris, le parquet en chêne. Il a juste un meuble à chaussures à l'entrée, un canapé noir, une table basse, un écran plat et c'est tout. C'est vide. Il n'y a aucune décoration, aucune photo. Plus épuré, c'est pas possible. Je vois trois portes sur la droite et une cuisine ouverte au fond. J'avance d'un pas mais Mal me retient en posant un doigt sur mon épaule. Il tapote dessus.

- Chaussures.

Je lève les yeux au ciel. Non mais lui, il s'est pas gêné de foutre ses baskets sur mon lit mais moi, je ne peux pas rentrer sans enlever mes chaussures.

Finalement, je crois que le coup de poing n'était pas assez fort.

Il retire son doigt et je me penche pour retirer mes baskets. Il referme la porte, me contourne et va vers la première porte. Une fois mes chaussures enlevées, je fais un pas dans le salon. C'est tellement triste ici. Je vois qu'il y a un grand balcon qui donne sur la tour Eiffel. La vue est magique avec le lever de soleil... Mais je me détourne pour suivre Mal dans ce que je suppose être sa chambre.

C'est identique au salon. Il n'y a rien. Un lit, des tables de chevet vides. Un bureau avec des ordinateurs, une armoire et une porte dans le coin. Voilà sa chambre.

- Et bah je trouve que t'es très expressif en décoration. On voit que t'as du goût.

Je le vois pincer les lèvres.

- T'as le droit de rire à mes vannes pourries. Ça ne va pas te tuer.

Il rigole légèrement sans me regarder puis ouvre l'armoire pour prendre des vêtements. Il ouvre la porte du fond qui doit être sa salle de bain et referme la porte derrière lui.

Je reste debout au milieu de cette chambre sans savoir quoi faire, puis je finis par m'asseoir sur le lit. Dans un soupir, je pose une main sur mon sac.

Il sort en croisant les bras et s'appuie contre le cadre de la porte de la salle de bain. Il a mis un training avec un simple T-shirt noir mais je peux très bien imaginer le corps qui se cache sous ses fringues. On peut le voir à ses bras musclés, ses épaules carrés et ses pectoraux, le tout est parfaitement moulé dans son T-shirt. Sans parler de sa belle gueule...

- Je crois que t'as un peu de bave là. (Il me montre le coin de sa bouche.)

Je plisse les yeux.

- N'importe quoi, dis-je en levant les yeux au ciel.

- Mh, fait-il en hochant la tête. Bon, je te laisse ma chambre, tu ne touches à rien...

- Tu veux que je touche à quoi ? Il n'y a absolument rien dans cette chambre.

Qu'on soit bien d'accord, j'adore fouiner, et j'aurais aimé voir des détails de sa vie pour le connaître un peu plus.

- Peu importe, tu ne touches à rien et surtout pas à mes ordinateurs.

Je hoche la tête.

- Je vais aller dormir sur le canapé. Là, t'as la salle de bain si jamais et je te conseille de dormir un peu.

Il se redresse et sort de la chambre en fermant la porte derrière lui. Je me laisse tomber sur le lit en soupirant.

Ça va être long... 

MALONEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant