Chapitre 3

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Mia.


Le vent frais de l'aube me mord le visage alors que je sors discrètement de la caserne. J'aime ces moments avant que le jour ne se lève, quand tout est encore enveloppé dans l'obscurité et le silence. J'avais l'habitude de faire cela dans mon ancienne caserne.

C'est le seul moment de la journée où je me sens vraiment seule, sans les regards des autres, sans les attentes constantes. Juste moi, le froid, et le ciel encore légèrement étoilé.

Je m'avance jusqu'au bord de la clairière, là où les arbres forment une sorte de barrière naturelle autour du camp. Ici, tout semble figé. Je m'assieds sur une grosse pierre, enfouissant mes mains dans les poches de ma veste. Chaque respiration crée un petit nuage de vapeur devant moi. Je laisse mon esprit vagabonder, mais il revient inévitablement à la veille, aux mots de l'instructeur.

« Ne fais confiance à personne ici, encore moins à tes amis. »

Pourquoi m'a-t-il dit ça ? Et pourquoi se sentirait-il obligé de me prévenir ? Je secoue la tête, chassant ces pensées. Ça ne me concerne probablement pas, il aime juste imposer son autorité. Pourtant, il y avait quelque chose dans son regard. Une sorte d'urgence, ou peut-être... une peur ? Non, c'est ridicule. Un homme comme lui ne montre pas ses faiblesses.

Je me redresse, prête à retourner à l'intérieur quand j'entends des bruits de pas derrière moi. Instinctivement, je me fige. Le rythme des pas est trop mesuré pour appartenir à un camarade d'entraînement encore engourdi par le sommeil. Et je sais, sans même me retourner, qui c'est.

- Soldat Alvarez, vous semblez apprécier sortir sans autorisation, murmure une voix grave, à la fois autoritaire et calme.

Lui. Bien sûr.

Je me retourne lentement, essayant de ne pas trahir le battement irrégulier de mon cœur. Il se tient là, juste à la limite de la lumière faible du camp, les bras croisés sur son torse. Toujours cette posture rigide, ce masque impénétrable. Mais ses yeux... ses yeux me sondent, comme s'il cherchait quelque chose au fond de moi.

- C'est juste un moment de calme avant que tout recommence, je réponds, ma voix un peu trop défensive à mon goût.

Il ne dit rien, se contentant de me fixer. Le silence s'étire, lourd, presque inconfortable. Je me demande un instant s'il va me faire un reproche ou simplement se détourner et repartir.Mais non, il reste là. Immobile. Puis, d'un geste presque imperceptible, il relâche ses bras et avance vers moi, franchissant la distance qui nous sépare avec une lenteur calculée.

- Vous cherchez à éviter les autres, ou vous cherchez à éviter quelque chose d'autre ? demande-t-il finalement.

Je fronce les sourcils, surprise par sa question. Je ne m'attendais pas à ça. Normalement, il se contente d'ordres secs, d'instructions tranchantes. Mais là, c'est... différent.

-J'évite rien, je réponds rapidement, me levant pour ne plus avoir à le regarder depuis ma position assise. Je suis juste... je prends un peu de temps pour moi. C'est tout.

Il incline légèrement la tête, comme s'il analysait mes mots. Son regard me déstabilise. Il a une façon de me regarder qui me fait sentir exposée, comme s'il voyait au-delà de ce que je montre, comme s'il savait que je mens, même si je ne mens pas vraiment.

- Vous devez comprendre une chose, soldat, dit-il en s'approchant encore d'un pas, son ton plus bas mais toujours aussi autoritaire. Ici, il n'y a pas de "temps pour soi". Chaque action, chaque pensée même, fait partie du combat. Le vrai test n'est pas seulement physique. Il est mental. Tout est un jeu de pouvoir. Vous devez être prête, tout le temps.

renegadeWhere stories live. Discover now