Anna
En s'assurant que la voie est libre, Wolf s'engage dans la circulation, ce qui me crispe.
— Tout va bien ? me demande-t-il.
Collée comme une ventouse contre son dos, je hoche la tête. Wolf donne un coup d'accélérateur qui me serre le ventre. Je garde la tête baissée tout le chemin pour me protéger du vent frais. Sa conduite est douce, sans à-coups, et préventive, ce qui allège un peu ma tension. Pourtant, quand il s'engage dans l'impasse qui mène à mon appartement, mon rythme cardiaque n'est toujours pas revenu à la normale.
Je rejoins la terre ferme et tente de détacher le casque tant bien que mal. Wolf attrape les pans de mon blouson pour me ramener contre lui. Assis, il a plus de facilité à me l'enlever cette fois.
Je le remercie d'un sourire timide après qu'il m'a aidée.— Merci de m'avoir déposée, dis-je, encore un peu essoufflée.
— T'as entendu ? m'interpelle-t-il soudainement, le regard fixé sur quelque chose derrière moi.
Je fronce les sourcils, déconcertée.
— Non... de quoi ?
Wolf incline légèrement la tête, tendant l'oreille.
— Ça, murmure-t-il en pointant vers l'escalier de secours.
Un bruit faible, presque étouffé, me parvient enfin. Je tends l'oreille à mon tour. Un miaulement. Mes yeux scrutent l'obscurité, jusqu'à ce qu'une boîte en carton se dessine dans l'ombre, près de l'escalier de secours. Sans réfléchir, je m'en approche. Les sons deviennent plus clairs, et je me fige en découvrant leur origine : un petit chat blanc, tacheté de noir, recroquevillé au fond de la boîte.
— Oh, non, gémis-je, peinée.
Je me baisse et attrape la petite boule de poils frigorifiée. Le chaton se recroqueville davantage, apeuré.
— Chut, l'apaisé-je en le caressant délicatement. Tu ne crains rien, mon beau.
— C'est quoi ? demande Wolf en s'approchant.
— Un chaton, je l'informe en mettant la petite bête à l'intérieur de ma veste pour le protéger du froid. Suivez-moi, tous les deux.
Je monte à mon appartement avec mes deux invités. Wolf m'aide à récupérer mes clés dans ma poche et ouvre la porte. Une douce chaleur nous accueille lorsque j'actionne la lumière.
Mon chez-moi n'est pas très grand, mais il me convient parfaitement. On entre directement dans le salon qui dessert aussi une cuisine ouverte, délimitée par un bar. Dans le couloir sur la droite, il y a ma chambre, une deuxième pièce que j'utilise comme buanderie, et la salle de bain. Simple, cosy et douillet.Je me rends directement à la cuisine, attrapant un plaid sur le canapé au passage. Je suis loin d'être une maniaque. Ma mère aime dire que j'adore mon bordel, et c'est vrai. C'est un désordre organisé. Je n'ai jamais aimé les décors trop soignés où chaque chose est à sa place, comme dans un Tetris. Je trouve ça impersonnel, sans vie.
Je pose délicatement le chaton sur le comptoir de la cuisine et le découvre tout tremblant.
— Tiens.
Je relève les yeux vers Wolf qui me tend la boîte en carton où on l'a trouvé. Heureusement qu'il est là, sinon je ne sais pas comment j'aurais fait. Je le remercie et y confectionne un lit douillet avec la couverture. Alors que je dépose l'animal dedans, Wolf s'assied sur un tabouret et tente de l'amadouer, mais le chaton n'ose même pas le renifler.
Je prends un bol, y ajoute du lait, et le dépose près d'eux. Au bout de quelques secondes, le chat commence à boire.
— Qui peut bien abandonner un être aussi adorable, en plein mois de janvier ? je m'agace.
— Un enfoiré, rétorque Wolf en caressant l'animal, qui se détend peu à peu.
Je ne jure jamais, mais je n'en pense pas moins. Dans une prise de conscience, je retire la veste de Wolf et la lui tends.
— Encore merci pour ce soir, dis-je doucement.
Il me répond par un doux sourire en reprenant sa veste.
— Je vais me faire un thé. Tu en veux un ? Ou un café ?
— Un café, je veux bien.
Je m'affaire en cuisine tandis qu'il continue de dorloter le chat.
— Je peux te poser une question ?
— Bien sûr.
— Tu faisais quoi à Winston ?
Je manque de me renverser l'eau bouillante sur la main. Je déglutis et entreprends de remplir ma tasse.
— J'étais à l'inauguration de la nouvelle salle de sport.
— Tu comptes t'inscrire ?
— Pas spécialement, je réponds en lui apportant son café. J'accompagnais l'organisateur.
Je me racle la gorge et m'appuie contre le meuble en soufflant sur mon thé brûlant.
— Oh, et il n'a pas été correct avec toi ?
Je tourne la tête vers lui et le découvre, me regardant avec inquiétude.
— Si, pourquoi tu me demandes ça ?
— Alors pourquoi tu ne lui as pas demandé de t'aider ?
J'ouvre la bouche, mais me retrouve à court de mots.
— C'est vrai. Je ne sais pas. À vrai dire, je n'y ai même pas pensé.
— Hm...
Il porte sa tasse à ses lèvres, pris d'une intense réflexion. Je ne sais pas ce qu'il se passe dans sa tête, mais après quelques secondes, il relève son regard troublant dans le mien.
— Si une nana avait un rencard avec moi, je m'assurerais qu'elle rentre chez elle en sécurité. Ce mec me paraît louche, si tu veux mon avis, affirme-t-il sans me quitter des yeux.
Je souffle sur mon thé en réfléchissant à quoi lui répondre.
— C'était lui l'organisateur, je te rappelle. Il ne pouvait pas abandonner sa soirée pour me raccompagner.
— Ni pour venir te chercher, visiblement...
Pour être honnête, Wolf dit vrai. Mon père, étant de l'ancienne école, m'a éduquée avec ces principes-là, mais je ne l'admettrai pas devant lui. Après tout, les codes évoluent avec la société.
— C'est un mec bien, soufflé-je en détournant les yeux sur mon thé.
J'y trempe les lèvres et en fais couler un peu dans ma gorge. Wolf ne me répond pas. Besoin de distraction, je remarque le chaton roulé en boule dans le plaid.
— Eh bien voilà, murmuré-je en m'approchant.
Je m'accoude près de la boîte et passe le dos de mon index sur son dos. Je suis ravie d'entendre son ronronnement.
— Tu comptes l'appeler comment ? demande Wolf à voix basse.
Comment sait-il que je compte l'adopter ?
Je tourne la tête vers lui en relevant un sourcil auquel il répond par un sourire. J'émets un gloussement en secouant la tête.
— Aucune idée.
— Tiger.
Je m'esclaffe en posant une main sur ma bouche.
— Tiger ? Comment peux-tu appeler une chose aussi mignonne "Tiger" ?
— Il est tigré comme un tigre, sourit-il en haussant les épaules.
Nous rions ensemble, et l'électricité qui régnait dans l'air s'évapore. Malgré moi, sa proposition fait son chemin.
— Tiger, je l'appelle.
La petite bête émet un ronronnement plus fort avant de s'étirer de tout son long.
— Tu vois ? Il aime ce nom.
Je me redresse en inspirant et pose mes mains à plat sur le comptoir. La tête penchée sur le côté, j'observe Wolf qui arbore un air espiègle, complété d'un clin d'œil.
Comment résister...
— Va pour Tiger alors.
![](https://img.wattpad.com/cover/379739277-288-k483857.jpg)
VOUS LISEZ
The Sliders, Tome 3 [ EN COURS DE PUBLICATION ]
RomanceUne femme. Un homme. Deux âmes tourmentées par un passé douloureux, irrésistiblement attirées l'une vers l'autre. Les Sliders sont sur le qui-vive, leurs vies bouleversées par des événements récents. L'atmosphère au sein du MC est électrique et tend...