Après la colo, Jules m'envoyait un message pour prendre de mes nouvelles tous les deux jours à peu près. Puis toutes les semaines, puis de moins en moins, et puis plus rien du tout.
Parfois je me prenais à regarder des photos de nous. J'avais dans mon album photo une photo de nous deux, le jour de la boum. Je me surprenais parfois à verser une larme en écoutant "Still loving you", chanson de notre slow. Moi ? Lyna Lineira ? Attachée à quelqu'un ? Impossible. Je ne voulais pas devenir dépendante de quelqu'un, je ne pouvais pas.
Je m'étais faite cette promesse quand j'ai su penser par moi même, à 6 ans à peu près, lorsque j'accompagnais ma mère sur la tombe de mon père. Il était enterré dans un cimetière dédié aux militaires. Ce genre de cimetières où on ne voit que des champs de croix blanches à perte de vue et où on n'entend que les sanglots des proches des disparus. Je détestais ces endroits. Peut être parce que c'était l'endroit où le souvenir de milliers de gens errait, ou peut être parce que j'y voyais ma mère se lamenter devant la tombe de mon père.
Ma mère n'a jamais pleurer devant moi. Mais je sentais bien qu'elle souffrait. Quand mon père est décédé, ma mère avait beaucoup de mal à nourrir ses deux enfants et subsistait de petits boulots avec un maigre salaire. Maintenant elle avait continué ses études et était devenue une grande femme d'affaires, nous avions une situation stable, pour le plus grand bonheur de ma mère.
Donc depuis ce jour, je m'étais juré de ne jamais m'attacher à un garçon, à ne jamais être dépendante de qui que soit, sentimentalement comme financièrement. Jusqu'à présent j'avais réussi à tenir cette promesse, jusqu'à Jules. Jules c'était différent. Lui il était pire que la clope, l'alcool, l'héroïne, la cocaïne, toutes les drogues réunies, pire que le chocolat, le sucre, j'étais devenue accro. J'avais besoin d'avoir ne serait-ce qu'un message, ne serait-ce qu'une photo, un coup de fil, une odeur.
Mon cœur s'accélérait quand je recevais un message. Mais mes espoirs était vains. Je n'étais sûrement qu'un épisode dans sa vie, qu'une fille de passage. Et ça me blessait. Depuis la fin des vacances j'étais devenue froide, encore plus sarcastique et renfermée qu'avant. Tout ça me manquait. Parfois j'avais envie de lui envoyer un message, de lui dire à quel point cet enculé me manque, à quel point je souffre. Je n'avais parlé de lui à personne au bahut. La seule personne avec qui j'en avais parlé était ma meilleure amie.
Un soir alors que j'étais au plus bas, j'ai mîs ma fierté de côté et je l'ai appelée. 15 minutes après elle était la. Elle m'as réconfortée quand j'étais mal, et je crois que je lui en serai reconnaissante toute ma vie. En ce moment le sujet "Jules" était tabou.
Nous étions la veille des vacances de Pâques et ma peine n'avait toujours pas disparue. Je ne comprenais pas pourquoi je m'étais autant attachée à ce garçon. Il avait dû me jeter un sort ou quelque chose comme ça. Malgré ma peine je m'efforcais d'être souriante devant ma mère et mon frère pour ne pas qu'ils s'inquiètent. Ma mère a toujours tout fait pour que mon frère et moi soyons heureux. Sûrement pour combler l'absence de mon paternel. Mais on ne peut pas remplacer un père. On ne peut que masquer temporairement la souffrance. Comme ces médicaments qui font qu'on ne ressens plus la douleur malgré qu'elle soit toujours présente. Voilà ce qui m'arrivait.
Mon frère m'avait toujours protégée du monde extérieur, de tout ce qui pouvait me faire mal. S'il avait su, il aurait pris la voiture de ma mère et serait partit enterrer Jules 6 pieds sous terre. Mais je n'ai rien dit.
Je me demande encore s'il en souffre autant que moi. Mais la réponse est toujours non évidemment. J'ai beau chercher ne serait-ce qu'un détail qui ferait qu'il souffre, même juste un peu, mais rien. Je sais que c'est égoïste de vouloir le malheur de quelqu'un mais vous savez qu'on se sens mieux quand on est deux dans la merde. En vrai ça m'avait rendue dingue. Dingue au point de me flinguer. Il m'aurait fallu une cure de désintoxication, mais il ne me semble pas que "ado accro à un gars" soit un motif valable pour se faire interner.
Une fois, je lui avait écris un message super long avec intro+conclusion et finissant par CQFD, ma marque de fabrique, mais j'avais effacé le message et lui avait envoyé "salut". Juste salut. Pas de ponctuation. Pas de smiley. Pas de majuscule. Juste ce mot. Salut. 2 syllabes. 5 lettres. Aucune émotion. Mais je n'avais pas reçu de réponse.
J'espérais secrètement trouver un remède à ma maladie car oui, j'étais malade. Plutôt folle. Folle de lui.
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Tout simplement libre
Teen Fiction“J'ai voulu vivre une relation sans friction, mais c'est de la friction que viens le feu. Et tu vois c'est ça qu'on a, on a le feu.” -22 jump street Elle rêvait de liberté mais est devenue dépendante de lui. Tout simplement libre.